En ce début de mars, c’est une très belle affiche qui nous est proposée au Cargo à Caen, avec pas moins de quatre groupes, pour quatre nationalités différentes représentées. Tous officient dans un style Thrash, avec pour chacun ses particularités. Le public ne s’y est pas trompé, et si la salle peine à se remplir durant les premiers groupes, elle sera comble pour le set des brésilens.
Mortillery
Alors que le public n’est pas encore présent en masse, Mortillery foule les planches du Cargo, pour présenter son nouvel opus "Origin of Extinction". Au cours de cette tournée, c’est la première fois que les canadiens viennent en Europe. Le public n’est donc pas conquis d’avance et se montre timide sur les hymnes thrash old school du groupe. Mortillery donne cependant tout aux normands, à l’image de sa frontwoman Cara McCutchen et du guitariste Alex Guiterez (dont le look ressemble étrangement à celui de Kirk Hammett à ses débuts).
Cara McCutchen dont la voix est malheureusement légèrement sous-mixée se lâche vocalement, sur une musique rappelant les débuts du Thrash (les influences sont évidentes) à la manière d’un Havok, avec cependant la particularité de monter dans les aigües comme Rob Halford sait le faire au sein de Judas Priest ("No way Out").
Le combo est carré rythmiquement ("Creature Possessor") et fait office de machine à voyager dans le temps (alors que la plupart des membres du groupe ne devaient pas être nés au début des 80’s). Si l’originalité n’est pas le point fort du combo, Mortillery délivrera une prestation sans faille, dans une très bonne ambiance, qui mérite que l’on s’attarde plus sur eux. Après une courte demi heure de set, durant laquelle les canadiens visiteront leurs deux albums Murder Death Kill et Origin of Extinction, le groupe s’éclipse sous les applaudissements polis du public (ils auraient mérité un accueil plus chaleureux vu leur prestation) mais se montrera néanmoins très présent au merchandising, pour des dédicaces et séances photos avec le public. Une très belle découverte, un groupe à suivre de très très prêt!
Setlist Mortillery
Murder Death Kill
Sacrifice
No Way Out
Radiation Sickness
Creature Possessor
I am Destruction
Flotsam & Jetsam
Après une courte pause (malgré l’enchainement de quatre groupes, les roadies ont su se montrer efficaces pour les changements techniques), Flotsam & Jetsam s’apprête à monter sur la scène du Cargo. Si le groupe est principalement connu pour avoir accueilli en son sein Jason Newsted, il n’a malheureusement jamais connu le succès qui lui était mérité au cours de sa carrière, frôlant désormais les 30 ans. Après une résurrection en 2012 avec la sortie d’Ugly Noise, les américains viennent cependant faire un bilan de carrière, ne jouant qu’un seul titre de leur dernier album ("Gitty Up") et s’attardant plus sur les hymnes de leur début de carrière ("Hammerhead" ou "Iron Tears", tirés de Doomsday for the Deceiver).
Premier constat, Eric A.K (chant) est un très grand vocalist, impérial sur l’ensemble du set. On ne pourra en dire autant de Kelly Smith (batterie), batteur historique du combo, revenu récemment au sein du groupe, et qui semble un peu à la traine sur certaines parties plus rapides et sur les changements de rythmes ("Hammerhead"). Ed Carlson et Michael Gilbert (guitares) sont cependant beaucoup plus carrés et si le second reste timidement sur le coté gauche de la scène, le premier n’hésite pas à haranguer la foule (beaucoup plus présente que sur le groupe précédent), sans pour autant voler la vedette au leader de la formation. A l’écoute des morceaux que le groupe propose, on ne peut s’empêcher de se demander pourquoi Flotsam & Jetsam est resté un groupe de seconde zone aux yeux du public thrash.
Le son, excellent permet d’apprécier toutes les subtilités de leur musique, notamment les lignes de basse groovy de Michael Spencer. Le public en profite d’ailleurs pour montrer à Flotsam & Jetsam son enthousiasme, au cours de quelques pogos et quelques slams.
Le groupe semble s’amuser sur scène, à l’image de son leader, revêtant un casque sorti tout droit du Seigneur des Anneaux sur "No Place for Disgrace". Au bout de trois quart d’heure de concert, le groupe cède sa place, après avoir été salué très chaleureusement. Après près de 30 ans de carrière, Flotsam & Jetsam arrive-t-il enfin à la consécration longuement attendue ?
Setlist Flotsam & Jetsam
Empty Air
Dreams of Death
Hammerhead
Iron Tears
Escape From Within
Gitty Up
I live you die
No place for Disgrace
Legion of the Damned
Changement de registre pour le troisième groupe de la soirée, les hollandais de Legion of the Damned jouant un thrash teinté de death (ou l’inverse, on ne sait pas trop). Officiant depuis 2006 sous ce nom (le groupe s’appelait auparavant Occult), LOTD est venu présenter son dernier opus au public, Ravenous Plague, sorti l’année dernière. Et si l’essentiel du concert repose sur les épaules de Maurice Swinkels (chant) qui s’époumone énergiquement dans son micro et secoue vigoureusement sa longue chevelure, les guitaristes Hein Willekens (le p’tit nouveau) et Richard Ebisch savent se mettre en valeur avec des riffs d’une efficacité redoutable et des soli d’une rapidité stupéfiante ("Mountain Wolves under a Crescent Moon").
Le son est fort et le public se réveille, moshant à tout va, et quelques slammers téméraires se lancent dans le public depuis la scène, au grand dam des agents de sécurité.
Il semblerait, vu l’ambiance, que le public s’est déplacé en masse pour ce groupe, relativement rare dans nos contrées. Et ce n’est pas l’hymne thrash "Legion of the Damned", issu de leur premier album Malevolent Rapture, qui risque de calmer les esprits, judicieusement placé en fin de set.
Après un peu moins d’une heure de violence et de rapidité, le groupe salue le public, un grand sourire éclairant le visage des musiciens.
Setlist Legion of the Damned
Mountain Wolves Under a Crescent Moon
Son of the Jackal
Ravenous Abomination
Summon All Hate
Pray and Suffer
Doom Priest
Death’s Head March
Cult of the Dead
Armalite Assassin
Legion of the Damned
Sepultura
Bien des choses ont changé depuis le départ de Max Cavalera à la fin du siècle dernier. Si les fans hardcore du groupe regrettent ce split, de l’eau a coulé sous les ponts et depuis, il ne fait aucun doute que le line up post Roots est bien établi. En pleine promotion de The mediator Between Head and Hands must be the Heart, Sepultura vient nous le rappeler à tous. Le concert s’ouvre sur "Trauma of War" et immédiatement le charisme de la montagne de muscles Derrick Green fait mouche.
Désormais chauve, le géant interagit avec le public qui, du fait de la conception de la salle, sent immédiatement la proximité avec les brésiliens se mettre en place. Andreas Kisser est d’ailleurs déchaîné et montre à tout le monde sa maîtrise rythmique et soliste, n’hésitant pas à donner des médiators en main propre aux fans du premier rang à la fin des morceaux.
Malgré trois groupes dans les jambes avant Sepultura, le public se montre très réceptif et les moshs d’une violence inouïe se mettent en place, contrastant avec l’attitude des normands durant le set de Mortillery. Les fans font d’ailleurs un bon accueil aux morceaux récents ("The Vatican", "Kairos") mais dès les titres de l’ère Cavalera, l’hystérie est de mise ("Propaganda").
Le jeune batteur, Eloy Casagrande, 23 ans, ne fait pas tâche au milieu de ses ainés et fait preuve d’un groove (inhérent à la musique des brésiliens) qui n’a pas à craindre la comparaison avec Igor Cavalera. Au cours de "Propaganda", le jeune batteur aura d’ailleurs une frappe tellement puissante qu’un changement de peau de caisse claire s’imposera à la fin du morceau.
Seul Paulo Jr, désormais membre le plus ancien du combo, restera plus en retrait, à la fois scéniquement et dans le mix.
Sepultura construit une setlist variée, faisant la part belle à The Mediator (dont cinq titres seront joués) mais également à Chaos A.D. et Arise (dont "Desperate Cry" sera accueilli par un bon vieux circle pit des familles). Derrick est un grand frontman, passant aisément aux percussions et délaissant le chant à Andreas Kisser au cours de "Da Lama Ao Caos", qui s’en tire plutôt bien. Les sonorités de cette reprise évoquent immédiatement le pays d’origine des musiciens et fait office de pause bien méritée pour le public.
Après un enchainement de classiques ("Territory", "Refuse/Resist", "Arise") Sepultura retourne en coulisse avant le rappel. Celui-ci sera constitué du groovy "Ratamahatta", au cours duquel les percussions de Derrick et le groove d’Eloy se marieront bien, et du morceau que tout le monde attend, "Roots Bloody Roots".
Après une heure et quart de concert, le public est invité une dernière fois à se défouler sur ce morceau, avant de laisser les brésiliens saluer.
Ce concert confirme que Sepultura a su se relever du départ des frères Cavalera et que Derrick Green est un très bon frontman, proche de son public et au niveau vocalement. Même si les morceaux les plus plébiscités du public sont ceux issus de Chaos A.D, Roots ou Arise, les chansons récentes ne détonnent pas dans la setlist. Cette soirée aura également permis au public Caennais de découvrir toute la diversité du Thrash et de mettre en valeur aussi bien les anciens (Flotsam & Jetsam, Sepultura) que les nouveaux venus sur la scène (Mortillery et Legion of the Damned).
Après ce tour de chauffe pour les brésiliens, gageons que Sepultura saura conquérir de nouveaux fans lors de leur prochain passage au Hellfest.
Setlist Sepultura :
Trauma of War
The Vatican
Kairos
Propaganda
Impending Doom
Manipulation of Tragedy
Convicted in Life
Dusted
The Age of the Atheist
Desperate Cry
The Hunt
Spectrum
Da Lama Ao Caos
Inner Self
Territory
Refuse/Resist
Policia/Orgasmatron
Arise
Encore :
Ratamahatta
Roots Bloody Roots
Un grand merci est adressé au Cargö pour l’organisation de ce concert.
Photographies : Watchmaker