Et ça démarre sur les chapeaux de roue avec « weak and sober », longue pièce épique de presque 9 minutes. Rythmiques thrashy, un clavier expressif qui donne de la couleur, des arrangements ultra-travaillés, une virtuosité au service de la composition, des enchaînements originaux (le petit break jazzy avant le refrain est excellent), une voix chaude qui rappelle un peu celle d’Andy Kuntz de VANDEN PLAS donnent le ton. Pourtant, et bien que l'originalité ne soit pas le point fort du skeud, l'ambiance globalement plus sombre permet à SOUTHERN CROSS d’affirmer sa propre personnalité, quelque part entre SAVATAGE et EVERGREY. « Open scars » est du même tonneau, plus agressive, avec des couplets chantés moitié en voix claire, moitié en growls pour un résultat fort énergique, même si le chant manque un peu d’emphase sur les refrains (des chœurs auraient bien aidé). Les solos sont virtuoses sans être assomants, le duel guitare clavier passe comme une lettre à la poste, tout comme le single « thirteen » qui s’ensuit et son chouette passage instrumental.
« as goodwill falls » est plus convenue avec un refrain peu convaincant, malgré une maîtrise instrumentale jamais mise en défaut. C’est là qu’on réalise la faille du style southern cross : c’est parfaitement exécuté, bien écrit, suffisamment original pour qu’on n’ait pas à crier au plagiat, et pourtant, on a la furieuse impression que les mélodies se suivent et se ressemblent. Certes, l'ensemble est cohérent, mais on sent un peu trop à l'avance ce qui va se passer. Pas évident non plus de différencier les refrains, la faute encore une fois à des mélodies pas toujours très convaincantes, trop semblables les unes aux autres (n’est pas finlandais qui veut), et un chant qui, s’il est bien chaud et envoûtant, n’en demeure pas moins limité (n’est pas Andy Kuntz qui veut).
Au fur et à mesure des compositions, on sent qu’il manque un petit truc, un grain de folie, plus de diversité, une certaine prise de risques, pour se hisser au niveau des ténors du genre. Car si les musiciens sont très bons, l’album est finalement assez uniforme, et le chant n’aide pas. Si David Lizotte possède un joli timbre (gros boulot depuis le premier album), il est encore trop limité dans ses envolées, envolées que le style réclame pourtant, qui permettraient d’accentuer le côté épique et de proposer des choses différentes. SOUTHERN CROSS a donc presque tout ce qu’il faut pour casser la baraque. Même si ce n’est pas encore pour cette fois, les québécois nous proposent un album très solide, bien fait et qui marque une progression époustouflante par rapport à leur premier effort. S’ils continuent comme ça… Un groupe à découvrir.
7/10