Sepultura enterre le Trabendo
La légende du thrash metal brésilien a une nouvelle fois épaté le public parisien avec un concert d’une puissance et d’une maîtrise rare. Les fans présents ont acclamé le groupe comme un seul homme. Confirmant sa volonté d’aller de l’avant sans oublier son passé, le groupe a aussi invité des groupes de toutes générations pour ouvrir le bal, des jeunots de Mortillery et Legion of the Damned aux vieux briscards de Flotsam and Jetsam.
Mortillery
La soirée est ouverte par le jeune groupe canadien Mortillery, qui a la particularité de compter deux femmes dans ses rangs, dont Cara McCutchen au chant. Si la thrasheuse se montre relativement timide lorsqu’il s’agit de communiquer avec le public, elle assure vocalement, en éructant avec rage et conviction ses paroles agressives.
Côté musiciens, les jeunots assurent le boulot comme il faut. Tous en ligne à cause du peu de place sur scène, chaque membre assure à sa manière, avec Kent Quinlan qui assure de sympathiques solos pendant que son acolyte Alex Gutierrez enchaîne des riffs typiquement thrash, soutenus par la bassiste Miranda Wolfe et le batteur Kevin Gaudet, qui assurent une rythmique solide.
Le public est très clairsemé à cause de l’horaire, mais le peu de thrashers présent dans la fosse se donne gentiment pendant que les curieux regardent d’un œil intéressé la prestation. Malgré son manque flagrant de communication avec le public, Mortillery a probablement gagné des billes lors de cette soirée.
Setlist
Murder Death Kill
Sacrifice
Despised by Blood
Radiation Sickness
Creature Possessor
I Am Destruction
Flotsam and Jetsam
Vient maintenant le tour de Flotsam and Jetsam, formé presque 30 ans avant le groupe précédent. A la suite du réenregistrement récent de l’album No Place for Disgrace, les cinq thrashers mettent cet album bien en avant, si bien qu’il occupe la moitié de la setlist. De quoi occuper les thrashers en mal de mélodie avec les magnifiques "No Place for Disgrace" et "Escape from Within". La setlist est clairement orientée old school et un seul titre de l’album le plus récent du groupe arrive à s’y glisser : "Gitty Up".
Pendant les 40 minutes qui leur sont allouées, les cinq musiciens se démènent donc en enchaînant passages aux mélodies léchées et accélérations typiquement thrash. Les compos sont excellentes, mais le groupe a un peu de mal à suivre. La performance est là, mais les musiciens sont cloués sur leur espace scénique, les yeux souvent rivés sur leur instrument. Un manque de communication flagrant, qui se ressent aussi chez le frontman Eric Knutson, visiblement en petite forme vocale.
Heureusement, le public, déjà un peu plus fourni, salue la performance musicale, notamment des guitaristes Steve Conley et Michael Gilbert, qui assurent un sacré boulot. En revanche, ce n’est pas avec ce thrash mélodique que le public pogotte. La musique de Flotsam and Jetsam semble s’apprécier tranquillement, avec un pit gentillet au milieu de la fosse.
Si voir un tel groupe de thrash est chose rare en France, on peut regretter un relatif manque d’entrain de la part des musiciens. Dommage, car les gars connaissent leur sujet et sont capables d’une belle performance.
Setlist :
Me
Dreams of Death
Hammerhead
Iron Tears
Escape from Within
Gitty Up
I Live You Die
No Place for Disgrace
Legion of the Damned
Il est temps de muscler l’ambiance avec l’arrivée du groupe de thrash/death metal hollandais Legion of the Damned. Si certaines de leurs précédentes prestations ne s’étaient pas révélé des plus convaincantes, le groupe s’en sort bien mieux cette fois-ci, notamment grâce à l’arrivée d’un nouveau guitariste pour le live, Hein Willekens.
Grâce à ce nouveau membre, le son gagne en puissance et les riffs agressifs du groupe bénéficient d’un soutien supplémentaire, ce qui donne plus de punch aux compos. A cela, le public répond par la positive en offrant au groupe un moshpit digne de ce nom, notamment sur le titre "Ravenous Abomination".
Ce titre fait partie des cinq du dernier album en date, Ravenous Plague, qui sont joués ce soir, ce qui représente la moitié de la setlist. En dehors de cette séance de promo du nouvel album, fort bien réussie au demeurant, le groupe case tout de même quelques-uns de ses titres classiques comme 'Cult of the Dead" et "Legion of the Damned", bien appréciés par l’assistance
Legion of the Damned semble donc bien adapté à ouvrir pour Sepultura, le frontman Maurice Swinkels remercie d’ailleurs les Brésiliens de les avoir permis de tourner avec eux. Après les échanges de politesse, place maintenant aux hostilités finales avec la tête d’affiche tant attendue…
Setlist :
The Apocalyptic Surge [sur bande]
Mountain Wolves Under a Crescent Moon
Son of the Jackal
Ravenous Abomination
Summon all Hate
Pray and Suffer
Doom Priest
Death's Head March
Cult of the Dead
Armalite Assassin
Legion of the Damned
Twilight Zone [sur bande]
Sepultura
“Je sais que beaucoup de gens disent de la merde sur nous, mais ce groupe est bien Sepultura“ déclare Derrick Green en première partie de concert, avant que le groupe n’entame le rare et sulfureux "Propaganda". Le canevas est dressé, il est temps de laisser les polémiques dehors et de faire ce que le groupe fait le mieux : une performance live exemplaire.
Ainsi, le frontman Derrick Green, maintenant sans un poil sur le caillou, expulse toute sa rage du début à la fin du set d’une heure et demie, sans retenue ni artifice. Côté musiciens, Andreas Kisser sert toujours ses solos exquis et ses riffs massifs, soutenu par la basse carrée et puissante de Paulo Xisto. Derrière ses toms, Eloy Casagrande est toujours aussi impressionnant de maîtrise et de brutalité dans son jeu de batterie impérial, qui sied aussi bien aux compos directes comme "Kairos" qu’à celles qui contiennent des éléments tribaux comme "Ratamahatta".
Devant une telle prestation, le public répond plus que jamais présent en moshant du début à la fin du concert, avec violence et abandon, preuve de la ferveur qu’il voue au groupe, le tout dans une salle bien remplie. Le sommet de cette ferveur est atteint sur le classique thrash Inner Self, avec un circle pit massif et puissant.
Cette ferveur se manifeste aussi avec le fait que le public réagit aussi bien sur les classiques que sur les morceaux récents. Sepultura, fier de son nouvel album, en joue la moitié, du brutal "Trauma of War" à la reprise groovy de Chico Science, "Da Lama ao Caos". Le groupe se permet d’insérer une belle rareté, une autre reprise, de New Model Army issue de Chaos AD, The Hunt, qui fait aussi l’unanimité dans la fosse. Evidemment, les classiques ne sont pas oubliés, qu’ils soient anciens ("Arise", "Refuse/Resist") ou plus récents ("Convicted in Life").
Avec une heure et demie de thrash intense et sulfureux, Sepultura fait taire les mauvaises langues qui doutaient encore de sa capacité à faire un concert digne de ce nom. L’interprétation est juste et forte et peu importe les membres précédents, le groupe continue de créer, d’expérimenter et, surtout, d’avancer, la tête haute, en exposant fièrement son metal sans compromis à un public de plus en plus réceptif.
Setlist :
Trauma of War
The Vatican
Kairos
Propaganda
Impending Doom
Manipulation of Tragedy
Convicted in Life
Dusted
Desperate Cry
The Hunt [reprise de New Model Army]
Spectrum
Da Lama ao Caos [ reprise de Chico Science & Nação Zumbi]
Inner Self
Territory
Refuse/Resist
Arise
Rappel :
Ratamahatta
Roots Bloody Roots
Photos : © 2014 Elie Lahoud-Pinot et © 2014 Nidhal Marzouk
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