The Oath possède, à première vue, tous les arguments pour devenir la nouvelle sensation du heavy / doom / rock occulte. Un logo conçu par le célèbre Erik Danielsson de Watain, une musique s'inscrivant dans une mouvance relativement à la mode et profitant d'une exposition toute particulière, une signature sur le réputé label Rise Above Records et, surtout, deux belles jeunes femmes en guise de seuls et uniques membres réguliers (le reste du line-up est complété par des musiciens de session pour les concerts, dont Andy Prestridge d'Angel Witch). Voilà, avec tout ça, vous avez un packaging parfait pour attirer l’œil, appâter le client amateur du genre et le conquérir par la voix exquise de votre chanteuse sur une musique endiablée. Surtout qu'en plus, la frontwoman n'est pas une parfaite inconnue, Johanna Sadonis ayant fait quelques apparitions pour ses compatriotes de Secrets of the Moon. Purée, cet album éponyme sent carrément bon ! Peut-être même un peu trop …
Vous l'aurez donc compris, le but de ce duo mené par notre chanteuse allemande et sa compère Linnéa, guitariste suédoise de son état, n'est pas de faire dans l'originalité. C'est dans les vieux pots qu'on fait la meilleure soupe, nous dit le proverbe, et ça The Oath le sait pertinemment. Les influences de notre cher binôme sont à peine masquées, notamment Black Sabbath en pleine ligne de mire, ce qui en soi n'est pas un mal. Il faut d'ailleurs reconnaître au groupe allemand une grande facilité à aller à l'essentiel, et à savoir digérer ses inspirations pour ne pas ressortir un vulgaire plagiat de leurs illustres prédécesseurs. La veine 70s est correctement respectée et les deux femmes rendent un hommage assez plaisant au niveau de la composition à leurs références, ceux qui ont bercé leurs douces oreilles. C'est cette formule bien établie qui permet d'accoucher d'un titre de la teneur de « Night Child », assez direct et à l'approche fortement psychédélique. La piste est efficace, son refrain bien écrit, voilà qui aura du mal à vous quitter pour quelques temps. Bref, tout cela semble bien amorcé, sauf qu'il subsiste un gros problème, qui perdure tout au long de l'écoute …
Le chant. On aimerait que Johanna prenne une cure de vitamine et s'inspire de sa collègue Linnéa sur bien des plans. Car c'est bien simple, l'allemande semblerait presque se demander ce qu'elle fait dans cette galère, tant son chant manque cruellement d'implication et d'énergie. Le contraste entre les riffs lourds et le timbre plus éthéré et discret pourrait être un avantage si celui-ci était un minimum convaincu de sa performance. Or non, notre frontwoman manque fortement de charisme et lit ses paroles comme s'il s'agissait de sa liste de courses. On prendra l'exemple du morceau d'introduction « All Must Die », pourtant très intéressant sur le plan de la composition mais gâché par cette voix traînante et aussi ennuyée qu'elle endort son auditoire. Ce qui est parfaitement dommage, car le timbre de la jeune femme est loin d'être désagréable et qu'elle arrive à, parfois, mettre un peu plus de cœur à l'ouvrage et Ô miracle, nettement plus convaincre dans ces moments là. Sa prestation sur « Leaving Together » est loin d'être à jeter, à l'inverse du morceau suivant, « Black Rainbow », non seulement bien moins inspiré mais en plus plombé par cette voix à côté de la plaque. Fort dommageable quand on sait que la voix constitue souvent un point important pour faire adhérer son auditoire à sa musique.
On est trop dark, on sourit pas.
Et si on regarde les pistes de plus près, ce n'est pas toujours la joie également. On sent pourtant que le duo souhaite bien faire, et c'est tout à leur honneur. The Oath maîtrise l'art du revival et sait jouer sur les ambiances, tenter de les faire varier au mieux, mais parfois, la formule échoue, et le manque d'inspiration se révèle flagrant. « Black Rainbow », par exemple, présente des ressemblances troublantes avec « Night Child » au niveau de la guitare, tant que ça en devient dérangeant. Et ce n'est pas des breaks bien pensés qui sauveront le titre de la fadeur. Et en parlant d'ennui, « Silver and Dust » aurait pu être tout à fait décente si le chant n'était, encore une fois, pas en retard sur la marche. Pas de quoi sauter au plafond, mais au moins, le résultat pourrait être correct. Mais non. On douterait presque du plaisir de Johanna à officier au poste de chanteuse, et si jamais elle en prend vraiment, il serait temps pour elle de le montrer, tant elle plombe parfois des morceaux honnêtes, bien que manquant encore de maturité et de personnalité.
Pourtant, The Oath sait tirer son épingle du jeu plus d'une fois. On prendra l'exemple de « Night Child », qui est un véritable tube, portant haut l'étendard du duo. La dernière piste, tranchant avec le format du hit, est également bien écrite et interprétée. « Psalm 7 », bien qu'affublée de quelques dispensables longueurs, sait faire monter la mayonnaise et plonger dans l'ambiance pour conclure ce premier essai éponyme sur une note satisfaisante, mais qui arrive un poil trop tard pour sauver les meubles.
The Oath est très loin d'être la révélation de l'année. On peinera même à trouver en cette œuvre de quoi la qualifier de livraison sortant du lot. On décèle pourtant de bonnes idées, une production soignée et qui sied à merveille au genre, des riffs souvent adroits et quelques refrains bien écrits. Malheureusement, le côté uniforme, le manque de personnalité et surtout la platitude du chant ne permettent pas au duo de passer à la vitesse supérieure et de pouvoir prétendre, pour le moment, au rang de nouvel espoir du style. Il ne s'agit cependant que d'un premier essai, et les erreurs peuvent être rectifiées. On guettera donc leurs prochains travaux, en espérant y trouver une réelle amélioration. Sans quoi, les deux musiciennes ne feront pas long feu dans les mémoires collectives.