Le stoner-doom-rock occulte à chanteuse va devenir une véritable marque de fabrique. Si les réputés Acid King peuvent se targuer d'être le fer de lance de ce mouvement, parmi les formations engouffrées dans cette vague, on trouve du bon (Subrosa, Blood Ceremony, Second Grave, …) mais il est possible d'avoir de mauvaises surprises (votre serviteur a eu le malheur de chroniquer The Oath, et ce n'était pas formidable). Méfiance donc quand Mount Salem, petit quatuor américain au nom ensorcelant arrive sur le devant de la scène avec son premier EP, qui lui vaut une signature sur le réputé label Metal Blade et une réédition (agrémenté de deux nouveaux titres, s'il vous plaît). Voilà qui semble prometteur à première vue, bien qu'une signature ne soit, encore une fois, pas un gage de qualité certain. Il est préférable de rentrer dans le vif du sujet pour savoir ce que vaut l’œuvre en question, Endless. Haut du panier de la mouvance, ou encore un de ces éternels suiveurs inintéressants ?
Point de surprises, l'originalité, on s'en tape avec la bande à Emily. Les quatre jeunes musiciens sont amoureux de la période 70s de Black Sabbath, et cela s'entend du début à la fin. Les huit morceaux portent donc cette influence fort bien digérée qui confère à la fois ce goût de madeleine de Proust, mais également cette lourdeur caractéristique et inhérente au genre. Dans le cas présent, le sujet est maîtrisé sur le bout des doigts, et le combo nous délivre huit pistes très inspirées, qui dénotent par leur redoutable efficacité. Capable de pondre des mélodies accrocheuses au premier coup d'oreille, le groupe mise sur l'impact de ses refrains pour plaire à la masse. Maintenant, la question est simple : qu'est-ce qui fait de Mount Salem un nouveau venu intéressant ? Alors là, ils ont plein de choses à nous dire !
Pour faire plus cliché, elle aurait pu s'appeler Sabrina.
Concrètement, moult nouveaux venus dans le milieu misent sur l'impact de leur chanteuse pour faire face à la concurrence. Pari gagnant avec Emily Kopplin, au timbre aigu mais enchanteur, portant les lignes de chant avec une grâce impressionnante. Si la frontwoman ne porte pas la réussite entière sur ses épaules, il faut lui reconnaître une place centrale dans cet ensemble d'éléments qui se combinent à merveille. Et comme elle possède plus d'un tour dans son sac, les pistes sont agrémentées d'une pointe d'orgue, impeccable pour instaurer une atmosphère mystique, quasi-religieuse. L'interlude instrumentale « Mescaline » gagne ainsi en intérêt, et captive durant les trois minutes proposées. Ces messieurs peuvent ainsi compter sur leur consœur pour marquer de précieux points dans le cœur des amoureux du genre.
Mais le mérite leur revient aussi, à ces musiciens doués de leur dix doigts. Les titres sont puissants, gagnant en impact par cette production ni clean, ni dégueulasse, à la teinte datée mais permettant de mettre en valeur chaque composante. Qui plus est, les morceaux ne tombent jamais dans la répétitivité, tant chacun d'entre eux possède son moment fort. On citera ainsi le refrain de « Mescaline II » où Emily fait des merveilles, « Full Moon » qui se dévoile petit à petit pour terminer sur les chapeaux de roue, ou encore l'opener « Good Times », débutant les hostilités sous les meilleurs auspices. Chaque piste trouve sa place et se révèle indispensable, complémentaires les unes des autres.
Pour un groupe aussi récemment formé, le résultat est bluffant. S'ils souhaitent se démarquer pleinement, il va falloir que Mount Salem trouve sa propre personnalité et assure ses arrières face à d'autres groupes tout aussi talentueux (les espagnols d'Hela, les suédois d'Avatarium, …). Mais Endless est une carte de visite alléchante, proposant des titres matures et fédérateurs. Nous tenons ici un énorme espoir de la scène, capable de tenir la dragée haute aux ténors. On risque donc, et à juste titre, d'entendre parler de ce quatuor à nouveau. La suite est vivement attendue.
