Le vilain petit canard
Sonata Arctica attaque le printemps avec son huitième album studio, Pariah’s Child. Vendu comme un retour au power metal, cet album n’en est pas un véritable. Si le groupe revient, sur certains titres, à des structures plus simples et des rythmes plus enlevés, il ne sort pas un disque comparable à Silence. Malheureusement, la qualité baisse grandement à cause de certaines chanson qui auraient mérité plus de travail.
Tôt ou tard, on est déçus par ses idoles. Pourtant Sonata Arctica s’était montré tenace. Définitivement débarrassé de son étiquette "power metal" depuis le virage Unia (déjà amorcé sur Reckoning Night), le groupe de Tony Kakko avait réussi à maintenir la qualité de sa musique, en entretenant une écriture intelligente et en privilégiant la créativité aux tempos supersoniques et les sonorités typiques du genre qui les a lancé.
Malheureusement, l’évolution de Sonata Arctica n’a pas été comprise par tous les fans. De fait, pour son huitième album, le groupe a décidé de revenir à l’ancienne imagerie, pour donner à son album un emballage power metal. Que les fans le sachent : ce supposé retour n'est que poude aux yeux le groupe reste éloigné de ses trois premiers albums avec Pariah’s Child. Certes, la double-pédale et les rythmiques rapides sont plus présentes par rapport aux dernières productions du groupe, mais ne sont pas synonymes d’un retour aux premiers amours du groupe.
En revanche, sur la première moitié du disque, on constate un retour des compositions directes et des structures simples. Malheureusement, ces quatre premiers titres sont les moins intéressants. Le morceau d’ouverture, "The Wolves Die Young", dispose d’une ligne mélodique intéressante, mais pas assez développée, "Running Lights" sent le speed forcé, qui ne va pas avec la mélodie gentille qui le porte. Le single "Cloud Factory" partait sur une bonne base mais tombe dans une niaiserie des plus désagréables, sans atteindre les abysses de la ballade "Love" en fin d’album, probablement le pire ratage du groupe depuis "Under your Tree" (2007).
Tony Kakko a-t-il donc perdu son talent de compositeur sur Pariah’s Child ? Heureusement que non. Il faut attendre le titre "Blood" pour retrouver son talent et ses lignes de chant torturées. L’habillage speed est moins présent, même si Elias Viljanen continue de riffer de manière saccadée, même sur le poignant "What did you Do in the War, Dad ?" Le leader de Sonata Arctica n’a pas non plus son grain de folie, le bipolaire "Half a Marathon Man" et le délirant "X Marks the Spot" le montrent bien. Enfin, les inspirations Queen et Danny Elfman se retrouvent sur la pièce finale, "Larger than Life", à l’esprit baroque qui rappelle les meilleurs moments d’Unia.
Si toutes ses compos ne se valent pas sur Pariah’s Child, on peut néanmoins constater que sa palette vocale est toujours aussi complète, avec une interprétation tragique sur "What did you Do in the War, Dad ?", puissante sur "Half a Marathon Man" ou mélancolique sur "Blood". Les chœurs sont toujours aussi bien gérés et complets. Malheureusement, le bon goût vocal côtoie le mauvais goût de certains samples au clavier, notamment en première partie d’album, avec un filler "Take one Breath" qui fait tomber le groupe dans les abysses du ridicule.
Les musiciens de Sonata Arctica n’ont pas perdu leur talent, mais semblent aussi muselés sur ce disque. Si le petit nouveau Pasi Kauppinen s’illustre avec un court lead sur "The Wolves Die Young", il se retrouve souvent à emboîter le pas de Tommy Portimo, qui se montre bien moins intéressant à la batterie que par le passé. Elias Viljanen peut beaucoup moins exposer ses talents de soliste, même si de petits duels sont toujours présents avec le claviériste Henrik Klingenberg.
Pariah’s Child aurait pu être un bon album de Sonata Arctica, mais manque de finition. L’aspect direct a été privilégié par rapport à l’écriture, ce qui se ressent sur la première moitié du disque. Mais même en signant le plus mauvais album de sa carrière, Tony Kakko montre qu’il en a encore sous le coude et que son génie créatif n’est pas complètement parti. Il ne reste plus qu’à espérer que le prochain album sera débarrassé de toute étiquette de soi-disant retour aux sources et que la créativité reprendra le dessus.