Pénétrons un épais et obscur brouillard lors d'une balade dans la profonde forêt roumaine... Entre tradition et mysticisme, émotion et mélancolie, agressivité et légèreté... Laissons-nous transporter...
Negurã Bunget, une formation si méconnue de nous français, si étrange, si étonnante... Au détour de leur musique particulière et unique à base de black metal, d'atmosphères à la fois sombre et folk, d'esprits occultes... Negurã Bunget, plus que deux mots sous couvert d'un groupe, une institution.
Voici que 15 ans après leurs débuts et 4 années après Om, un brillant opus que l'on croyait ultime, deux des membres fondateurs (Hupogrammos et Sol Faur) quittent le navire pour lancer leur nouveau projet Dordeduh. Nous ne donnions alors plus cher du combo transylvanien...
Pied de nez à ce qui les croyaient perdus dans cette immense forêt de l'oubli, ils nous reviennent cette année avec un nouveau CD, intitulé Vîrstele Pãmîntului, le dernier des piliers Negru (le batteur) accueillant autour de lui 3 nouveaux membres dont le chanteur/guitariste Corb qui reçoit ici une mission délicate : faire oublier le charismatique Hupogrammos.
On était en droit de s'attendre à une déception, un changement radical de cap, une sous-production du précédent chef d'oeuvre. Que nenni ! Le nouveau Negura Bunget répond présent face à sa réputation et offre ici un brûlot d'une qualité plus que légitime.
Et c'est là que rancoeurs et critiques s'exacerbent, prétendant que ce Vîrstele Pãmîntului ne fait que singer Om, Corb faisant selon ces quolibets du sous Hupogrammos en reprenant sa voix et ses mimiques. Que d'erreurs, quel manque d'objectivité ou de lucidité !
Alors certes oui, les lignes vocales ou autres mélodies obscures/éthérées rappellent le précédent LP. Et alors ? Le groupe reste fidèle a sa réputation, offrant ici un digne successeur à Om et poussant même la folie à lui apporter une certaine plus value.
Car oui, si Vîrstele Pãmîntului est plus direct et légèrement plus mélodique, plus brut, plus accrocheur en un sens, il n'en ressort pas moins un poil plus abouti. Negru a ici décidé d'assurer une pérénité à la fois logique et ambitieuse, autour de nouveaux éléments parfaitement intégrés au concept ultime que peut être Negurã Bunget.
Vîrstele Pãmîntului petit frère surdoué de Om ? Très certainement. Même s'il ne possède pas le pendant ultra aérien et rêveur d'un "Tesarul de Lumini" qui restera inégalé, il pose d'autres jalons mythiques en débutant sa galette par deux tueries sans nom, d'un "Pãmînt" ne cessant de monter en puissance à un "Dacia Hiperboreanã" purement orgasmique qui restera dans les annales des grandes chansons de l'année 2010.
Le reste ne dépareille pas même si certaines chansons traînent quelque peu en longueur sur la fin. On retiendra également, en plus du sus-mentionné départ en fanfare, les splendides "Chei de Rouã" et "Tara de Dincolo de Negurã", sans oublier les interludes "Umbra" et "Jor" tout simplement ravissants d'authenticité.
Mais voilà que j'en ai déjà trop dit sur un album qui avant tout se vit, se laisse délecter, avant même de s'écouter... En cela opère la magie, en cela ce Vîrstele Pamîntului relève d'un certain génie. Negurã Bunget a parlé, la parole est désormais aux frères ennemis de Dordeduh dont la première mouture est attendue avant la fin de l'année...
Ma note : 9/10