A peine un mois avant la sortie de leur nouvel opus "Coat of Arms", le 21 mai prochain chez Nuclear Blast, les suédois de Sabaton par l'intérmédiaire de son chanteur Joakim Brodén nous accordent une interview dont voici les détails...
Ju de Melon : Bonjour Joakim ! Tout d'abord comment vas-tu et comment te sens-tu un mois avant la sortie du nouvel album "Coat of Arms" ?
Joakim Brodén : Bonjour Julien ! Pour le moment je me sens très bien, je suis déjà de retour en studio pour travailler sur de nouvelles chansons. C'est dans mon habitude de travailler sur du nouveau matériel avant même la sortie d'un nouvel album (rires) ! En ce qui concerne "Coat of Arms", je suis un peu anxieux à vrai dire... C'est toujours un peu comme ça, j'ai toujours un peu peur que les gens n'aiment pas nos nouvelles sorties donc ce que je ressens est logique.
Ju de Melon : Avant de parler de l'album, parlons du changement de label. Pourquoi avez-vous quitté Black Lodge Records pour Nuclear Blast et qu'est-ce que ça vous a apporté ?
Joakim Brodén : Nous avons changé en fait car notre contrat avec Black Lodge Records était terminé, et malgré les très bons termes qu'on avait avec ce label nous en avons cherché un nouveau pour la suite. Nous avons commencé à explorer les différentes solutions qui s'offraient à nous et nous avons choisi ce qui était le meilleur pour le groupe, à savoir Nuclear Blast ! Un label qui pourrait nous faire franchir une étape et nous rassurer sur certains points.
Ju de Melon : Revenons-en à l'album lui-même. On note quelques différences avec "The Art of War"... Considères-tu "Coat of Arms" comme un changement radical ou une évolution par rapport au précédent opus ?
Joakim Brodén : Je pense plus qu'il s'agit d'une évolution. Nous n'avons jamais eu l'idée de changer de direction, on ne se pose pas ce genre de questions quand on écrit notre musique... On essaye de faire les meilleures chansons possibles et après ce sont elles que l'ont met dans l'album. Je pense que "Coat of Arms" suit le même style que nos précédents opus, même s'il y a quelques variations...
Ju de Melon : Est-ce que vos habitudes ont changé au niveau de l'écriture des paroles ou de la musique ?
Joakim Brodén : Non, rien n'a changé ici, je m'occupe toujours de la musique et avec Par Sundstrom nous écrivons les paroles. Globalement on écrit chacun deux textes à part puis on finalise tout ça ensemble tout en écrivant le reste de concert, on fonctionne bien de cette façon. En ce qui concerne la composition, chaque chanson a sa vérité et sa base... Parfois je pars d'un riff guitare, d'autres fois d'une ligne de clavier, par exemple "Wehrmacht" est plus basée sur la guitare alors que "The Final Solution" est née sur un synthé.
Ju de Melon : Avez-vous gardé la même équipe de production pour l'enregistrement de ce nouveau CD ?
Joakim Brodén : Pratiquement la même équipe oui, on a demandé à Peter Tägtgren pour l'enregistrement et la production. Par contre il n'était pas disponible pour le mixage, il était en tournée avec Hypocrisy... On a enregistré la batterie dans son home studio qui se situe à peine à 45mn de là où je vis, ce qui est pratique. Ensuite on a ramené ces enregistrements dans notre studio où on a enregistré le reste en toute sérénité. Par la suite, on a appelé Fredrik Nordström de Dream Evil pour le mixage et il a fait du bon boulot !
Ju de Melon : Et pour les choeurs, avez-vous utilisé différentes personnes ?
Joakim Brodén : On a essayé de choisir quelques personnes différentes sur certaines chansons, en fonction de leur disponibilité. Par exemple, la mère et la tante de notre batteur Daniel Mullback sont venues avec leurs amies faire quelques chorales, c'est assez amusant ! Donc oui on utilise même les compétences de nos familles respectives pour Sabaton (rires) !
Ju de Melon : Question éminemment difficile à présent, quelle est la chanson que tu préfères ou celle dont tu es le plus fier sur "Coat of Arms" ?
Joakim Brodén : Juste une ? C'est dur... Ca varie tellement de jour en jour, mais je vais probablement te dire le titre éponyme "Coat of Arms" mais aussi la chanson "Uprising". D'autres jours je t'aurais peut-être répondu "Saboteurs" ou "White Death" mais bon (rires)... Si je dois en choisir une, j'opterais pour le morceau titre car pour moi il représente vraiment l'esprit Sabaton.
Ju de Melon : Certaines chroniques ont déjà mis l'accent sur le clavier qui sonne plus "années 80" sur cet album. Est-ce un changement de son délibéré ?
Joakim Brodén : En fait ces changements sont avant tout dus au fait qu'on a un peu changé la mixture du son clavier sur certains morceaux... Le fait que Fredrik s'est occupé du mixage à la place de Peter a sûrement pas mal joué également. Le synthé de fond par exemple sonne globalement comme sur l'album "Primo Victoria"... Après, si on va dans les détails, certaines chansons ont un son différent d'avant. Par exemple "The Final Solution" a un côté un peu old school niveau claviers et "Wehrmacht" a un côté plus expérimental avec ce son un peu circulaire qui balaye en background... A part ça, je ne pense pas qu'il y ait beaucoup de différences par rapport à avant, ne serait-ce qu'au niveau de l'enregistrement. Le mixage a quant à lui fait très certainement évoluer certaines choses... Nous avons aussi utilisé quelques samples de chorales sur "Screaming Eagles" et "Coat of Arms".
Ju de Melon : Quelles ont été tes inspirations musicales pour la composition des nouvelles chansons ?
Joakim Brodén : J'essaye de ne pas trop écouter de musique quand je suis en mode composition, sinon je suis trop tenté de "voler" certaines parties (rires) ! Donc j'évite dès que je le peux... Par contre j'essaye de regarder pas mal de séries TV ou de films et d'en tirer l'essence émotionnelle, j'essaye plus de m'inspirer d'une atmosphère que d'un morceau de musique en particulier. Je travaille au maximum avec l'émotion...
Ju de Melon : Au niveau des paroles, quelle est selon toi la chanson qui a l'histoire la plus émouvante à raconter ?
Joakim Brodén : Très certainement "The Final Solution"... Celle-ci et puis également "Uprising" !
Ju de Melon : Ca n'a pas dû être simple d'écrire une chanson sur la solution finale...
Joakim Brodén : Oui, dans le sens où il a vraiment fallu beaucoup réfléchir sur les mélodies... On ne pouvait pas faire quelque chose de joyeux, certainement pas, il fallait une certaine gravité et émotion pour accompagner des paroles aussi dures telles que "Enter the gates, Auschwitz awaits"... On a donc vraiment fait attention. On a décidé de l'incorporer à l'album car on adore tous cette chanson dans le groupe, mais il est évident que ce n'est pas un morceau pour lequel on pourra "taper dans les mains"...
Ju de Melon : Il sera donc très difficile de la jouer en live...
Joakim Brodén : Nous n'avons pas abandonné cette idée, mais il va falloir y apporter quelques arrangements spéciaux. Nous allons probablement en faire une version plus acoustique pour le live... Afin que pendant cette chanson, si on la joue, on n'adopte pas l'attitude habituelle sur scène à haranguer la foule. Ce sera sûrement quelque chose de plus intimiste et d'émouvant avec quelques effets spéciaux particuliers peut-être...
Ju de Melon : La pochette a-t-elle été réalisée par la même personne qui a fait celle de "The Art of War" ?
Joakim Brodén : Oui, c'est un nouveau bon travail de la part de Jobert Mello. Dès que nous avons eu l'idée du nom de l'album, Par a fait un brouillon sur papier, un dessin très moche d'ailleurs (rires)... et nous avons envoyé ce "truc" à Jobert pour lui donner une idée. Ensuite, il nous a envoyé un premier dessin, et ça nous a de suite plu. On lui a demandé de retoucher quelques couleurs mais le premier essai était déjà le bon !
Ju de Melon : J'ai vu que vous aviez prévu le tournage d'un clip en Pologne... Où en sont les plans maintenant que les évènements là-bas ont un peu changé la donne ?
Joakim Brodén : Nous allons en fait tourner trois clips vidéos pour les chansons "Uprising", "Coat of Arms" et "Screaming Eagles". Pour "Uprising", le tournage a été reporté car il devait se dérouler en Pologne la semaine qui a suivi le crash de l'avion du président, et en cette période de deuil ce n'était plus possible. On aurait dû tourner ce clip hier et aujourd'hui... Mais nous devons retrouver des dates, probablement pour le mois de mai, et reprendre rendez-vous avec les acteurs polonais sur place, l'équipe de production ainsi que l'acteur suédois Peter Stormare, bien connu des fans de la série Prison Break. C'est d'ailleurs un peu cauchemardesque de devoir tout reprogrammer (rires) ! En ce qui concerne "Screaming Eagles", on devrait aussi le tourner au même endroit et avec la même équipe, probablement à la même période... Cependant, le clip de "Coat of Arms" se fera quant à lui chez nous en Suède, on commence le tournage la semaine prochaine !
Ju de Melon : Parles-nous un peu de tes attentes sur la grande tournée "World War Tour 2010" qui se prépare...
Joakim Brodén : Oh nous avons hâte d'y être ! Nous adorons les tournées, nous essayons toujours d'avoir un maximum de dates, même si malheureusement dans certains pays nous n'allons pas jouer autant de fois que nous l'aimerions. Mais bon ça ne dépend pas de tout, c'est plus une décision de notre agence d'organisation de concerts... C'est un peu dommage, nous aimerions vraiment passer un peu partout plusieurs fois. Cependant, après une pause entre le 12 décembre où nous allons prendre quelques jours de repos chez nous et le début de l'année 2011, nous referons de nouvelles dates dès janvier dans le sud-ouest de l'Europe. Probablement donc en France, en Espagne, au Portugal et en Italie ! Après tout c'est le World War Tour, pas le Northern European War Tour (rires) ! Ensuite, si tout vas bien, nous irons certainement jouer sur le continent américain en février...
Ju de Melon : Est-ce qu'un jour selon toi Sabaton osera traiter d'autres thèmes non liés à la guerre ou au metal dans ses paroles ?
Joakim Brodén : Pour être honnête, la guerre c'est un peu devenu notre domaine, nous sommes très inspirés par ce thème. Il y a toujours beaucoup de choses à dire ! Mais tu sais, nous sommes tous âgés de moins de 30 ans dans le groupe, et j'ai du mal à imaginer que nous ne ferons que parler de guerres ou de batailles dans nos chansons tout au long de notre carrière... Alors même si la majorité, probablement 8 ou 9 albums sur 10, parlera encore de ce sujet, il n'est pas exclu qu'on change un peu notre fusil d'épaule sur un ou deux albums dans le futur.
Ju de Melon : Question plus personnelle à présent, comment as-tu eu envie et appris à chanter ? Et comment entretiens-tu ta voix si particulière ?
Joakim Brodén : En fait je suis devenu chanteur par accident (rires) ! Quand j'ai rejoint le groupe en 1999, il n'avait d'ailleurs pas encore pour nom Sabaton, j'ai été engagé simplement en tant que clavieriste. A l'époque il n'y avait que Rikard Sunden et Par Sundstrom, ils jouaient jusque là du death voire même black metal... Je leur ai joué quelques chansons et ils me demandaient si j'avais des mélodies en tête, ils voulaient que je les chante ! Au début je n'osais pas, je ne savais pas du tout chanter selon moi... Ils ont tout de même insisté et je l'ai fait, du coup ils m'ont dit "ok, tu es engagé, tu seras même notre chanteur le temps qu'on en trouve un !"... et le fait est que depuis 10 ans ils n'en ont jamais trouvé, donc je suis toujours là (rires) ! Depuis, je me suis fait à ce rôle et j'ai pris quelques cours pour la technique vocale et afin d'éviter de blesser ma voix en la poussant trop etc... Je ne pense pas que je sache vraiment chanter mais j'essaye d'y mettre tout mon coeur et de faire du mieux que je peux. Et depuis 2005 et l'arrivée de Daniel Mÿhr aux claviers, je ne fais plus que chanter... En tout cas on peut dire qu'ils sont un peu paresseux dans le groupe car ils ne cherchent même plus à trouver un chanteur (rires) !
Ju de Melon : Est-ce que cela te plairait un jour d'être l'un des chanteurs d'un grand projet metal un peu à la Avantasia ? As-tu des projets en vue allant dans ce sens ?
Joakim Brodén : Franchement j'adorerais, ce serait sympa, mais seulement si ça n'interfère pas avec l'actualité de Sabaton. Tu sais, je suis un grand fan d'Arjen Lucassen et de son projet Ayreon, c'est vraiment un compositeur et un producteur hors pair. L'an passé j'ai fait un show à Atlanta en hommage à Midnight, le chanteur de Crimson Glory, et c'était un moment unique car l'un de mes albums préférés a été réalisé par ce groupe : "Transcendence" ! J'ai été invité à chanter sur le morceau "Where Dragons Rule", c'était un instant superbe...
Ju de Melon : Dans une vieille interview, Par avait dit que tu travaillais sur une longue chanson de plus de 10mn que t'incorporerais un jour dans un album de Sabaton. As-tu gardé ce projet en tête ?
Joakim Brodén : En effet, c'est toujours plus ou moins d'actualité ! Tu sais, j'écris pas mal de musique dès que j'en ai le temps et j'ai plein de chansons en attente dont je ne sais trop quoi faire et qui sont encore à l'état de "projets" pour moi (rires) ! J'avais une chanson en tête que j'ai depuis un peu laissé de côté, car elle allait un peu dans tous les sens niveau style, entre Within Temptation et du thrash death... un peu trop fou donc, je verrai pour plus tard ! Sinon, il y a des idées pour des chansons épiques, mais on ne sait jamais quand ce sera le bon moment d'incorporer tel ou tel morceau dans un album de Sabaton. C'est assez variable, par exemple pour "The Art of War" certaines chansons sont nées en 2005, "Cliffs of Gallipoli" par exemple... Je peux donc commencer une chanson, la mettre de côté et la terminer 3 ans plus tard voire plus !
Ju de Melon : Qu'écoutes-tu comme musique en ce moment ? Beaucoup de vieux classiques ou quelques nouvelles sorties ?
Joakim Brodén : J'aime pas mal de vieux classiques, parmi mes préférés il y a donc cet album de Crimson Glory que j'ai mentionné plus tôt. Il y a aussi "Heaven and Hell" de Black Sabbath ou "Rising" de Rainbow... Récemment, j'ai beaucoup accroché sur l'album "Twilight of the Thunder God" des suédois d'Amon Amarth, pourtant je ne devrais pas aimer ce genre de musique (rires) ! Et récemment j'ai découvert ce groupe israélien avec Mats Levén au chant, Amaseffer... un album magnifique, vraiment ! Et Mats est vraiment un chanteur excellent, l'un de mes préférés...
Ju de Melon : Quel est ton point de vue sur le téléchargement illégal ? Sachant qu'il parait que votre nouvel album s'est retrouvé sur Internet il y a peu de temps...
Joakim Brodén : C'est un peu frustrant oui, c'est vrai. Cependant je ne pense pas que toutes les menaces d'amendes ou de procès envers ceux qui téléchargent illégalement soient une bonne chose... Ce n'est pas la meilleure façon d'arrêter ce phénomène ! Après tout c'est à nous de faire un excellent album afin que les gens se ruent dessus à sa sortie et l'achètent (rires) !
Ju de Melon : Question un peu marrante à présent, sur chaque nouvelle photo promo, ton tatouage s'étend de plus de plus... Jusqu'où ira-t-il ?
Joakim Brodén : (rires) Il n'est pas encore fini en tout cas ! C'est un bon ami à moi que je connais depuis 15-20 ans qui s'en occupe, il expérimente et je lui sers de modèle en quelque sorte. Il a commencé par le poignet droit... mais il va aller jusqu'à mon pied gauche ! Donc je suppose qu'il en a encore pour 3 ans de travail avant de le terminer (rires)...
Ju de Melon : Un dernier mot au fans français et aux auditeurs/lecteurs de La Grosse Radio Metal ?
Joakim Brodén : Mon français est vraiment mauvais mais je peux dire "merci beaucoup" ! Il est certains qu'en plus de Paris en octobre nous ferons d'autres dates en France début 2011, je l'espère vraiment en tout cas !
Ju de Melon : Merci à toi et ne sois pas trop anxieux pour le nouvel album, les premières réactions ont l'air plutôt bonnes !
Joakim Brodén : Merci mec, à bientôt !
Un très bon contact avec un Joakim très concentré mais détendu. Nul doute que "Coat of Arms" fera parler de lui, suivez d'ailleurs de près le blog de La Grosse Radio Metal car une chronique de ce nouvel album des heavy/power metalleux suédois de Sabaton s'en vient d'ici quelques jours...