Mikko Sirén, batteur du groupe Apocalyptica

Après avoir conversé avec Hansi Kürsch de Blind Guardian, suite du périple de ce jeudi 10 juin 2010 avec l'interview d'Apocalyptica quelques stations de métro plus loin. Ce n'est non pas un des trois violoncellistes du combo finlandais mais le batteur du groupe, le très convivial Mikko Sirén, qui nous a confié ses impressions et ses attentes concernant le 7ème album studio du groupe, "7th Symphony", dont la sortie est prévue au mois d'août.

Ju de Melon : Bonjour, j'espère que votre séjour à Paris se passe bien. L'album sort au mois d'août, comment vous sentez-vous dans l'attente de cette sortie ? Vous devez avoir hâte...

Mikko Sirén : Bonjour à toi, mon passage à Paris se passe très bien mais il est évident que j'aimerais avoir plus de temps pour visiter ! Là on est un peu coincés à l'hôtel pour la promo mais bon, c'est comme ça... J'adore les gens et l'atmosphère de cette ville, j'ai beaucoup aimé nos concerts ici avec une belle connection entre nous et les fans. Et avec ce nouvel album, j'espère qu'ils seront comblés et qu'ils attendront notre retour sur scène avec impatience ! Donc oui j'ai hâte pour eux avant tout, de leur faire découvrir ce nouvel opus notamment à la fin octobre où nous reviendront pour une super date au Zénith de Paris ! Et j'avoue que je vais un peu chier dans mon froc ce jour-là (rires), car c'est une grande salle et une grande opportunité pour nous...

Ju de Melon : Il est vrai que peu de groupes de metal ont la chance d'évoluer au Zénith de Paris...

Mikko Sirén : J'en ai parlé avec d'autres journalistes qui m'ont dit quels groupes ont déjà eu l'opportunité d'y jouer. Il y a eu notamment Airbourne, j'adore ce groupe et son énergie sur scène... un vrai show de rock ! Revenons-en sur ta question sur l'album... Oui, ça va être long d'attendre, mais bon au moins il est terminé et prêt ! Nous avons même pu tourner le clip du premier single ("End of Me" avec Gavin Rossdale) à Los Angeles, ça s'est très bien passé. Dans un mois on va à Mexico pour enregister deux autres vidéos pour les prochains singles, bref on n'arrête pas ! En tout cas le nouveau single est sorti il y a deux jours et les premières réactions sont bonnes donc ça me rassure déjà un peu. Les gens sont très excités dans l'attente de l'album et c'est toujours un peu effrayant pour nous, on n'a forcément pas envie de les décevoir ! Nous avons essayé de créer quelque chose de nouveau, sans trop nous répéter, et j'espère que les fans ne seront pas trop pris à contre-pied... Mais bon, nous avons essayé d'être courageux en quelque sorte et de ne pas nous reposer sur nos lauriers, de toute façon perso je préfère tenter de nouvelles choses que de jouer la sécurité et dans le groupe nous avons tous cette mentalité ! Je pense que nous avons là un album très intéressant en tout cas.

Mikko Sirén

Ju de Melon : Parlons justement de son nom, puisqu'il s'intitule finalement assez sobrement "7th Symphony". Pourquoi ce choix et y a t-il un certain hommage déguisé à l'album qui a fait votre gloire "Inquisition Symphony" ?

Mikko Sirén : Non pas d'hommage particulier, mais "7th" car il s'agit de notre 7ème album studio, tout simplement. Pour nous c'était important de marquer le coup sur cet opus, car nous avons été capables de présenter tous les styles d'Apocalyptica sur ce CD, que ce soit du thrash extrême aux musiques plus calmes voire "pop" ! Quand nous avons eu l'idée de cet album, nous voulions en faire quelque chose d'unique, un vrai CD diversifié, pas une sorte de "collection de chansons" dans un style linéaire. "7th Symphony" raconte presque une histoire, vous présente un voyage de piste en piste et vous transporte, le tout avec une certaine structure sypmphonique d'où son nom...

Ju de Melon : Un peu comme s'il était divisé en différents "mouvements"...

Mikko Sirén : Oui, complètement ! Si tu prends les instru telles que "Rage of Poseidon" et "At the Gates of Manala", tu ressens ce côté orchestral et symphonique. Nous avons voulu éviter d'avoir à nous restreinte, à nous retenir, sur certaines compositions... Bref nous nous sommes lâchés, aucune limite à ce que nous voulions créer, que ce soit chanson par chanson ou dans le cadre de l'album en lui-même. Nous voulions faire de la musique, tout simplement, et sans forcément nous prendre la tête sur la structure ou les mélodies... C'est avant tout l'émotion et le feeling qui doivent primer !

Ju de Melon : Un mot sur la pochette, un peu différente de d'habitude... qui en a eu l'idée ?

Mikko Sirén : Globalement, elle n'est pas forcément trop éloignée de la pochette de "Reflections" où on voit une femme de dos et le violoncelle dessiné sur son dos. Là, sur ce nouvel album, il est dessiné sur la robe d'une fille présentée de face. C'est un peu un parallèle facile j'avoue, une femme ayant un peu la même "forme" qu'un violoncelle si je peux m'exprimer ainsi (rires)... En fait, quand on y pense, c'est une idée que nous avons depuis longtemps en tête, et elle fait également suite à la cover de "Worlds Collide" où nous avons un crâne à la place... On peut aussi dire qu'elle a été inspirée par la vidéo que nous avons faite de la chanson "I Don't Care" sur le précédent album. La réalisatrice Lisa Mann a réussi à créer une ambiance très sombre et romantique sur ce clip, du coup nous avons voulu l'exploiter à fond sur ce nouvel album car c'est exactement que ce que représente notre musique au fond. Nous avons d'ailleurs réalisé le premier clip de "7th Symphony" avec la même personne, car elle sait parfaitement comment retranscrire notre côté cinématographique tout en le liant à notre musique. Le côté visuel est important pour Apocalyptica, et je pense que nous atteignons un summum ici donc j'en suis très heureux !

Apocalyptica 7th Symphony

Ju de Melon : Comme souvent avec Apocalyptica, vous avez invité des chanteurs pour interpréter quelques morceaux. Honneur aux dames, parlons tout d'abord de la dénommée Lacey. Nous ne la connaissons pas trop ici, peux-tu la présenter et dire comment vous l'avez choisie ?

Mikko Sirén : En fait il s'agit d'une chanteuse américaine du nom de Lacey Sturm, elle chante dans le groupe Flyleaf et ils sont pas mal connus là-bas. En fait nous sommes sur le même label, nous l'avons donc déjà rencontré il y a quelques années dans l'optique de faire quelque chose ensemble. Cette chanson était faite pour une voix féminine "forte", afin de garder un côté fragile à une composition tout de même assez intense. Nous l'avons choisie même si on sait qu'elle n'est que très peu connue ici en Europe, mais peu importe, sa voix est vraiment superbe ! Je sens que les gens l'apprécieront beaucoup...

Ju de Melon : Citons ensuite Gavin Rossdale (ex-Bush) et Brent Smith (Shinedown), deux grands noms du rock et hard rock. Comment êtes-vous entrés en contact avec eux ? Par hasard ?

Mikko Sirén : Tout n'est que hasard et coïncidence tu sais (rires) ! Les gars connaissaient Gavin depuis la fin des années 90 puisqu'ils avaient participé à un remix d'une chanson de Bush avec lui : "Letting the Cables Sleep". Les contacts étaient donc déjà noués, et ils sont restés proches... Quand "End of Me" était prêt, le nom de Gavin Rossdale est très vite venu, on lui a demandé et il a très vite accepté car il aime pas mal ce qu'on fait. Il a vraiment fait du bon travail sur ce titre ! En ce qui concerne Brent, nous avons pas mal tournés aux Etats-Unis et fait quelques festivals avec le groupe Shinedown... Je suis allé le voir après un concert pour le féliciter de sa presation, nous avons pas mal parlé, et lui aussi avait bien aimé notre prestation auparavant donc ça tombait très bien. Quand le titre "Not Strong Enough" a été finalisé, j'ai très vite su qu'il nous fallait Brent en tant que chanteur invité ! Et ça a été facile de travailler avec lui, quelqu'un de très humbre et disponible malgré son immense activité. C'est quelqu'un qui aime la musique, comme nous.

Ju de Melon : Qu'en est-il de Joe Duplantier (Gojira) qui apparait sur "Bring Them to Light" ? C'est la première fois que vous travaillez avec un chanteur français il me semble, ce qui nous rend un peu fier pour le coup...

Mikko Sirén : Pas la première fois en fait car nous avons déjà collaboré avec une chanteuse du nom de Emanuelle Monet (Manu, ex-Dolly) sur le titre "En vie" ! Mais le premier chanteur homme venu de France, en effet (rires) ! En ce qui concerne cette chanson avec Joe, elle était déjà prête depuis 2000 environ. Mais jusque là nous ne savions pas comment l'utiliser... A l'époque de "Worlds Collide", Eicca est venu ici en France pour la composer et retravailler avec Joe. Elle a pris une forme très "extrême" disons et nous n'étions pas encore prêt à l'utiliser. Cependant, pour ce nouveau CD, nous sentions qu'il était enfin temps de l'exploiter ! C'est vraiment un titre unique et exceptionnel, une collaboration parfaite en un sens, une connection qui va au-delà de tout car nul n'aurait pu imaginer un morceau qui sonnerait autant Gojira et Apocalyptica en même temps. Sa voix est absolument géniale, du thash mélancolique et romantique que ce "Bring Them to Light" !

Ju de Melon : C'est vraiment ma préférée de l'album en tout cas...

Apocalyptica

Eicca Toppinen (qui passait par là entre deux interviews) : Et tu n'es pas le premier à nous dire ça aujourd'hui, quel succès ce morceau ! (rires)

Mikko Sirén : Ouais, c'est sa préférée aussi t'en fais pas (rires) ! Pas pour Paavo Lötjönen par contre, lui qui préfére plus la musique douce et "végétarienne", c'est une tapette quand il s'y met (rires) ! Non mais sérieusement il va finir par l'adorer aussi, et il sait que c'est un morceau génial... (rires)

Ju de Melon : Terminons ce tour de table avec le batteur Dave Lombardo (Slayer)... Quel a été son rôle et son apport sur le titre "2010" ?

Mikko Sirén : Nous avons joué la batterie ensemble, un moment unique et génial pour moi. C'est quelqu'un de très drôle et de très amical, il joue avec son coeur et il adore défoncer sa batterie. Quelqu'un de positif avec qui il est génial de travailler. J'ai passé deux semaines à Pasadena pour enregistrer mes parties batteries et il est venu une après-midi... Nous n'avions pas de chanson prête à la base, nous nous sommes donc retrouvés tous les deux et en gros nous avons composés les bases ensemble tout en imaginant la structure. Ensuite, les vioncelles sont venus se rajouter avec une "deuxième phase" de composition, bref une façon assez orginale de travailler un titre ! Mais c'était quelque chose d'inoubliable, Dave est quelqu'un de très ouvert musicalement donc participer à un tel projet ne l'a pas dérangé. D'autant plus qu'il avait déjà rencontré le groupe en 1998 je crois.

Ju de Melon : Question difficile désormais... Quelle est ton instrumentale et ta chanson chantée préférée sur cet album et pour quelle raison ?

Mikko Sirén : Oh tu sais, je ne vais pas être original si je te dis que ça change selon les jours. En ce moment, pour l'instrumentale, je dirais plus... disons que... je les aime toutes, mais par exemple il y a une chanson qui est assez spéciale : "Beautiful", elle porte bien son titre. Elle a été composée par Perttu Kivilaakso à une époque où il avait vraiment du mal à être inspiré... Il s'est presque excusé en nous présentant ce titre comme "seul truc potable" qu'il avait pu faire en plusieurs jours, sauf que nous avons tous été bluffés à l'écoute et qu'elle s'avère en fait être splendide ! Elle nous a presque inspiré sur d'autres titres de l'album et a presque été le point de départ du processus de composition. En ce qui concerne la chanson chantée, celle avec Joe Duplantier évidemment ! Je me marre à chaque fois que je l'écoute tellement elle est énorme... J'aime beaucoup "Broken Pieces" aussi, une très belle chanson typée pop rock mais elle a quelque chose de très "enchanteur" !

Ju de Melon : J'ai toujours été étonné par votre capacité à sonner aussi metal en n'utilisant aucune guitare ou basse... Quel est votre "secret" pour faire sonner des vioncelles de manière aussi "heavy" voire "thrash" ? Tout est dans le jeu ou aussi dans le mixage ?

Mikko Sirén : C'est un peu une combinaison des deux en fait. Ca fait 15 ans que les gars sont ensemble et ils commencent à avoir l'habitude, ils ne cessent d'expérimenter de nouvelles techniques. Leur façon de jouer est différente d'un violoncelliste classique, ça c'est certain, ils n'utilisent pas les mêmes configurations sur leurs instruments et jouent forcément de façon plus agressive en pincant plus les cordes par exemple. Au niveau de l'enregistrement, on progresse sans cesse, sur ce nouvel album nous n'avons utilisé aucun plug in et juste des amplis de guitare pour renforcer le son "metal". Au niveau des distortions par exemple, où notre producteur Joe Barresi a fait un super boulot et beaucoup apporté au son de "7th Symphony". Et bien sûr nous comptons encore progresser dans le futur j'en suis persuadé ! J'adore le son des violoncelles sur cet opus, très heavy mais qui gardent toujours ce côté organique et classique, un parfait mix comme nous avons vraiment voulu le faire.

Ju de Melon : Cela fait plusieurs années que vous rencontrez un franc succès avec un style et une façon de jouer totalement unique. Comment expliquez-vous qu'aujourd'hui aucun autre groupe de votre genre ne se soit risqué à tenter de faire la même chose ?

Mikko Sirén : Il y a quelques groupes qui essayent un peu dans notre style, ou qui utilisent un violoncelliste dans leur lineup... Certains vieux groupes comme Electric Light Orchestra avaient ouvert cette voix par exemple. En tout cas je suis quelque part très fier de jouer dans un groupe assez unique je pense et qui n'utilise pas le trio guitare-basse-claviers comme beaucoup le font.

Mikko Sirén

Ju de Melon : Plus généralement, quel est ton regard sur la scène metal actuelle ? As-tu eu quelques coups de coeurs récents ?

Mikko Sirén : C'est difficile d'apporter un regard précis sur le metal en général, par exemple rien que dans notre pays il y a des tonnes de groupes un peu partout et dans tous les styles. Je pense que comme dans tous les types de musique il y a du bon... et du beaucoup moins bon ! Par exemple personnellement j'ai beaucoup aimé le dernier album de Gojira, leur meilleur pour moi jusqu'à présent. J'aime également beaucoup cette vague progressive qui vient se mêler à la musique metal, c'est quelque chose de très intéressant. Par exemple j'aime beaucoup Isis ou Coheed and Cambria, ces groupes n'hésitent pas à mélanger les genres. Globalement j'aime avant tout l'énergie dans le metal, je n'aime pas ces groupes qui ne prennent aucun risque et qui joue la sécurité. Il faut du danger dans la musique, un truc qui te donne ce sentiment étrange ne sachant pas ce qui va se passer... Des groupes comme Slayer et Slipknot font très bien tout ça. Surtout en live, toujours à la limite ! Bien entendu j'adore ces artistes qui osent des nouveautés, et il y pas mal de groupes comme ça aujourd'hui, Opeth par exemple que j'aime énormément.

Ju de Melon : En dehors d'Apocalyptica, as-tu d'autres projets en cours ou derrière la tête ?

Mikko Sirén : J'ai un autre groupe pour le moment en "pause", Megaphone... Sinon j'adore jouer et faire plein de choses mais je suis tellement occupé avec Apocalyptica que je ne peux pas me "disperser" dans d'autres projets. J'adorerais mais ce n'est pas à l'ordre du jour... Je sais qu'un jour je pourrai mais pour le moment je me donne à 100% pour le groupe.

Ju de Melon : Avez-vous déjà des idées sur à quoi ressemblera le futur du groupe après cet album ?

Mikko Sirén : Pour l'instant nous nous concentrons sur la musique qu'on vient d'enregistrer, sa promo avec la sortie de l'album mais aussi la mise en scène des prochains concerts de notre grande tournée, on prend pas mal de plaisir à penser tout ça d'ailleurs ! Mais depuis plusieurs années nous avons déjà des idées de projets ou de "concepts" pour certains albums encore à venir, mais après il faut du temps et rassembler ces idées du mieux qu'on peut. Tout n'est pas possible pour le moment, donc ça viendra dans le futur mais bon... Il faut garder en tête que nous sommes capables de faire pas mal de choses différentes dans plusieurs styles, ça laisse donc une belle perspective d'avenir pour le groupe, tu peux en être certain !

Ju de Melon : As-tu quelques derniers mots pour les fans français et les auditeurs de la radio, ou quelque chose que t'aimerais ajouter ?

Mikko Sirén : Désolé pour l'attente (rires), août c'est loin ! En tout cas je pense que les fans vont adorer l'album, nous en sommes très fiers et nous pouvons difficilement attendre de vous le jouer en live au Zénith de Paris. Les français nous aiment pas mal je crois, et de plus en plus d'après les affluences que nous avons eu ici au cours des années. Bref, j'ai très hâte de vous revoir tous !

Mikko & Ju

Ju de Melon : Nous aussi, en espérant que d'ici là tu pourras un peu visiter Paris avec tes camarades et voir Quasimodo se balader sur les toits (en référence au titre "On the Rooftop with Quasimodo" présent sur l'album) !

Mikko Sirén : Oui (rires), d'ailleurs sur l'édition spéciale nous aurons une chanson qui s'intitulera "Through Paris in a Sports Car"... bon ce n'est qu'une métaphore hein, on n'incite pas les gens à rouler vite dans Paris, il y en a déjà assez avec certains qui font un peu les fous en scooter etc ! (rires)

Ju de Melon : Merci beaucoup pour cette entrevue. Profite bien de la capitale française et à bientôt !

Mikko Sirén : Merci à toi et à très vite !



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