Suite à la sortie de leur précédent disque Delusion, le combo français Evolvent a bénéficié d'un certain engouement. Et face aux qualités présentées sur l'album en question, cette réaction semble légitime. Sauf qu'entre-temps, les choses ont évoluées pour la formation, qui se voit amputée de l'intégralité, ou presque, de son line-up. De l'essai cité ci-dessus, ne reste dans le navire que le claviériste Sébastien Latour. Pour le quintette, c'est donc le moment d'un véritable renouveau, tant au niveau du personnel que dans la musique pratiquée, qui n'est sensiblement plus la même que par le passé. Et c'est avec cet EP, Human Instinct, que la formation va devoir convaincre quant à ce virage complet.
En effet, les teintes doom / atmosphériques d'antan ont laissées place à une musique bien plus axée vers le metal mélodique / symphonique, créneau qui offre de belles potentialités. L'orientation vers un tel style accorde ainsi de nouvelles opportunités quant à une éventuelle reconnaissance, mais peut aussi tourner au piège. Il est conseillé de partir le mieux armé possible pour se lancer dans un genre souvent considéré surchargé face à la masse des formations officiant dans le milieu. Dans le cas qui nous intéresse, si la volonté d'évolution est louable de la part des cinq parisiens, il nous sera bien difficile de parler d'une quelconque originalité ou marque véritablement personnelle à l'écoute des quatre compositions. Résolument ancrées dans des chemins balisés, celles-ci sont exécutées correctement mais l'empreinte des grandes pointures reste toujours dans un coin de l'esprit, notamment via le clavier. A la décharge d'Evolvent, on ne peut que féliciter les musiciens de ne faire preuve d'aucune réelle faute de goût, et de ne jamais irriter l'oreille pour nous faire passer un moment désagréable à leur écoute. Seulement, aucun éclair de génie réel ne viendra non plus perturber l'auditeur.
Le hic, c'est que les pistes, sans être mauvaises, souffrent du défaut de ne jamais complètement emporter l'adhésion. Les bonnes idées sont là, mais payent l'absence d'un élément déclencheur qui permettrait aux morceaux de passer à la vitesse supérieure. L'exemple de « Barriers of Time » paraît judicieux. Tout est présent pour offrir une piste d'excellente qualité mais la sauce ne prend pas. Il manque une montée en puissance plus conséquente, afin de laisser cette pièce se terminer sur un moment fort. Dommage, car il ne fallait vraiment pas grand chose. Et concrètement, cette formule peut s'appliquer plus d'une fois au cours de l'EP. « Ten Years Too Late », de son côté, n'aurait qu'été gagnante avec un refrain plus marqué, plus énergique. Les touches de piano, discrètes mais appréciables, sont bien pensées mais restent trop peu exploitées, elles aussi. Constat plus que frustrant, car on ne peut s'empêcher de remarquer que le quintette possède les idées mais ces dernières ne sont jamais exploitées au maximum.
L'evolvution du line-up d'Evolvent
Reste un titre qui, lui, se démarque plus clairement des autres : « Insomnia », qui parvient enfin à instaurer une ambiance prenante. Ici, la recette fonctionne : chœurs en toile de fond lors du refrain, clavier indispensable, ainsi que la guitare du nouveau venu Clément Botz qui fait son travail avec application. Mention spéciale, par ailleurs, à ce break de très bonne facture. Qui plus est, Emma Elvaston, chanteuse du groupe, semble ici faire preuve d'une belle aisance et se révèle dans son meilleur jour, là où les autres titres peinaient à mettre en lumière ses capacités. Sa voix est agréable, dans des teintes plus lyriques que sa prédécesseur, mais encore trop linéaire sur la majorité des pistes, problème qui sera surtout mis sur le compte de lignes de chant pouvant se révéler trop plates pour emballer (« Ten Years Too Late » notamment). Ce qui est fort dommage car la jeune femme est sûrement très compétente, tant sa prestation sur « Insomnia » est réussie.
Human Instinct donne un avant goût assez mitigé du nouveau visage d'Evolvent. Indéniablement, le groupe ne souhaitait pas faire du sur-place et cette motivation est plus qu'appréciable, mais il est clair que le combo parisien a des cartes bien plus intéressantes à abattre. La créativité n'a pas été laissée de côté, le choix de la nouvelle chanteuse est loin d'être inopportun bien que des progrès restent à accomplir, des qualités qui ne demandent donc qu'à se mêler à une ambition plus importante et à une identité plus marquée. Une œuvre pleine de promesses, mais encore trop sage et rangée pour se démarquer.