Un nouvel album de Grave Digger, c’est comme se rendre à l’invitation annuelle au déjeuner de pépé/mémé. On sait que la recette ne variera pas, mais qu’on sera ravi de se régaler du plat préparé, en plus de passer un bon moment en se replongeant dans le bon vieux temps. Ici en l’occurrence, le heavy/power teuton, dont le groupe a été l’un des pionniers dans les années 80, au même titre que ses compatriotes d’Accept ou encore de Rage.
Après un album centré sur l’univers écossais (The Clans Will Rise Again en 2010) puis sur l’enfer version mythologie grecque (Clash Of The Gods en 2012) voilà les allemands de retour avec leur thématique classique de la faucheuse (qu’ils partagent désormais avec Children Of Bodom), pour un album lui aussi des plus classiques. Exit les instruments folks et atypiques : riffs de guitares accrocheurs, solides refrains et esprit guerrier sont les seuls ingrédients nécessaires pour un album du fossoyeur. Car c’est bien un retour à des chansons purement directes que Grave Digger nous propose là, ce qui ravira les metalleux old-school bien sûr, mais qui fera en revanche se détourner ceux à la recherche d’originalités comme on avait pu en trouver dans les albums précedents.
Mais dans une scène old-school allemande qui commence sérieusement à tourner en rond et à manquer d’idées, le risque de redondance est plus élevé que jamais. Et malheureusement cet album n’y échappe pas, malgré les hymnes qui s’y trouvent, on ne peut s’empêcher de penser que tout cela a déjà été fait avant, et que les idées commencent à se restreindre. Mais Grave Digger fait du Grave Digger et fort heureusement, il le fait bien. L’album en lui-même est donc très loin d’être mauvais avec des riffs et des refrains en chœurs fait pour rester immédiatement en tête (Allez donc essayer de vous déloger celui de « Death Smiles At All Of Us », l’une des franches réussites du brûlot). Le point positif par rapport à l’album précédent est la réduction du temps des chansons, qui les rend nettement plus intenses pour un rendu final qui excède à peine les 40 minutes.
Au niveau des compositions, le pilote automatique semble être enclenché, ce qui donne un résultat inégal, avec de bonnes chansons mais aussi certaines très dispensables. Du côté réussites, on peut citer « Road Rage Killer » et son accélération irrésistible, « Tattooed Rider » et « Season Of The Witch » qui donnent furieusement envie de headbanger à l’ancienne ou encore le single « Hell Funeral ». Tous ces titres collent parfaitement à la pochette de l’album où la faucheuse semble exhorter ses chevaux... « Faster ! Faster ! »
Au rang des déceptions, on retrouve « Grave Desecrator » titre à l’ambiance festive mais qui ne réussit jamais à décoller et qui apparaît au final sans queue ni tête, ou encore « Dia de los Muertos », mid-tempo poussif. La conclusion, « Nothing To Believe » s’essaye à la power-ballade, genre casse-gueule par excellence et qui rentre ici dans le cliché total de la ballade heavy metal. Pas vraiment une réussite au final même si on peut toujours lui accorder qu’elle est bien mieux placée en conclusion d’album qu’en plein milieu, où elle aurait vraiment fait tâche et qu’elle permet de conclure l’album en douceur et de façon atypique.
D’autre titres comme « Wargod » sont sauvés par leurs solos, qui sont une des satisfactions marquantes de l’album. Variés, bien sentis et exécutés comme il faut par Axel Ritt, qu’on sent parfaitement à l’aise sur ses parties, ils apportent indéniablement un plus. S’il y a bien une raison pour laquelle ce Return Of The Reaper mérite d’être écouté, c’est bien celle-là.
Derrière, tous les musiciens sont carrés, et le chanteur Chris Boltendahl continue de faire oublier son âge par sa voix puissante qui traverse tout l’album sans faiblir une seconde, même si il cède sa place au chœur sur pratiquement tous les refrains.
A l’image de son chanteur increvable, le fossoyeur a donc encore de belles années devant lui avant de devoir creuser sa propre tombe, et cet album le prouve car malgré ses défauts, il a le mérite d’être toujours agressif et sans concession. C’est la façon dont Grave Digger appréhende sa musique et continuera sûrement à le faire pendant encore quelques temps.