Après 3 ans d’absence, voilà enfin les suédois de Scar Symmetry de retour aux affaires, avec un projet ambitieux de trilogie conceptuelle.
Une aventure aussi belle qu’elle peut être casse-gueule, puisque malgré la transition plutôt réussie après le départ du chanteur Christian Älvestam, les albums récents ont eu du mal à convaincre un public nostalgique de Holographic Universe.
Nous nous voilà donc aujourd’hui en face du premier volet de cette trilogie, qui sert d’introduction au concept S-F fort intéressant imaginé par le batteur Henrik Ohlsson à propos de l’émergence des intelligences artificielles et leur impact sur la vie de tous les jours. Une thématique entre I, Robot et Clones qui sied parfaitement au style du groupe qui a réussi avec son death mélodique futuriste à devenir un des piliers de la scène suédoise en seulement 10 ans d’existence.
Que nous réserve donc cette présentation de ce qui, selon Per Nilsson est « le projet le plus ambitieux de la carrière de Scar Symmetry » ? Des surprises sur la forme déjà. 8 chansons, dont de très courtes et de très longues, voilà qui tranche radicalement avec l’uniformité presque ennuyeuse de Dark Matter Dimensions et The Unseen Empire. Le concept, minutieusement travaillé séduira certainement au-delà des amateurs de culture S-F, puisqu’il n’est pas impossible que la rivalité Homme/machine qu’il décrit arrive dans notre société assez vite. Côté musical, les duels entre les deux chanteurs font vivre la lutte : la voix chaude de Lars Palmqvist, très humaine, s’opposant à celle Robert Karlsson dont les interventions donnent vie aux machines dont il est question.
Après une courte introduction, le premier test arrive pour les suédois avec la chanson qu’on peut qualifier de pilier de l’album : « Neohuman ». Un titre de plus de 8 minutes qui pourtant se révèle étonnamment direct avec une voix claire omniprésente, un refrain imparable et des changements de tempos, pour ce qu’on peut qualifier de meilleure chanson du groupe depuis bien longtemps. La voix de Lars a progressé, et le potentiel qu’on pouvait entrapercevoir sur la superbe « Alpha and Omega » du dernier album est à présent pleinement exploité. A ses côtés, son compère s’en donne à cœur joie avec des growls toujours aussi puissants. La production, massive et qui n’oublie aucun instrument rappelle beaucoup celle de Dark Matter Dimensions, ce qui n’est pas forcément une mauvaise chose. Les rythmiques et les riffs sont puissants, efficaces et tabassent comme il faut, sans oublier les touches progs qui ont fait les grandes heures du combo.
Scar Symmetry semble avoir retenu la leçon des albums précédents et fait son possible pour varier au possible les chansons et les styles. Ainsi on trouve des sonorités pop assumées sur « Limits To Infinity », des gros côtés progs sur « Cryonic Harvest » et même une intro dancefloor sur la conclusion « Technocalyptic Cybergeddon ». Le tout toujours relié par le seul concept, ce qu’on pourrait presque considérer comme maladroit. Mais non, l’album comporte suffisamment de bonnes compos, soignées, pour que cela n’affecte pas l’écoute.
L’écoute de l’album, justement, passe très vite puisqu’en à peine une demi-heure, nous voilà déjà arrivés aux deux dernières chansons. On ne s’ennuie donc pas à l’écoute de ce premier volet de The Singularity, malheureusement on constate vite que certaines chansons ont une durée de vie assez limitée et peuvent lasser au bout de la 3ème ou 4ème écoute, un petit défaut que Scar Symmetry n’a pas réussi à corriger. L’exemple parfait est « Neuromancers », une chanson d’excellente facture mais qui sans qu’on sache vraiment pourquoi ne produit plus le même sentiment une fois la découverte passée.
Autre défaut plus gênant, la place prise par Per Nilsson sur le plan des solos. Personne n’ira remettre en cause le grand talent du bonhomme à la guitare, mais l’omniprésence de ses solos se ressent, à la longue. S’ils sont toujours bien exécutés, la plupart sonnent comme du déjà entendu, et rare sont ceux vraiment transcendants comme dans le final de « Neohuman ». Les autres prennent de la place, à l'image de l’interlude « Children Of The Integrated Circuit » qui lui est carrément dédié. L’autre gros problème de Scar Symmetry sur les albums précédents était d’avoir à la fois d’excellentes chansons, mais aussi d’autres beaucoup plus faibles, qui sentaient le remplissage à plein nez. Ici point de cela, puisque certaines comme « Cryonic Harvest » sont légèrement en dessous, mais rien de rédhibitoire. Il reste à espérer qu’ils garderont cette constance sur les autres volets de la trilogie.
Avec cet album, le contrat est rempli pour Scar Symmetry qui présente son nouvel univers sans nous ennuyer. Reste à voir s’ils confirmeront leurs envies de diversité avec les albums suivants, qui seront encore bien plus attendus au tournant. La valeur globale de cette trilogie se jugera avec eux.
Note : 7.5/10