Quand le mars fond au soleil
En ce début d’automne gris et morne, rien de tel qu’un bon concert de stoner pour prendre sa dose de distorsion survitaminée et de soleil. Et ce soir, on allait prendre la température de la scène française, puisque trois groupes de l’hexagone étaient à l’affiche. En haut : Mars Red Sky qui devait confirmer le succès de son dernier album Stranded in Arcadia, couronné notamment par un passage au Hellfest 2014. Les bordelais étaient accompagnés de Glowsun et Dätcha Mandala, chaque formation ayant un style bien particulier et différents des deux autres, garantissant une soirée variée et prometteuse. Faisons le bilan.
Dätcha Mandala
Avant leur arrivée sur scène, les Dätcha Mandala ont l’excellente idée de faire brûler de l’encens sur scène. Voilà qui est idéal se mettre dans l’ambiance pour ce type de musique, d’autant plus que le parfum délicat dissimule les odeurs d’aisselles des spectateurs qui commencent déjà à avoir bien chaud ! Bien vite, nos oreilles sont attirées par le chanteur/bassiste, qui a un timbre de voix bien haut perché rappelant à la fois Robert Plant et Andrew Stockdale (Wolfmother). Nicolas Sauvey arrive à toucher les notes bien hautes sans avoir l’air en difficulté, tout en nous servant des lignes de basses accrocheuses. Chance, le son est vraiment très bon pour un groupe d’ouverture, on peut donc apprécier le set des Mandala à sa juste valeur.
Force est de constater que le trio est très bien mis en place. Son heavy rock teinté de blues et de sons à la Hendrix, bien que pas complètement original, fonctionne très bien sur scène. Le set prend un tournant vraiment sympa lorsque le chanteur empoigne un harmonica, pour un résultat bluesy à souhait, en plus de nous rappeler une fois de plus Led Zeppelin. On note également quelques passages à trois voix, qui sont vraiment bien réussis, lorsque les trois vocalistes sont audibles.
Derrière le groupe, un écran projette de belles images animées qui ajoutent un plus visuel non négligeable, d’autant plus que ce genre de moyens est rarement vu pour des groupes de première partie. Si Dätcha Mandala arrive à convaincre sans peine avec ses morceaux énervés, le groupe a plus de mal à retenir l’attention sur ses chansons plus planantes, d’autant plus que la voix de Nicolas est parfois un peu criarde. Mais lorsque ça repart en rock, on est à nouveau porté par leur musique pêchue, avec le jeu très énergique du batteur et les riffs bien sales du guitariste. Avec surprise, au moment de la dernière chanson du set, on entend avec surprise le riff de « War Pigs », et force est de constater que les Dätcha l’interprètent très bien, à défaut de faire une cover originale. Mais comment leur en vouloir de ne pas toucher à une institution du rock n’ roll ? Une bonne surprise !
Glowsun
C’est maintenant au tour des lillois de fouler la scène de la Maroquinerie. D’emblée, avant d’être accroché par leur musique planante, les yeux des spectateurs sont comme hypnotisés par les magnifiques visuels animés projetés sur l’écran derrière le groupe. Si on peut regretter que certaines formations négligent de renforcer l’aspect visuel de leurs concerts, ce n’est clairement pas le cas de Glowsun. En fixant l’écran, on se croirait parti en plein trip LSD, avec une bande-son qui n’aurait pu être mieux pensée à cet effet.
Leur son est tout aussi travaillé, avec notamment le guitariste Johan Jaccob qui déploie un panel impressionnant d’effets à la six cordes, forgeant ainsi une personnalité à la fois riche et lourde à son groupe. Musicalement, les compositions variées, denses et pleines de dynamique, et évoquent à la fois des groupes comme Isis ou Neurosis. Glowsun se concentre clairement ses ambiances instrumentales, même si on entend parfois Johan chanter, avec une voix elle-aussi bourrée d’effets, ce qui est, certes, courant dans ce genre de groupe.
Tantôt lourde et puissante, tantôt douce et hallucinogène, la musique de Glowsun a su pleinement convaincre en concert, et confirmer le potentiel exprimé en album. On espère justement les voir revenir avec une nouvelle offrande aussi tôt que possible, puisque le petit dernier date déjà de 2012. Un groupe qui mériterait pleinement un créneau de choix sous la Valley au Hellfest.
Mars Red Sky
Les bordelais arrivent sur scène avec un très gros son, faisant parler la poudre d’entrée de jeu. Dans ce trio, la basse joue le même rôle habituellement réservé par la guitare, et se taille ainsi une place de choix à la fois dans le mix comme dans les parties de basse elles-mêmes, qui complètent bien la guitare. Soyons clairs, le stoner planant de Mars Red Sky est exécuté avec maestria, il n’y a aucun reproche à faire là-dessus.
Au rang des qualités, on peut aussi compter la voix du guitariste/chanteur Julien Pras, qui évoque celle de Thom Yorke, mais chantée avec plus d’énergie que l’anglais. Lorsque le bassiste Benoit Busser prend le micro, Mars Red Sky se fait plus bluesy et posé. Encore une fois, le groupe est servi par de beaux visuels projetés sur écran, mais ils font nettement moins originaux que ceux de Glowsun. Côté publique, la majeure partie paraît complètement absorbée par la performance de Mars Red Sky, et le manifeste dans une ambiance chaleureuse, alors que le reste de l’audience paraît quelque peu perdu… Ou s’ennuyer ferme.
De fait, après cinq ou six morceaux, malgré le son musclé et une interprétation soignée, le concert va vite entrer dans une espèce de pilotage automatique, et tourner en rond. Les compositions sont bien ficelées, les musiciens bien en place, mais la mayonnaise ne prend pas. Il manque ce soir le petit grain de folie, le lâcher-prise rock n’ roll qui permet d’apprécier pleinement un concert. On verra d’ailleurs quelques découragés quitter la salle avant la fin de la performance.
Le bilan est donc mitigé pour Mars Red Sky, qui arrive à convaincre sur album, mais n’aura pas réussi à s’imposer ce soir dans la capitale, laissant Glowsun raffler les lauriers du groupe de la soirée. Dommage !
Reportage par Tfaaon
Photos : Arnaud Dionisio / © 2014 Deviantart
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