SideQuest – Myths and Constellations

Est-il encore possible de faire preuve d'originalité en officiant dans le metal? Cette notion est-elle dépassée, ou est-on  légitimement en droit d'en attendre à la sortie d'un disque? Vastes questions. Pour autant, certaines sorties se démarquent par d'autres moyens, et utiliser un concept peut être un moyen de se démarquer. Dans le cas qui nous intéresse, SideQuest est une formation espagnole fondée par le guitariste et compositeur Guillermo Riesgo, dont le premier disque porte autour du célèbre manga japonais Saint Seiya. Une façon de rendre hommage en musique à l’œuvre de Masami Kurumada, au travers de Myths and Constellations. Les présentations étant faites, il est temps de s'intéresser au contenu musical proposé par le trio.

Si l'identité du combo est en grande partie fondée sur la thématique peu commune de l'album, le propos musical, quant à lui, est un peu plus convenu et ne frappera pas par sa grande originalité. En effet, la formation officie dans un croisement de metal symphonique et de power, qui n'est pas sans évoquer à de nombreux moments les ténors du genre, sans pour autant verser dans la copie conforme. Bien qu'il soit difficile de parler d'une identité marquée, la musique des espagnols trace sa route au travers de treize morceaux diversifiés, qui ne vont pas chercher hors des carcans du style, mais parviennent néanmoins à s'imposer grâce aux divers recours utilisés par les musiciens pour donner du corps au tout. Que ce soit par l'usage de chœurs (« Wings of Hope », « Death Comes »), d'ambiances plus sombres grâce au chant extrême (« Hate Everyone », « Twin Soul »), ou par un tempo plus calme (« Ä€laya-VijñÄna », « This Cloth »), la recherche d'une cohérence au sein de l'opus, tout en évitant le piège de la linéarité est palpable. Le trio propose ainsi une véritable ligne directrice, et dispose d'une qualité d'écriture non-négligeable. Guillermo est un compositeur de talent, et pourtant, Myths and Constellations n'est pas exempt de défauts notables.

En premier lieu, le son dont dispose l'opus trahit cruellement les faibles moyens à la disposition de SideQuest. Les espagnols sont ambitieux, mènent leur musique tambours battants mais le manque d'ampleur de la production étouffe une part de l'énergie déployée par le trio. D'autant plus que sur un plan purement technique, le disque n'est pas entièrement satisfaisant et les chants ne sont pas étrangers à cela. Si Grace Taylor maîtrise sa voix, celle-ci exaspère sur le long terme. La jeune chanteuse connaît son organe, évoluant avec savoir-faire dans un registre lyrique, mais ne peut s'empêcher  d'en faire trop. Pourtant, la jeune femme fait preuve de polyvalence, capabler de monter haut dans les aigus en forçant le respect, puis de passer à une douceur touchante sur la ballade « This Cloth ». Seulement, le manque de sobriété dans l'interprétation pénalise la prestation générale. Quant au chant masculin, tenu par Guillermo, celui-ci n'épargne pas l'auditeur de fausseté en dépit d'un timbre agréable, dont le potentiel ne demande qu'à être exploité. Ces points faibles viennent ternir le tableau, et en dépit de belles promesses, on ne peut s'empêcher de garder en bouche un goût amer.

Cette mauvaise surprise est contrebalancée par l'écoute de pièces aux refrains entêtants, où la dimension épique voulue par le genre pratiqué est respectée à la lettre. Les ardeurs sont tempérées de temps à autres, notamment par un « This Cloth » où Grace dévoile ses charmes, berçant sans ennuyer, ni faire tomber dans les bras de Morphée. Le combo propose également des morceaux atteignant plus de six minutes, qui pourraient presque être de franches réussites si les lignes de chant de « The Zodiac War (Part. I) » ne souffraient pas d'un cruel manque de relief. Cette piste, en revanche, gagne des points sur le plan instrumental grâce à un souffle d'énergie bienvenu, où des influences extrêmes se font ressentir au milieu d'une composition d'obédience power metal très bien exécutée. Si la seconde partie est de facture plus classique, elle n'en reste pas moins intéressante, proposant des lignes de chant plus inspirées. Les titres appréciables sont nombreux : premièrement, « Wings of Hope » taillé en tant qu'opener de choix, donne le ton et permet de se faire une très bonne idée quant à la suite des événements. « Dragons Die Killing » ne manque pas d'efficacité, notamment via un solo impeccable et un refrain habile. Les temps morts et autres épuisements sont peu nombreux et chaque morceau trouve sa place, ce qui, pour un premier album, témoigne déjà d'une belle maturité. Il n'y a ainsi aucune piste réellement faible et, sur ce plan, la livraison se laisse écouter du début à la fin sans froncement de sourcil.

SideQuest

Et tentez de faire plus original que ça en photo promo.

Dommage, donc, que l'ensemble peine tout de même à séduire davantage. Myths and Constellations recèle d'éléments qui permettraient à SideQuest de passer à la vitesse supérieure et d'accéder à la cour des grands et si Guillermo Riesgo prouve qu'en plus de disposer d'un concept exploitable, il est également un compositeur habile, il y a encore un réel travail à accomplir avant de pouvoir combler pleinement les amateurs du genre. Les espagnols sont talentueux, ont une direction musicale claire, livrent une marchandise où les pièces proposées restent bien au-dessus du niveau général dans le metal symphonique, mais payent cash une production décevante et des voix trop limitées. Le chemin est encore long, le parcours sûrement difficile mais tout laisse à croire que le trio est à suivre avec beaucoup d'attention. Un essai encourageant, bien qu'encore imparfait.

NOTE DE L'AUTEUR : 6 / 10



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