Actifs depuis 2005, les Finlandais de Ghost Brigade se sont déjà taillés une petite réputation dans le milieu du doom/ dark atmosphérique avec trois albums dont un dernier en date qui n’est vraiment pas passé inaperçu. Pour son retour avec IV – One With The Storm, le groupe évolue en passant à la vitesse supérieure et aborde un registre plus axé death mélodique et, par conséquent, plus efficace. Mais s’il n’y avait que ça à remarquer… Car c’est bien ce qu’est le quatrième disque de Ghost Brigade : un album remarquable.
Plutôt productif pour un groupe du genre, et à bientôt dix ans, Ghost Brigade fait partie de ces formations dotées d’intelligence. Cette intelligence qui pousse un artiste à se remettre en question à chaque album qu’il compose, à prendre des risques en se lançant sur des chemins quelque peu inconnus et pourtant en corrélation avec celui sur lequel il marche déjà.
Pour mieux comprendre cette idée, il est bon de remonter à 2011 lorsque Ghost Brigade sortait son troisième album, Until Fear No Longer Defines Us. Une petite perle doom, mélodique et mélancolique parfaitement produite, qui avait surtout offert aux Finlandais une véritable personnalité. Commençant à se tailler un petite place aux côtés de quelques références du genre « goth » telles que Paradise Lost ou Insomnium dans un registre plus atmosphérique, cet album n’avait, peut-être, comme petit défaut de vraiment trop appuyer ce côté très atmosphérique au détriment d’une rage, certes palpable, mais un poil trop timide.
Ghost Brigade aurait largement pu s’en tenir à ça, mais non. Il fallait que ça explose. Résultat des courses ? IV – One With The Storm, ou l’album de la maturité dans toute sa splendeur. Dès l’écoute de "Wretched Blues", tout paraît plus maitrisé, plus logique, plus enragé. Des claviers envoûtants, un riff lourd, une rythmique limpide et surtout un chant growl qui prend aux tripes, un solo de presque une minute appuyé par une rythmique réellement entrainante et des breaks franchement impressionnants. Un morceau atmosphérique, death mélodique efficace et ultra catchy.
Catchy et accrocheur sont les meilleurs qualificatifs pour résumer ce IV – One With The Storm. La troisième piste, "Aurora" en est probablement le meilleur exemple. Une mélodie qui attire l’attention dès ses premières notes, un synthé plongeant l’auditeur dans une atmosphère un brin mystique, onirique et presque reposante. Majoritairement clair, le chant n’est pas en reste. Mélancolique, touchante et posée, la voix de Manne Ikonen transcende et peut d’ailleurs rappeler aux amateurs de grunge celle si particulière d’Eddie Vedder de Pearl Jam. N’importe quel amateur de metal est mis au défi d’écouter cette piste et d’en sortir de marbre. Bonne chance.
L’album s’écoule et au fur et à mesure que les pistes s’enchainent, à la fin de chacune, la même envie revient: recommencer le morceau. Retourner dans ce voyage de dix minutes qu’est "Electra Complex", s’imaginer encore traverser des plaines enneigées sur "Departures", secouer la tête et taper frénétiquement du pied sur le refrain d’ "Anchored" et se reprendre la même claque dans la tronche avec le très massif "The Knife".
La galette s’achève en beauté avec "Elämä on tulta", morceau très linéaire, après son introduction de près d’une minute trente, à la mélodie qui ne varie pratiquement pas jusqu’à la dernière note, mais qui, encore une fois, réussit à captiver.
A l’arrivée on en vient à se demander si IV – One With The Storm est parfait. Bien sûr on pourrait reprocher au groupe de ne pas produire quelque chose de réellement original, de proposer une œuvre trop longue (1h06 et 10 min pour le morceau le plus long) ou encore une certaine « redondance » dans certains morceaux, mais honnêtement on s’en fout. Et c’est ça le très grand tour de force réalisé par Ghost Brigade : tout miser sur la forme au détriment du fond pour qu’au final les défauts soient balayés et oubliés. Tout cela grâce à une prod exceptionnelle et des musiciens qui font ce qu'il faut pour que l’ensemble soit terriblement accrocheur et addictif.
Alors par déduction, non, IV – One With The Storm n’est pas parfait. Mais il remplit parfaitement son rôle, à savoir celui d’offrir un maximum de plaisir à celui qui l’écoute et enfermer ce dernier dans une atmosphère unique où il se sent tout simplement bien. Et en 2014, on en était presque à se demander si cela était encore possible.