"Nous faisons ce que nous savons faire"
Membre fondateur et un des compositeurs principaux d'Obituary, Donald Tardy fait partie des pionniers de la scène death metal. Avant le concert du groupe à Paris, en pleine tournée pour promouvoir Inked in Blood, son dernier album en date, le batteur a accordé quelques minutes à La Grosse Radio pour parler du processus de création de l'album, des à-côtés et de sa perception de la scène aujourd'hui.
Bonsoir Donald et merci de nous accorder cette interview. Tout d'abord, comment se passe la tournée ?
Cela fait 11 concerts qu'elle a commencé, donc nous sommes en plein dedans. Les concerts amènent plein de monde, on a fait plusieurs dates sold out et le public répond de manière très satisfaisante aux nouvelles chansons issues d'Inked in Blood. On les mèle aux anciens classiques, on essaie de faire en sorte que chaque album soit représenté, mais on joue autant de nouvelles chansons que possible.
Cet album arrive 5 ans après le précédent, étais-tu anxieux concernant la réaction des fans ?
Oui, j'étais à la fois anxieux et motivé de jouer ces nouvelles chansons au public. On avait déjà commencé à en jouer quelques-unes depuis plus de six mois maintenant, notamment lors de la tournée des festivals l'été dernier, donc les fans avaient une idée de ce que cela donnerait. Mais maintenant que l'album est sorti, on peut en jouer plus et la réaction est on ne peut plus positive, ce qui nous motive pour continuer sur notre lancée. Peut-être que c'est dû au fait qu'elles soient catchy, en tout cas, les fans ont l'air de les connaître, le fait qu'ils aient acheté l'album en masse doit compter.
Les fans n'étaient d'ailleurs pas habitués à attendre un album si longtemps, surtout depuis votre reformation, comment cela se fait-il ?
Il n'y a pas de réelle raison derrière cela. Nous sommes restés actifs en tant que groupe, nous avons surtout pris notre temps pour écrire les chansons et ne nous sommes jamais inquiétés sur des questions de planning et ne nous sommes pas fixés de deadlines. Nous avons laissé le temps à la musique de nous trouver, puis nous nous sommes donné le temps d'écrire les bonnes chansons et prendre du plaisir à les écrire. Ensuite, une fois que nous sommes entrés en studio, tout roulait à merveille.
Vous avez d'ailleurs eu recours à une campagne de crowd-funding pour Inked in Blood, et ce pour la première fois. Peux-tu nous parler de cette expérience ?
Nous ne connaissions rien à ce principe, du coup nous avons fait quelques recherches dessus et nous savions que les fans nous soutiendraient dans cette démarche. La campagne a eu beaucoup de succès et, dans le même temps, nous a donné quelques défis à relever, assez inhabituels pour le groupe. On a dû s'occuper de plus de 900 commandes tout en finissant l'album et en préparant la tournée, tout ça en même temps ! Par exemple, pour François, en France, a commandé un t-shirt taille M, une casquette et un ouvre-bouteille, nous avons dû gérer la commande, l'emballer, l'envoyer et remplir tous les formulaires administratifs. Maintenant, il faut multiplier ça par 900 et laisser les membres du groupe s'en occuper. C'était motivant, mais ça représentait une masse de travail énorme pour le groupe, nous sommes contents que cela soit derrière nous. Nous sommes quand même fiers d'avoir pu remplir tous nos engagements et que tous les fans aient été satisfaits. Si jamais l'occasion se représente, nous y réfléchirons longtemps avant de nous lancer dedans.
Cet album est le premier a avoir été enregistré avec Ken Andrews en soliste et Terry Butler en bassiste, parle-nous de leur apport.
Ken et Terry ont tous les deux pris part au processus d'écriture, ce qui a renforcé nos relations entre nous tous. L'ambiance est très saine dans le groupe, nous sommes plus soudés que jamais, nous nous entendons à merveille et c'était cool d'avoir tout le groupe qui participe à l'ensemble du processsus. Comme on dit chez nous, il faut retirer le gras des chansons, perfectionner telle ou telle rythmique, enlever le superflu ou rajouter des éléments selon les besoins de la chanson et c'était super pour l'ensemble des membres de s'impliquer dedans. Concernant l'enregistrement en lui-même, ça peut être très mauvais pour les nerfs, mais le fait d'avoir notre propre studio pour le faire a rendu le tout bien plus confortable.
On remarque que cet album ne s'inscrit pas tant que ça dans l'ère du temps et garde ce grain propre à Obituary, peux-tu nous en parler ?
Ce qui est bien avec Obituary, c'est qu'on ne s'occupe pas de ce que font les autres groupes, ni de ce qu'on a fait par le passé, ni même de ce que les fans pourraient attendre de nous. Nous écrivons simplement des chansons qu'on aime. Du coup, si nous les aimons, il y a des chances pour que ce soit le cas des fans. C'est notre état d'esprit. Nous faisons ce que nous savons faire, à notre sauce et nous ne réfléchissons pas trop à tout ce qu'il y a autour.
D'ailleurs, avant la sortie de cet album, vous avez fait une tournée au cours de laquelle vous ne jouiez que des chansons de vos trois premiers albums [Slowly we Rot, Cause of Death et The End Complete]. Peux-tu nous parler de cette expérience ?
C'était enrichissant. Si ça peut paraître fun vu comme ça, nous avons quand même dû nous replonger dans ces albums et réapprendre des chansons que nous n'avions pas jouées depuis 15 ans, voire plus. Mais se remettre dans le bain te permet de mieux comprendre pourquoi les fans adorent ces albums. On en joue pas mal lors de cette tournée, mais on joue aussi des morceaux de The World Demise, par exemple. On essaie de représenter le plus d'albums possible pour accompagner les nouvelles chansons, tant qu'on peut en caser assez en 1h30. [rires] Il y a trop de chansons à choisir maintenant !
Le fait de réapprendre des chansons vous a-t-il donné des idées pour les réarranger sur scène ?
Non, cela ne nous a pas donné d'idées dans ce sens, mais, de ce que j'entends maintenant, ça a influencé mon jeu sur Inked in Blood ! J'ai déterré quelques plans de batterie de cette époque pour les mettre dans le nouvel album. Je ne l'ai pas fait exprès, mais c'est en réécoutant que je me suis rendu compte que j'avais transposé mes idées pour en faire quelque chose de moderne et old school à la fois.
Comment perçois-tu la scène death metal après avoir passé plus de 30 ans dedans ?
Je pense qu'elle reste la même. Les fans de metal sont toujours passionnés. La musique a peut-être moins d'importance qu'avant ces temps-ci, en tout cas les albums se vendent moins à cause d'internet, mais je vois toujours des fans de death metal à travers le monde. Quand nous voyons ça, nous sommes très fiers d'avoir été là depuis le début et d'avoir participé à la création de ce mouvement.
Ce statut est reconnu, vous allez assurer la tête d'affiche au Hellfest sur la scène death metal le samedi, qu'en penses-tu ?
Oui, j'avais vu ça. Je pense que c'est un honneur de voir qu'après toutes ces années, les fans soient toujours autant derrière nous, c'est excellent pour nous de pouvoir jouer en tête d'affiche de cette scène au Hellfest.
Du coup, à ce niveau, avez-vous toujours des objectifs à accomplir ?
Je ne sais pas si on peut vraiment appeler ça des objectifs, mais nous avons surtout envie de rester pertinents en tant que groupe, toujours assurer sur scène et, surtout, profiter de la vie et de jouer ensemble. Si cela ne nous plaisait pas, nous arrêterions. Mais on s'éclate, du coup, l'objectif le plus sain à avoir est de continuer comme ça. Et on y travaille plutôt bien ! [rires]
Un dernier mot pour les fans ?
Ce sont les fans qui nous motivent. Sans eux, un groupe n'est que quelques mecs dans une salle de répétition qui ne font rien. Nous adorons nos fans français qui sont toujours aussi passionnés et nous les en remercions.