C'est drôle, tout d'un coup j'ai une bonne grosse envie de pancakes au sirop d'érable, bien tranquillement au coin du feu avec une tasse de thé ou une bière, ça réchauffe. Le vent est fort, froid en cette période hivernale, mais cependant pas autant que chez nos amis canadiens … En parlant de Canada, vous connaissez tous The Birthday Massacre, n'est-ce pas ? Mais si, ce combo de synth-rock, lorgnant sur le metal, au succès florissant depuis quelques années après avoir fait les premières parties de groupes plutôt connus, ou même des apparitions dans des gros festivals, en Europe ou ailleurs. Là, ça vous reviens ? Tant mieux, continuons ! La notoriété du sextette de l'Ontario naquit directement après Violet, première petite bombe sortie en 2004 et non dénuée d'intérêt, loin de là ! Puis ensuite, vient le tour de Walking With Strangers en 2007 qui provoque cette fois-ci la division : brillant pour les uns, déception pour les autres. Il est donc tout naturel que la fonction du troisième opus paru en Septembre 2010 sur Metropolis Records, répondant au nom de Pins and Needles, est de convaincre un auditoire devenu soit admirateur, soit sceptique. Verdict ?
Mitigé. Par rapport à l'interrogation posée ci-dessus, notre combo canadien confortera les uns comme les autres, en proposant un album dans la continuité du précédent, aux mélodies efficaces, parfois plus metal qu'à l'habitude. Du catchy, des refrains entêtants et simples, la voix toujours plus douce et mélodieuse de Chibi, pourquoi changer une recette qui peut se réutiliser en continuant dans la qualité ?
« In the Dark », le morceau qui ouvre le bal des réjouissances, évoquera sans aucune difficulté la désormais culte pour les fans « Kill the Lights », annonçant ce que sera la suite : simple mais efficace, avec des ingrédients de premier choix. Catchy, le refrain l'est certainement et on pourra en dresser une comparaison avec un « Year of the Rat » de Tristania par exemple, en moins metal, certes, mais le parallèle d'appâter avec la fraicheur et l'enthousiasme peut aisément être fait. Le morceau est bon, c'est certain. Pop dans le sens d'accrocheur et frais, il ne vous quittera pas avant d'avoir bien consumé chaque parcelle de plaisir encore présente dans votre esprit. Et ces lignes de chant qui s'incrustent en vous, que vous fredonnerez sans vous en rendre compte, vous y succomberez, une réussite encore de la formation de Toronto. L'ambiance est sombre pour ne pas changer, mais c'est si bien exploité que l'on pardonnera bien vite cette manque de prise de risque flagrante.
Dans la redite, nous retrouvons « Always » et son air de « j'ai déjà entendu ça quelque part ». Mais un titre de cette qualité ne laisse que de bonnes traces, tant il est jouissif. Rien que le refrain ne laisse pas de marbre, et sur ce fond assez metal tout compte fait, le tournant metal légèrement indus semblant déjà assez amorcé, il est possible d'arracher un sourire, un hochement de tête jusqu'à l'headbang. Rien n'est laissé au hasard et le clavier ne sonne pas kitsch cette fois-ci, s'incluant parfaitement aux ambiances. Le plaisir s'occupe du reste, transformant une piste qui aurait pu être banale en réussite.
Seulement, et à la joie de l'auditeur, il existe de l'expérimentation, des morceaux qui changent de ce que The Birthday Massacre sert en général, proposant ainsi de nouveaux mets sur sa carte, qui varient un peu la mixture. On remarquera « Pale » dans ce registre, pour sa forte capacité à innover de ce qui a été proposé sur les deux derniers brûlots et faisant un léger renvoi à ce que certains appelleraient sûrement l'âge d'or musical des canadiens. Le son du synthé est bien différent, la basse et la batterie moins présente que sur les deux morceau qui précèdent, le refrain beaucoup plus démarqué, tout en douceur et en finesse, avec une Chibi plus cristalline et avouons-le, meilleure. Et avec audace, nous pouvons avouer sans l'ombre d'un doute qu'il s'agit de la piste la plus réussie de l'opus, car sans être totalement catchy, pop-metal et directe, tout se fait là dans la subtilité, l'émotion et l'osmose voix/instrument.
Même constat avec « Shallow Grave », dévoilant un versant beaucoup plus electro et mettant le clavier et les sonorités industrielles et modernes bien plus à contribution pour créer une atmosphère presque dansante et tubesque, mais qui marche, ça ne fait aucun doute ! Refrain intéressant, où la chanteuse semble inspirée, suivant la mélodie comme il se doit, montrant une fois de plus la capacité de la formation à savoir créer du savoureux. De plus, se démarquant par son côté unique, la piste fait mouche du premier coup.
« Midnight » se relève différente elle aussi, mais rate le coche. Il manque quelque chose qui peut faire la différence. Du mordant, sans doute, malgré des instruments pourtant bien placés, se partageant avec envie la part du lion, mais rien n'y fait, le refrain tombe bien trop à plat et peine à émerger face à d'autres morceaux bien plus habiles (le comparer avec « Pale » ou « Always » le rendrait presque mauvais). Félicitons malgré tout une prise de risque qui permet de faire partager plusieurs types de compositions, sans rester dans les canons du genre comme avec la piste d'ouverture.
L'éponyme « Pins and Needles » reprend les poncifs du genre, et fait inévitablement penser à « Red Stars » de l'album précédent, rien qu'avec les guitares massives du début, ça ne trompera personne. Même dans la structure et le refrain, il flotte cet air de copie conforme de la piste du brûlot qui précède. Et pourtant, ici, le morceau est bien plus réussi, catchy et délicieusement ambiante, et même avec l'originalité mise au placard, on peut qualifier ce titre de véritable réussite. La jeune femme s'évertue à changer son registre au fil des ambiances traversées, doublées sur le refrain, produisant son petit effet. On imaginerait bien en ce morceau un single potentiel, une future petite pépite, qui une fois mise en bouche révèle sa saveur.
En revanche, le bon côtoie l'inutile pour un mélange des plus douteux. Le mauvais, le chiant, l'ennuyeux, il est incarné par des pistes pseudo-catchy, avec ambiances faussement influencées par la scène gothique, mais qui ne feront illusion à personne sur leur ambition « je veux plaire à un public facile d'accès ». En tête de liste, c'est un trio, composé de « Sideways », « Two Hearts » et « Secret », aussi utiles qu'une tenue de ski sur la plage.
Parlons du cas « Sideways », qui peut aisément résumer les deux autres. Des couplets melancolico-dark-dramatiques, calibrés pour vous faire rentrer dans une atmosphère aussi plate que dénuée d'une quelconque nouveauté, tant le sextette semble là s'enfermer dans la répétition. Et ce n'est pas avec un refrain qui retombe comme une crêpe, sans le moindre éclat ou attrait. Préparez des oreilles, c'est l'heure de dormir, tant Chibi semble, tout comme le titre, linéaire. Au moins, on peut dire qu'ils s'accordent, à nous offrir de la nullité, certes, mais il y a de l'entente !
Du côté de l'intérêt, c'est toujours le calme plat lorsque débute « Two Hearts », et ce n'est pas au court du morceau que ce coquin fera son entrée en scène. Les guitares ont beau être plus présentes en second plan, on s'ennuie ferme. Aucun relief, un manque d'âme et d'intérêt, le syndrome du calibré radio fait commettre des erreurs. A vouloir trop s'enfoncer dans la facilité, The Birthday Massacre se jette les deux pieds en avant.
Le constat est plus ou moins le même sur « Secret », piste de conclusion, qui, elle, tente une approche plus atmosphérique mais le niveau de réussite est le même que pour les deux autres morceaux. Accordons au moins au refrain le mérite d'être moins mauvais, ce qui n'est pas difficile diront les plus cyniques. Et on ne va pas les démentir.
« Sleepwalking » et « Control » seront adulées des fans, et peut-être même des autres également. La première a le tubesque d'un « Falling Down », tout droit tirée de l'opus précédent, avec un jeu de guitare amusant, donnant de la solidité au titre. La seconde, elle, en plus d'avoir un refrain de qualité et digne de ce nom, est le fruit d'un véritable travail sur les vocaux, où des effets cybernétiques ponctuent l'écoute avec amusement. De plus, la chanteuse varie bien plus son chant qu'auparavant, au fil des passages catchy, puissants ou ambiants.
Au niveau de la production, le groupe de l'Ontario revient là où on l'avait laissé en 2007, à savoir un son très clair, mettant en valeur les différents éléments, digne des grands. Dans Pins and Needles, basse et batterie sont bien plus en avant dans le mix que la guitare qui parfois mériterait un peu d'espace pour pouvoir s'exprimer librement. Dommage car cela donne un petit manque de puissance à combler.
En ce qui concerne la jeune Chibi, son chant est toujours reconnaissable à mille lieux, unique en son genre et doté de ce timbre très agréable, sucré et doux. Le même reproche peut toujours lui être fait, à savoir la linéarité. Il semblait qu'aucun progrès n'ait été réalisé dans ce domaine, mais l'émotion et le plaisir de l'écoute sont toujours de mise et rehausse largement le niveau.
Pétillant, rafraichissant, agréable mais non exempt de tous défauts, ce Pins and Needles est, malgré ses qualités évidentes, le moins bon opus à ce jour des six compères. Pourtant, rien qu'un morceau de l'envergure de « Pale » vaut absolument le coup d'oreille, trop vite contrebalancé par le remplissage et l'aspect calibré succès à tout prix. Mais ne boudons pas notre plaisir et, malgré le manque de prise de risque, reconnaissont que l'identité The Birthday Massacre est toujours bien ancrée. Un bon brûlot, à savourer au coin de la cheminée durant vos longues nuits d'hiver.
Note finale : 7/10