L'art de la chronique n'est pas souvent aisé, certains groupes nous aident d'eux-même à une écriture fluide (que le jugement soit positif ou non), d'autres nous usent les méninges jusqu'à la corde. Non pas pour définir une note, si futile au finale, mais bel et bien pour agencer le corps descriptivo-émotionnel d'un tel article.
Eilera ne m'a pas aidé avec cette nouvelle offrande, et j'ai bien envie de les remercier pour cela. Car réfléchir ne fait de mal à personne, n'est-ce pas ? Déjà ici, un tourment m'a habité quelques temps : comment apprivoiser la review d'un album pas vraiment album et d'une Part II pas forcément dans le même style que la Part I ? Ouh là, cela devient compliqué, un petit historique s'impose.
Si Eilera, jeune formation montpelliéraine née en 2000 d'une collaboration entre Loïc Tézénas (guitariste) et Aurélie Potin Suau (chanteuse, alias Eilera, d'où le nom du projet), a depuis compté parmi les jeunes pousses prometteuses du metal français avec un style bien spécifique mélangeant folk/rock/ambiances celtiques/symphonique ; le chemin n'a pourtant point toujours été aisé. Après un premier album Facettes assez obscur mais suffisant à réveiller underground et convoitises, puis le très bon Fusion (précédé d'un EP Precious Moments) leur octroyant un début de notorioté, la suite s'est avérée plus délicate. A la recherche d'un label, sans succès, le groupe décide tout de même de poursuivre sa voie, à sa manière, en attendant "mieux"...
Ainsi, Eilera se lance dans la composition d'un nouvel opus, Dark Chapter... and Stars, mais décide - chose peu commune - de le sortir uniquement en digital... et en deux parties, ces deux parties étant séparées par un intervalle d'un an.
Et c'est bien ici la Part II dont je vous propose l'analyse, sans avoir pu au préalable réaliser celle de la Part I. Voici pourquoi, un tantinet tourmenté, je me suis quelque peu demander de quoi j'allais vous parler ici... des deux parties ou seulement de la seconde ?
Peu importe au final, nous sommes forcément amenés à aborder les deux, puisque celles-ci s'avèrent complémentaires et oui, avouons-le, quelques peu différentes.
Là où Darker Chapter... and Stars - Part I s'avérait très folk/celtique, parfois gentillet mais superbement composé et aux mélodies imparables du début à la fin, ce Darker Chapter... and Stars - Part II se complexifie et s'harmonise autour d'une certaine froideur parfois sombre.
La production semble d'ailleurs encore meilleure, encore plus puissante, relevant ainsi le côté dark du combo et affirmant une grâce orchestrale remarquable. Une certaine maturité semble avoir pris le pas, encore plus vite que prévu, même si Eilera reste Eilera et sait nous envoûter avec une folkitude toujours aussi captivante.
Prenant au hasard le morceau "At a + Roads" (Crossroads, si vous préférez), qui mélange habilement le Eilera de la Part I et cette nouvelle mouture encore plus percutante. Les riffs sont ici lourds, les arrangements à la limite du symphonique, alors que la voix d'Aurélie se lâche presque comme jamais, laissant parfois aller ses tonalités celtiques (un peu comme sur le... "Celtic" de la Part I, tiens donc) simplement sur une batterie lourde ou quelques notes d'un violoncelle toujours aussi affûté.
J'aurais pu prendre un autre titre comme exemple que j'en aurais dit la même chose sans en faire la même description, tout simplement car une atmosphère très cohérente se dégage de ses 5 titres (plus longs en moyenne que ceux de la Part I) bien que ceux-ci diffèrent fortement les uns des autres.
Difficile de dégager un coup de coeur personnel, d'ailleurs est-ce là mon rôle ? Vous serez cependant bluffés par un "So What?!" énergique que nous avons eu la chance de découvrir live en première partie de Skyclad à Luynes, sans oublier le single "Rob My Soul" qui allie efficacité et touches quasi progressives à la perfection. Vous voici prévenus, nous sommes définivement plus proche d'un Cantata Sangui que d'un simple Nightwish folkisé !
Le premier morceau, "Slow Down Time", faisant habilement la transition avec la Part I par sa subtile légèreté et son accroche en faux semblant (merci au passage à Jan Sormo pour son excellent jeu de basse), saura faire ressortir le meilleur d'Eilera à vos oreilles. Quand à la conclusion "From Pink to Black", elle risque de longtemps conserver ses mystères, définitivement la moins "facile" d'accès et qui porte (là encore tiens) à réflexion...
Eilera était un groupe à part sur la scène française voire même européenne, il le reste d'autant plus qu'il explore ici d'autres horizons tout en gardant cet onirisme folk on ne peut plus séduisant. Et si ce côté plus sombre et plus fouillé devrait en désarçonner plus d'un, il ne faut en aucun cas s'arrêter à la première écoute sous peine de voir son jugement faussé par un effet de surprise certain.
Note : 4/5
Note globale (Part I et Part II mises ensemble) : 8.5/10
(sachant que la Part I vaut peut-être bien un 4.25/5, le tout mis ensemble mérite clairement un arrondissement au demi point supérieur)
Site officiel d'Eilera pour vous procurer l'album
Eilera sur La Grosse Radio
Interview de Loïc Tézénas réalisée en mai 2010
Live Report d'Eilera en première partie de Skyclad