Sorti de (presque) nulle part, ce groupe russe propose avec son premier album une musique intense et convaincante mélangeant un doom des plus funéraires à des passages post-rock bienvenus. Below The Sun a tout pour devenir un des futurs grands du metal lourd, lent, sombre et contemplatif. Envoy étant une excellente carte de visite.
C'était un soir d'hiver, ma nation pleurait sa liberté d'expression assassinée brutalement. Du sang avait coulé sur les trottoirs de la capitale et tout le monde s'unissait ou commençait à se défier. Un parfum de guerre civile montait progressivement et l'ambiance générale était vraiment morose.
Imprégné de cette atmosphère cafardeuse j'essayais de me décider quoi écouter alors que je vaquais à quelques occupations devant mon ordinateur.
C'est alors que se fit entendre une musique lointaine, comme si un astronef cherchait à atterrir sur notre planète déchirée par les conflits et la pollution, se manifestant par un enchaînement de riffs et de mélodies, comme un signal, un appel au secours, scrutant un lieu où se poser après une longue traversée. C'est ainsi que surgit Below The Sun, vaisseau perdu dans l'univers du doom metal à tendance atmosphérique. Origine ? Russie, plus exactement des froides terres de Sibérie, paysages à la fois désespérés et majestueux. Triste et solennel c'est exactement comme ça que nous pouvons décrire Envoy, premier album à la sortie programmée le 24 février sur Temple of Torturous Records.
Un groupe à l'identité cachée par une apparence de moines mystérieux renvoyant aussi bien aux Jawas de Star Wars qu'à Sun O))) par ailleurs. Il y a quelque chose qui transporte dans cette musique que nous pouvons résumer comme un parfait mélange de doom metal, tendance funeral, et d'influences post-rock. Le tout saupoudré d'ambiances un peu spatiales comme sur « Breath Of Universe » et « Drift In Deep Space » par exemple.
Dès la première piste « Outward The Sky » qui débute sur des arpèges contemplatifs pouvant évoquer un morceau de Mogwai, nous nous sentons priés à entreprendre un voyage dont on ne connaît ni la destination, ni si nous en reviendrons. Cette impression de perdition dans l'immensité de l'univers est renforcée par les samples de transmissions radio (une conversation entre Youri Gagarine et son centre de contrôle lors de son premier voyage dans l'espace) que l'on entend au milieu du titre.
Et au désespoir peut succéder la colère, elle s'exprime toujours sur ce « Outward The Sky » par un chant hurlé post-core renvoyant à Neurosis et à Cult Of Isis ou par l'explosion death qui intervient au milieu de « Drift In Deep Space » (rappelant les finlandais de Hanging Garden).
Mais l'odyssée proposée par Envoy est aussi une observation de la beauté. Celle dégagée par une étoile qui meurt par exemple comme sur l'instrumentale « Cries Of Dynig Stars » qui dégage une superbe et profonde mélancolie servie par un énorme feeling de la part des musiciens qui n'hésitent pas non plus à mettre en avant certaines influences psychédéliques sur ce morceau. Ou « The Earth », autre superbe ode instrumentale dédiée à la beauté de la terre à la mélodie terriblement accrocheuse rappelant le Anathema de Pentecost III ou de The Silent Enigma qui achève cette odyssée sur une impression de sérénité retrouvée.
Et que dire de ces arpèges majestueux posés avant le cri de détresse poussé sur « Alone » ? Un véritable calme avant la tempête.
Une des, bonnes, caractéristiques du vaisseau Below The Sun aussi est de proposer des morceaux longs mais jamais ennuyeux, que ce soit les onze minutes de « Outward The Sky », les dix de « Alone » ou les quinze de « Drift In Deep Space », on ne baille jamais et on se sent happé par l'intensité de la musique des mystérieux russes. Musique qui est, selon les dires du groupe, grandement basée sur l'improvisation car ces six morceaux ont été d'abord testés lors de performances devant une audience dans les bois entourant la ville de Krasnoyarsk dont est originaire le groupe. Une genèse on ne peut plus originale, tout comme le sont quelques interventions que l'on retrouve parfois comme ce son rappelant un digeridoo sur « Drift In Deep Space » mais qui n'est en fait qu'un chant produit par la gorge du batteur du combo ! Un titre où l'on peut entendre de la flûte aussi.
De même citons les ambiances très planantes et l'atmosphère science-fictionnesque de « Breath Of Univerce » qui renvoient aux morceaux ambiants de la bande originale du film Blade Runner composée par Vangelis.
Six titres, six invitations au voyage composent donc cet Envoy très bien produit par Mell Dettmer (connue pour ses collaborations avec Sun O))) et Earth entre autres) précisons-le. Et même si nous pouvons chipoter sur certains détails (comme ce riff central de « Drift In Deep Space » rappelant le « Synagoga Satanae » de Celtic Frost), ce premier passage en dessous du soleil vaut réellement le détour.
Dans l'espace personne ne vous entend crier, dommage car un si beau chant mérite d'être entendu aux confins de l'univers.
*Toute allusion à des évènements récents n'est que pure coïncidence fictionnelle.
Liste des titres :
1 « Outward The Sky »
2 « Cries Of Dying Stars »
3 « Alone »
4 « Drift In Deep Space »
5 « Breathe Of Univerce »
6 « The Earth »