Ah, la famille du death metal mélodique, probablement l'une des plus prolifiques ces dernières années dans cette noblesse qu'est le metal. Si les Empereurs pionniers At the Gates ont su former les rois que sont devenus Dark Tranquillity ou encore In Flames, bon nombre de princes ont depuis tenté de gagner leurs galons royaux, avec plus ou moins de succès. Si les Soilwork, Arch Enemy, Insomnium ou autres Scar Symmetry ont su être adoubés par leurs maîtres, d'autres frappent encore au portillon. Mais cette dynastie ne serait-elle pas sur le déclin ? Ne souffrirait-elle pas d'une consanguinité quelque peu déficiente au fil des années ? Ce n'est donc que par alliance avec d'autres styles que celle-ci semble pouvoir trouver son salut...
Alors certes, les anciens font de la résistance et les petits nouveaux se battent encore. Et si la Suède reste le berceau de cette confrérie, d'autres pays tentent d'amener un nouveau souffle et une fraîcheur particulière. La Finlande par exemple, ce voisin quelque peu rival historique, a apporté ces dernières années une intéressante concurrence. Peu à peu, les Norther, Mors Principium Est, Kalmah ou Noumena ont réussi à se faire un nom (laissons donc les Ensiferum et autres Children of Bodom en dehors de ce style, s'il vous plait), traînant ainsi dans leur (encore trop discret) sillage un groupe encore bien trop obscur : Omnium Gatherum.
Fort d'une carrière déjà assez riche (15 ans de bons et loyaux services) et diversifiée, cette formation nordique semble encore chercher à définir son style de prédilection, car la réduire au simple rang de "death mélodique" serait peut-être une erreur. Pourtant, le précédent opus The Redshift semblait les faire rentrer dans le rang, et ce de manière efficace, puisqu'offrant ce que tout bon "melodic death metal album" peut offrir : mélodies bien pensées, bon riffage bien rapide, voix bien couillue... mais...
Mais quoi, alors ? Un album plus décrié qu'autre chose, qui ne laissait donc guère une perspective d'avenir brillant pour un combo cantonné par la presse spécialisée à un éternel second rôle. Avec, souvent mis au pilori, un chant jugé moyen voire "dérangeant". Bof, si peu, bien moins pire que certains aux orientations hardcorisantes bien trop criardes...
Car ce chant tirant vers un thrash caverneux, Omnium Gatherum le cultive et décide en aucun cas de l'abandonner avec ce nouvel opus, le 5ème en 8 ans, intitulé New World Shadows et estampillé Lifeforce Records. Si celui-ci ne voit le jour que le 28 janvier prochain, il ne mérite pas moins une légère analyse anticipée afin de démontrer, si cela est possible, que ce groupe sait surprendre et se remettre en question sans pour autant perdre ses bases.
L'évolution est en marche, c'est le moins que l'on puisse dire. Omnium Gatherum semble avoir ici pris le pas de ses quelques défauts en les sublimant vers de nouvelles ambiances, parfois plus atmosphériques que brutales. Ainsi la galette commence tambour battant avec un "Everfields" au coté épique soigné, qui n'est pas sans nous rappeler le meilleur de ce que Scar Symmetry a pu nous offrir (du moins au niveau de la l'approche instrumentale). Et si les compatriotes de Swallow the Sun étaient venus également inspirer un côté mélancolique clairement sous-jacent ?
L'album ne reste cependant pas dans cette tonalité et change de titre en titre, tout en gardant une idée directrice cohérente portée par un chant sans concession et quelque peu linéaire, il faut bien le reconnaître. Il est amusant de constater que le quintet finlandais aime jouer avec nos nerfs, il faut en effet avoir un certain goût du risque pour nous proposer le très direct et moderne (presque hardcore par moments saccadés) "Ego" (véritable single en puissance) à la suite d'une telle introduction. Et pourtant, cela marche très bien !
Nous sommes cependant encore loin d'un chef d'oeuvre du genre, le côté mécanique d'un Jukka Pelkonen aux vocaux d'acier pouvant nuire à l'ensemble, non pas par sa qualité mais par son manque de variété comme déjà signalé plus haut. Certaines compositions situées au coeur de l'opus font également baisser l'attention après un départ sur les chapeaux de roue, et ce n'est que sur la très étonnante conclusion "Deep Cold" (plus long morceau du brûlot avec ses 9'30") qu'on se prend à rêver pour le groupe d'un avenir radieux.
La force de ce New World Shadows réside donc en une richesse d'arrangements plus fournis (le travail du claviériste Aapo Koivisto s'avérant plutôt abouti), une production d'acier avec un mix/mastering assuré par le grand Dan Swanö, ainsi que des structures agréables et soignées réhaussées de mélodies très intéressantes souvent plus captivantes qu'accrocheuses. Un peu à la manière d'un Insomnium, si on veut s'amuser au jeu des inévitables comparaisons. Pour rajouter du positif à l'ensemble, citons également des titres tels que le complexe "Soul Journeys", l'instrumentale "Watcher of the Skies" ou bien la survitaminée "The Distance" qui ne sombrent quasiment jamais dans la monotonie musicale.
Un disque intéressant et bien maturé, dirons-nous, pour une surprise agréable et un retour vers le futur d'un style à la recherche d'un nouveau souffle. Si d'autres Omnium Gatherum fleurissent ici ou là, considérons cette scène comme sauvée à défaut d'être révolutionnée.
Note : 7.5/10
Omnium Gatherum sur La Grosse Radio