Est-il nécessaire de réinventer la roue pour laisser son empreinte dans l'univers du metal? Vu le succès actuel d'Airbourne, on répondra à cette interrogation par un franc et généreux « non ». Certaines formations désirent toujours, et c'est tout à leur honneur, repousser les carcans d'un genre musical afin de creuser un nouveau sillon. D'autres n'ont pas cette ambition et se contentent de suivre leurs modèles, en forgeant les meilleures compositions possibles. Dans un cas comme l'autre, certains se démarquent par leur excellence. The Midnight Ghost Train va tenter de convaincre son auditoire via Cold Was the Ground, troisième disque déjà de la formation américaine. Le label autrichien Napalm Records, en tout cas, croit entièrement au potentiel du trio et cette signature devrait leur offrir un support promotionnel plus que conséquent.
Le trio du Kansas se classe indéniablement dans la seconde catégorie, tant son approche du stoner est plus que traditionnelle : riffs qui groovent, ambiances aux saveurs désertiques, hommages aux illustres fondateurs du genre, les Américains n'ont aucune envie de faire évoluer le style mais simplement de se placer parmi les plus talentueux de la nouvelle vague. Il n'est ainsi nullement étonnant de retrouver des inspirations criantes vers Clutch ou Kyuss, notamment par les riffs efficaces du leader Steve Moss. La formation respecte ainsi les poncifs en vigueur dans le genre mais ne manque pas de talent, sans toutefois faire preuve de génie. Les compositions proposées dans cette œuvre varient habilement les plaisirs, entre des moments énergiques où le trio prend le taureau par les cornes (« BC Trucker », « Arvonia ») et des mid-tempos aux relents de blues, qui calment les ardeurs précédemment libérées. Des titres comme « Twin Souls » tempèrent les humeurs et riffs véloces, laissant l'auditeur profiter d'un peu de repos, sans toutefois tomber dans l'ennui.
La constance est de rigueur et le combo a le bon goût de ne pas proposer de morceau réellement faible, hormis « The Little Sparow », une piste entièrement narrative, dont l'intérêt est plus que limité. Malheureusement, aussi appliqué et talentueux soit-il, le trio n'offre jamais non plus de moment réellement dantesque. L'ensemble s'écoute, sans broncher, mais ne déchaîne pas les passions comme d'autres auparavant ont pu le faire. Cependant, on ne peut accuser The Midnight Ghost Train d'offrir une collection de compositions totalement anecdotiques. Le groupe sait attirer l'attention, attraper l'oreille et convaincre l'auditoire de la bonne tenue de son ensemble. Le premier vrai titre, « Gladstone », est une entrée en matière plus que judicieuse, où le talent respectif de chaque membre est mis à contribution. La voix de Moss, par ailleurs, dénote immédiatement par sa rugosité, proche d'un chant extrême. Quand ce n'est pas les vocaux qui volent la vedette, ce sont les lignes de basse, notamment sur l'entêtante « Straight to the North ». Les amateurs de stoner ont donc largement de quoi être satisfaits, mais il manque un véritable éclair de génie qui ferait entrer les Américains dans la cour des grands.
Cold Was the Ground est bien loin d'être un mauvais disque, renfermant des moments de grâce plaisants et une poignée de pistes agréables. Est-ce suffisant pour passer à la vitesse supérieure? Loin de là. Si l'on prend en compte, qui plus est, le fait que The Midnight Ghost Train commence à sérieusement tourner en rond albums après albums en ne proposant aucun changement de voie, il est légitime de se demander jusqu'où arrivera le trio avant d'avoir fait le tour de ses idées. Une œuvre sympathique à défaut d'être transcendante, qui s'appréciera pour ce qu'elle est, à savoir une récréation divertissante. Mais qui ne marquera pas les esprits, tant il est possible de trouver plus savoureux ailleurs.