Nikita Kamprad, chanteur et guitariste de Der Weg Einer Freiheit

Les Allemands de Der Weg Einer Freiheit commencent à avoir le vent en poupe. Après un excellent Unstille digne d'éloges et de nombreux concerts à travers l'Europe et ses alentours, le quatuor signe sur le label français Season of Mist pour la sortie de son troisième disque, Stellar. Le chanteur, guitariste, fondateur et compositeur du groupe, Nikita Kamprad, a ainsi répondu à nos questions, en rapport avec cette nouvelle popularité, l'album à venir mais aussi des sujets plus personnels.

"La musique, et ce groupe en particulier, est ma voie personnelle vers la liberté, une façon de m’échapper et peut-être d'aider d'autres personnes à s'échapper aussi"

Der Weg Einer Freiheit

Interview en mailer par Sanguine_sky, questions de Sanguine_sky et Tfaaon

Sanguine_sky : Bonjour Nikita et merci à toi de nous accorder cette interview! Pour ceux qui ne connaissent pas, pourrais-tu commencer par présenter Der Weg Einer Freiheit?

Au tout début, le groupe, ou plutôt ''projet'', n'était pas supposé publier de musique ou jouer en concert. C'était une façon très personnelle de m'exprimer à travers la musique et les paroles, et ça n'a pas vraiment changé aujourd'hui d'ailleurs. Une fois les premiers morceaux terminés, j'ai envoyé les pistes à des amis proches et ils m'ont dit : « Tu DOIS publier ces titres et former un groupe! ». J'ai donc demandé à notre ancien chanteur Tobias, avec qui je jouais déjà dans d'autres groupes, de poser sa voix et nous avons fait un pressage maison de notre premier album, limité à 200 copies, qui ont été toutes vendues en un mois. Ces cinq dernières années, nous nous sommes développés très rapidement, et je ne m'y attendais pas du tout. Après avoir eu de nombreux membres de session, on peut maintenant considérer que nous sommes un groupe à part entière avec des membres permanents, et non plus un projet, surtout depuis que nous avons un line-up stable et constant avec des musiciens à plein temps depuis fin 2012. Nous avons ainsi eu l'occasion de visiter des endroits auxquels nous n'étions jamais allés comme la Russie, Israël ou la Norvège, et nous avons hâte que le nouvel album sorte!

De quelle façon écris-tu les morceaux? As-tu changé ta façon de composer pour ce nouvel album ou est-elle restée la même?

A chaque fois que j'écris un nouvel album, je n'ai absolument aucune idée de la direction que je veux prendre. Du coup, il est difficile pour moi de dire de quelle façon Stellar et Unstille sont connectés l'un à l'autre, ou aux autres sorties. Au niveau de l'écriture, il n'y a pas eu beaucoup de différences avec les précédents albums. J'écris de la musique seulement quand je suis dans l'humeur, sans pression ou nécessité de le faire. J'aime l'idée de laisser la chanson s'écrire toute seule, en lui donnant plus de temps pour se développer et ainsi la compléter à 100%. C'est la même chose pour l'album complet. Une fois que les premières pistes sont terminées, une atmosphère particulière émerge automatiquement de ce qui a été écrit et j'essaye de pousser l'écriture plus loin dans cette direction. C'est généralement aussi à ce moment que je commence à travailler sur le concept de l'artwork, que je pense à la tracklist, etc. Tout vient naturellement, étape par étape, sans aucun plan à la base.

Peux-tu nous parler des paroles et thématiques présentes dans l'album?

Les paroles reflètent ce qu'il se passe dans mon esprit, mon imagination ou même mes rêves. Sur Stellar, la métaphore des étoiles est omniprésente à travers l'ensemble de l'album, des paroles et de la pochette. Tout comme elles sont présentes dans notre vie quotidienne, les étoiles se trouvent toujours au-dessus de nous, et c'est un rêve pour beaucoup que de les approcher. C'est comme un souhait omniprésent de liberté, qui, à mon avis, ne peut pas être trouvé ici sur Terre, ou dans quelque chose de matériel comme l'argent ou les biens que l'on possède. C'est quelque chose d'immatériel – tu peux même dire spirituel – c'est quelque part, très loin, et tu dois trouver une façon d'y accéder. La musique et l'art sont des voies, pour moi, d'arriver à cette liberté et cette plénitude personnelle, et cet album est une nouvelle étape dans cette quête. Il y a beaucoup de points dans les paroles qui montrent ma vue sur la société actuelle et ses effets négatifs. J'utilise ma musique comme une échappatoire, qui me permettrait de me concentrer sur ce qui est important pour moi dans la vie. La musique me permet, depuis toujours, de mieux me connaître moi mais aussi les autres. Notre société actuelle place de nombreuses embûches dans notre quête de liberté et celle-ci est limitée presque partout et tout le temps. Si tu ne peux t'échapper physiquement, tu dois le faire mentalement, et c'est ce que la musique m'aide à faire, signifie pour moi, et j'en parle dans Stellar à travers cette image des étoiles.

Der Weg Einer Freiheit

Vous êtes à présent sur le label Season of Mist. Comment cela est-il arrivé et qu'attendez-vous de ce partenariat?

Season of Mist nous a vus pendant le Summer Breeze 2013 en Allemagne, et nous avons été approchés par le label tout de suite après la performance, ce qui était inattendu. Nous avons brièvement parlé du futur et des prochaines sorties et nous sommes entrés dans les détails par la suite via mail. C'est depuis toujours l'un de nos labels favoris, avec un catalogue splendide et comme nous cherchions un nouveau label pour le nouvel album, nous avons finalement signé un deal avec eux. Nous sommes plus que ravis de voir que la collaboration se passe très bien, de manière très professionnelle et rapide, ce qui est très important pour la sortie de Stellar. Le label nous aide aussi à toucher un public plus international, ce qui est plutôt inhabituel pour un groupe chantant en allemand comme nous.

Stellar est le premier album où tu es le chanteur. Comment as-tu appréhendé l'enregistrement du chant?

L'enregistrement du chant s'est très bien passé. Après avoir terminé d'enregistrer la batterie, nous avons, pour la guitare, la basse et le chant, installé deux mini studios d'enregistrement dans une grande salle. Une fois que tout ça était fait pour les guitares, nous pouvions continuer avec la basse, le chant, un peu de mixage, ce qu'on voulait faire à ce moment précis en gros. C'est une méthode très confortable car il n'y a pas de pression, contrairement à la façon de faire où tu dois enregistrer toutes les guitares, puis toutes les basses, puis l'ensemble du chant, etc. On trouve ça plutôt ennuyeux, comme du travail à la chaîne. Je cherche toujours à ce que le travail en studio soit créatif et fluide. Souvent, nous avions besoin d'une journée pour enregistrer le chant pour un morceau, et ensuite, nous avions du temps supplémentaire pour éditer, mixer, ou enregistrer un autre instrument. Tout est allé parfaitement bien et ce n'était pas trop épuisant pour mon chant.

Les changements de line-up sont souvent vus par les fans comme un tournant décisif, surtout au niveau du chant. Pourquoi as-tu pris le rôle de chanteur, et quelles réactions as-tu reçu à ce sujet jusqu'ici?

Après le départ de Tobias, nous avons cherché un nouveau chanteur mais en parallèle, nous tentions de continuer comme un quatuor, avec moi en tant que chanteur en plus d'être guitariste. Et à notre grande surprise, ça se passait très bien, surtout si tu considères que je n'ai jamais fait ça auparavant et que je ne me suis jamais vu comme un chanteur. Au final, nous n'avons fait aucune audition pour un nouveau chanteur. Nous étions rapidement satisfait du résultat avec moi à ce poste, Tobias Schuler à la batterie, Sascha Rissling à la guitare et Giuliano Barbieri à la basse. Les avis que nous avons reçus jusqu'ici de la part des fans sont très encourageants, et nous laissent à penser que cette décision d'évoluer en quatuor est la bonne.

Avec le recul, comment comparerais-tu ce nouvel album par rapport aux précédents?

Par rapport aux précédents, Stellar est plus organique, mûr et réfléchi. Nous avons enregistré dans une grande pièce avec un très bon son, et il n'y a eu aucun besoin d'ajouter une reverb' artificielle, ce qui rend l'ensemble plus naturel. Nous avons aussi tenté d'enregistrer tous les instruments de la façon dont nous voulions qu'ils sonnent sur le résultat final. En conséquent, le mixage s'est très bien déroulé et il n'y a pas eu besoin d'ajouter beaucoup d'effets via des software plugins et toutes ces choses là. Alors qu'Unstille était plus agressif, clinique et dur, Stellar est plus doux et chaud, ce qui correspond à mon sens mieux à notre atmosphère plutôt mélancolique et sombre. Il est plus difficile d'appréhension aussi, j'espère que les auditeurs vont y revenir et l'écouter avec attention car c'est un album très dynamique, qui requiert de la patience et une ambiance appropriée. S'ils parviennent à rentrer dans cette atmosphère, ils seront récompensés par beaucoup de nouveautés et de surprises.

Les paroles sont écrites dans votre langue natale, l'allemand, contrairement à la plupart des groupes chantant aujourd'hui en anglais. Penses-tu que cela puisse déranger une partie des auditeurs, ou, à l'inverse, renforcer la puissance de votre son et de votre message?

Étonnamment, nous sommes plutôt bien acceptés dans les pays non-germanophones, bien que l'Allemagne et l'Europe centrale restent nos endroits de prédilection, où les gens nous connaissent le plus. Mais si l'on considère que nos paroles sont en allemand et donc que seuls les Allemands, Autrichiens et Suisses comprennent nos paroles, beaucoup de personnes venant d'autres pays perçoivent notre message rien qu'en écoutant la musique, ce qui est génial. Nous sommes vraiment très excités à l'idée de jouer dans un pays dans lequel nous n'avons jamais mis les pieds et rencontrer des personnes différentes, des cultures différentes et de partager des points de vue.

Récemment, on assiste à un véritable gain de popularité d'une nouvelle vague de black metal, un peu alternative, avec des groupes comme Deafheaven, Liturgy ou encore Ghost Bath, qui incorporent diverses influences à leur musique et tranchent ainsi radicalement avec la scène black metal old-school. Quelle est ton opinion sur cette vague de black metal, et comment considères-tu Der Weg Einer Freiheit par rapport à la scène du genre?

Comme nous avons émergé plus au moins au même moment que ces groupes (dans les alentours de 2010), je crois que c'est plutôt naturel d'associer DWEF à cette vague. Cependant, je dirais que nous avons une approche agressive, rapide et mélodique du black metal qui s'approche de cette vague, comme ce genre reste vraiment notre influence principale. On ne veut pas se limiter à répéter ce que d'autres ont fait 25 ans auparavant, alors nous testons de nouvelles choses, avec une approche plus moderne. Je crois que cette façon d'incorporer de nouveaux éléments, comme le font ces groupes, est une évolution musicale naturelle de la scène, une tentative de créer un nouveau son. Bien sûr, les puristes ne vont pas du tout apprécier cela. Ça interfère vraiment avec leurs vues et leurs préférences du black metal mais c'est important de rester ouvert d'esprit. C'est ce qui donne vie à de nouvelles musiques, au lieu de copier ce que d'autres ont fait encore et encore.

Stellar

Quels groupes considérerais-tu comme tes influences majeures?

A l'époque, c'était le black metal allemand comme Nagelfar, Nocte Obducta, Orlog, Drautran, etc. Le black metal scandinave aussi, avec des groupes comme Dissection ou Emperor, que nous écoutons toujours par ailleurs. Plus personnellement, une influence majeure pour moi reste Muse, ainsi que le parrain de la musique : Bach.

Comment se porte la scène black metal en Allemagne? Voudrais-tu faire des recommandations aux auditeurs?

Il y a quelques groupes d'Allemagne qui valent vraiment le coup : Lantlôs, Imperium Dekadenz, Heretoir, Orlog, Ascension, Negator et aussi Nocte Obducta.

Nous pouvons traduire le nom du groupe par ''La voie d'une liberté''. Qu'est-ce que ce nom implique pour toi? Te sens-tu libre, en tant qu'artiste ou tout simplement en tant qu'humain?

On peut grossièrement le traduire de cette façon, mais en réalité, je n'ai jamais aimé les traductions que j'ai pu en faire. Écrire et jouer de la musique en concert me fait me sentir libre, ne serait-ce que pour un court moment. Je ne sens plus vraiment de liberté dans le monde d'aujourd'hui, comme tout est très limité, que ce soit l'expression, l'intimité, la religion, etc. Ça cause toujours des conflits, de la corruption, des guerres. La musique, et ce groupe en particulier, est ma voie personnelle vers la liberté, une façon de m’échapper et peut-être d'aider d'autres personnes à s'échapper aussi. C'est exactement ce que le nom du groupe reflète. Mais à mon avis, tu ne peux pas définir une forme stricte de ''liberté''. Je veux dire, que ce soit la musique, ou l'art, je trouve ma voie personnelle et ma liberté individuelle, et je crois que chaque humain a une voie vers la liberté qui lui est propre.

Der Weg Einer Freiheit

Nikita Kamprad, deuxième en partant de la droite
 

As-tu apprécié un album en 2014, ou un concert en particulier?

J'ai vraiment aimé le dernier album de Sólstafir l'an dernier. Je le recommande. Mais à part ça, je n'ai pas été plus convaincu que ça par d'autres albums ou concert en 2014. J'espère que ce sera mieux cette année!

Je te remercie pour tes réponses! Nous avons hâte de t'accueillir avec ton groupe ici en France pour les concerts à venir. Un dernier mot pour les lecteurs de La Grosse Radio?

Merci à toi pour cette interview, et cette opportunité de parler de notre groupe et de notre musique. Nous sommes impatients à l'idée de venir rejouer en France, comme nous n'avons que de bons souvenirs de nos précédents concerts dans ce pays! Je tiens également à remercier chaque personne lisant cette interview, ainsi que La Grosse Radio pour son soutien, et j'espère vous voir très bientôt à nos concerts!



Partagez cet article sur vos réseaux sociaux :

Ces articles en relation peuvent aussi vous intéresser...

Ces artistes en relation peuvent aussi vous intéresser...