M.Ill.Ion – Sane & Insanity

Au grand jeu du « qui c'est qui connaît ? », je demande M.Ill.Ion. A vos regards médusés et vos expressions interrogatives, il est évident que non, vous n'en avez jamais, mais alors encore jamais entendu parler. Et pourquoi est-ce que vous devriez connaître ? Pour ceux qui ne sont pas fan, mais alors pas du tout de hard rock, vous avez déjà la réponse. Et pour les autres … Ben, bonne question en fait. Un manque de promo, de talent, de rapidité à faire des albums ? Le débat reste (pour le moment) ouvert. Et ces suédois (de Göteborg, la précision c'est le bien) sont de vieux routards, et sont loin d'être à leur première réalisation en plus de 20 ans (ils se sont formés en 1989, faites le calcul et remportez le jeu concours qui vous permettra de gagner un autographe de Ju de Melon). Après tant d'années, les scandinaves ayant attendus dans leurs pantoufles et leurs fauteuils que le succès vienne frapper à la porte de leur chalet, invité qui jamais ne vint, ont décidés de prendre les choses en main.


3 ans après leur sixième opus Thrill of the Chase, le quintette est de retour (pour vous jouer un mauvais tour ?) avec Sane & Insanity, leur (à vous de faire le calcul) album. C'est donc pendant le mois de Mars 2011 qu'ils accouchent de leur nouvelle oeuvre, un brûlot en plus à la discographie, un petit nouveau dans la grande famille du hard rock. Avec une signature sur le label Metal Heaven (tout comme le précédent, en fait), une chance est de leur côté, un bon moyen de faire parler d'eux médiatiquement, encore faut-il que l'offrande, de son côté, soit de qualité.


Et ça, ce n'est pas vraiment le cas, car il faut bien l'avouer, on reste dans le domaine du hard rock à tendances heavy assez classique, qui, même s'il est bien fait, manque de ce petit quelque chose qui fait toute la différence. Les titres restent en surface mais on a bien du mal à aller en profondeur, et la simplicité des structures, si elle pouvait créer l'efficacité chez des formations telles Mr. Big ou Eden's Curse sentent chez nos amis du nord la redondance, le manque total d'inspiration et la linéarité qui s'installe très rapidement chez un auditeur qui au fil des titres devient blasé par ce qu'il entend, au point de finir avec l'accompagnement de bâillements.


Oui, il est ici le problème de Sane & Insanity, c'est à dire celui de ne pas réussir à captiver son auditoire par cette impression que les pistes font plus l'effet de remplissage dès le cinquième morceau que par une puissance des refrains comme savent pourtant le faire moult combo du genre. Et c'est dommage, car il commence vraiment bien ce brûlot, avec une fraicheur non-négligeable et une cavalcade de guitares qui lorgneraient presque vers le power metal sur « Cry to Heaven », définitivement un excellent titre, tout comme les deux suivants, d'ailleurs.


Malgré tout cela, l'album peut paraître varié dans les influences musicales, et si les compositions, elles, proposent globalement les mêmes schémas, les fans de chaque style se rapprochant du tournant hard rock/heavy metal pourraient être comblés par une piste ou par une autre. Ceux qui ont un fort penchant pour le heavy se pencheront davantage sur « Cry to Heaven », tandis que l'amateur de hard rock pur et dur ira voir du côté de « Tomorrow Never Dies », l'amateur de FM se penchera vers « Seize the Day », et pour la douceur, il faudra chercher « Fuel to My Heart ».


Le problème, c'est que cet avantage se retournera aussi en défaut. Combien de fois les morceaux ne viennent-ils pas nous rappeler les réalisations d'autres combo déjà passés par là ? On peut se dire qu'un tel titre va évoquer Gotthard, alors qu'un autre ira voir du côté d'Europe (flagrant sur « Cry to Heaven »), sans oublier Deep Purple (avec « Everyday Hero »), Whitesnake et consorts. Là encore, le chant de Ulrich Carlsson vient renforcer ce constat, par son chant limpide et agréable, mais tellement passe-partout et déjà vu.


Pourtant, il n'est pas mauvais ce vocaliste et est capable d'exceller lorsqu'il le veut, sa prestation étant tout simplement remarquable sur le premier titre, ou encore sur « Hell's Gate », avec toujours une émotion palpable, une voix chaude qui se veut parfois émouvante comme avec la délicate ballade « Fuel to My Heart », mais qui parfois plombe totalement le travail instrumental des musiciens, qui eux non plus à certains passages ne valent guère mieux. « Drama Queens » est un exemple flagrant du manque de puissance, de charisme et de personnalité (au moins là, il s'accorde avec la musique) de ce frontman au potentiel certes présent mais dont sa voix n'est pas forcément exploitée comme elle devrait l'être, ou se retrouve cantonnée à des rôles qui ne lui vont pas. Et là, on tournera le regard sur « Under Your Wings », piste déjà mauvaise qui est encore plombée par un chanteur qui, cette fois-ci, devient carrément insupportable.


La performance des musiciens n'est pas non plus des plus exceptionnelle. Entre leur incapacité, une fois « Tomorrow Never Dies », à composer ne serait-ce qu'un titre qui permette à l'auditeur de sortir de son sommeil à cause de cet énorme ventre mou et succession de pistes banales et mielleuses, sans aucun relief ou dimension particulière, ou encore le manque de solos spécialement appétissants qui puissent injecter de la puissance sans tomber dans une pseudo-démonstration de guitare, nul doute que le résultat en aurait été grandement amélioré. Sauvons quand même Johan Bergquist, le claviériste qui, s'il se fait parfois discret, intervient toujours au bon moment avec son instrument qu'il utilise de façon polyvalente.


Pourquoi la mayonnaise ne prend pas, donc ? Pourquoi les refrains ne sont-ils pas plus pimentés et ne suivent-ils pas la lignée des premiers morceaux ? En réalité, tout n'est pas à jeter et pris séparément, quelques pistes sur la fin peuvent laisser présager le meilleur sur une dimension scénique, mais également dans l'album en lui-même. Il suffit de les extraite de cette montagne de monotonie qui s'est construite. Entre l'ennuyeuse piste éponyme, « I Raise My Glass » qui aurait pu avoir du potentiel si le refrain était meilleur, la vocalement massacrée « Drama Queens », l'hideuse « Under Your Wings » qui est le fléau de la mouture ou encore la ballade remplie de faux sentiments « Fuel to My Heart » et ses ridicules woouuhouuu en fond sonore, l'oasis que constitue « Hell's Gate » est appréciable bien que complètement noyé sous la masse tant l'auditoire aura décroché et ne fera plus attention à ce qu'il écoute. Une erreur stratégique de taille, qui ne met pas en valeur les titres suffisamment intéressants pour attirer l'attention. Tout n'est pas noir, puisque « Test of Time » et « Hate » arrivent à passer le contrôle qualité.

En gros, pour pouvoir pleinement profiter de l'écoute, il faut uniquement s'attarder sur le début et la fin du skeud.


Et puis sur la production, là aussi, si ce n'est pas mal, ça pourrait être mieux. Parfois, quand chaque musicien joue avec ses petits copains, le résultat sonne parfois un peu brouillon (la partie instrumentale de « Test of Time »), et les guitares ont un rendu curieux, entre son parfois trop éloigné, et à d'autres endroits, trop en avant. Ou bien c'est une bonne grosse blague de la part des suédois, ou ils ont encore quelques leçons à tirer de ce côté-ci. Mais ne crachons pas de trop dans la soupe, après tout le son est correct et on est loin d'un rendu brouillon, ce qui est toujours profitable pour la qualité de l'écoute.


Une copie qui est à revoir, donc. Erreurs sur le mixages, titres manquants en grande partie de force et d'énergie, ou même d'une touche de sincérité. Finalement, ce doit être ça qui fait que M.Ill.Ion soit toujours resté dans un certain anonymat, ce manque total d'une quelconque personnalité, uniquement capable de se fondre dans la masse pour, bien souvent, ne pas arriver à faire mieux, voir souvent se perdre dans la linéarité et le manque d'adhésion. Dommage, il aurait pu résulter en Sane & Insanity un album plus que correct, surtout grâce à des premiers titres très encourageants, malheureusement l'effort est ruiné par la suite. Il ne sera donc pas dur de trouver quelque chose de meilleur à se mettre sous la dent. En se laissant aller dans la conformité la plus totale et vouloir séduire avec une recette simple, les suédois n'ont fait que renforcer le sentiment qu'il existe des groupes définitivement plus intéréssants.



Note finale : 5/10

Myspace de M.Ill.Ion



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