La 7ème merveille de Shining...
par Lionel / Born 666
L’œuvre de Shining est tourmentée tout comme son chanteur compositeur Niklas Kvarforth. Son énergie destructrice est canalisée dans l’expression schizophrène de sa musique.
Tous les titres des albums commencent par un numéro en chiffre romain, et celui-ci ne déroge pas à la règle. C’est donc le 7ème. Il s’intitule VII: Född Förlorare, ce qui veut dire « Né Perdant », tout un programme et il n’y aura que peu d’espoir de s’en sortir à l’écoute de ce nouvel album des suédois.
Avec ses « Ouhs » caractéristiques, Niklas ponctue ses titres tout en intelligence et finesse. Les passages acoustiques reviennent continuellement sur l’album comme sur « Förtvivlan, min arvedel ». Lors de ces passages apparait la voix claire du chanteur. D’ailleurs c’est pendant ces instants délicats que l’on pense à un autre groupe de Suède comme Opeth, lorsqu’il se lance dans une sorte de Death Mélodique.
Sur l’intro de la deuxième, on entend des quintes de toux au fort gout de sang puis sa voix reprend le pouvoir dans des ambiances chères au groupe. C’est tourmenté, joliment produit mais un sentiment de mal être arrive rapidement pour nous plonger dans les tourments de Niklas.
Il cri ses mots sur « Tiden läker inga sår », puis la chanson s’arrête, des cloches sonnent pour reprendre de plus belle. La batterie s’emballe dans un rythme effréné. Il en hurle de désespoir. Son œuvre lui ressemble. C’est vrai que c’est un personnage qui parle dans ses textes de suicides, d’automutilation... chose qui faisait sur scène. La scarification se retrouve maintenant plutôt dans les drogues et l’alcool qui le tuent à petit feu. Il tousse, il respire difficilement, ça en arrive même à être poignant. Jusqu’où veut-il aller ?
Les passages acoustiques montrent la sincérité du musicien. Les mélodies à la guitare vous brisent le cœur tout comme celui du chanteur.
Ce qui lasse peut-être au bout d’un moment à l’écoute d’un album de Shining ce sont ses structures sensiblement identiques avec de jolis breaks au milieu et des mélodies à la guitare qui vous calment. Mais parfois des solos époustouflant vous arrivent en pleine figure comme sur « Människa o'avskyvärda människa » et vous permet d’apprécier le talent des musiciens.
Ça rugi, ça frémit, ça vous envoi directement sur un brancard, le goutte à goutte accroché au dessus de votre tête, le cœur est faible, vous êtes encore allés trop loin…
On commence « Tillsammans är vi allt » par un piano d’une beauté inespérée qui vient vous tourmenter, vous interpeler. Le titre évoque peut-être l’espoir (traduction : Together We Are Everything), car à deux on est tout. C’est peut être ce qui le maintient en vie auprès de nous. Seul, nous sommes perdus et ensemble peut-être un peu plus fort. Les mots ne viennent pas du plus profond de sa gorge mais plutôt du plus profond de ses entrailles. Le sang remonte par la trachée artère afin d’exprimer ses sentiments. C’est très long, plus de 12 minutes, mais sur l’album les titres avoisinent souvent les 7-8 minutes. Les breaks ambiants font la part belle au titre. C’est visuel, introspectif et émouvant comme toute son œuvre d’ailleurs.
Il y a aussi des passages avec des thèmes parfois plus Blues, parfois Hard, parfois Death. Puis les notes de piano reviennent sous un violon inspiré. C’est grave, envoutant et on ne peut que penser à la singularité de la musique de Shining. Où nous mène Niklas ? Que veut-il nous expliquer dans son désarroi ?
Il maîtrise le chant comme bon lui semble. Il envoute son auditoire et renverse les préjugés sur sa musique.
Puis soudain la batterie sort l’artillerie lourde pour supporter un chant clair et c’est là toute la magie de Shining. Le groupe sait tout faire, « I nattens timma » est une reprise de Landberk qui date de 1992. C’était un groupe suédois de rock progressif. Et tout comme Shining leur musique était sombre, atmosphérique et planante.
Sur « FFF », Shining a deux invités de choc avec Erik Danielsson de WATAIN et Peter Bjargo d'ARCANA. Cela commence comme une petite ritournelle assez sympathique. Puis l’énergie, la force et la puissance sortent d’un rythme surpuissant comme sait le faire le groupe.
Les notes se prolongent jusqu’à l’extinction afin d’accentuer la puissance de la musique. Le « Ouh » typique revient, Niklas survole le morceau qui finira dans un accord sur un orgue Hammond… enfin c’est ce que je crois.
Sa musique est comme notre présence sur terre, courte, profonde, faite de sentiments, de beauté, de joie mais aussi de tristesse. La mélodie est à vous retourner tellement elle est belle. C’est un maître en la matière et rien ne lui fait peur au risque de surprendre les plus extrêmes d’entre nous.
Tracklist:
1. "Förtvivlan, min arvedel" (Despair, My Inheritance)
2. "Tiden läker inga sår" (Time Heals No Wounds)
3. "Människa o'avskyvärda människa" (Man, O'Awful Man)
4. "Tillsammans är vi allt" (Together We Are Everything)
5. "I nattens timma" (In the Hour of the Night)
6. "FFF"
Note : 9/10