par Ju de Melon
Alors que le printemps semble rentrer dans ses premières joutes faces à un été de plus en plus pressant, le noyau dur des metalleux du 95 se retrouve à l'Observatoire de Cergy pour un concert 100% metal français à ne pas manquer.
Loudblast et Dagoba sur la même date, cela n'arrive en effet pas tous les jours. De quoi assurer un véritable choc des générations qui seront, quoiqu'il arrive ici, unies dans les riffs, growls ou autres blast beats en béton.
C'est dans une salle plutôt déjà bien remplie que les débats s'ouvrent vers 20h45, pour un vendredi soir sans consession...
Voici un groupe culte du metal français qui revient sur le devant de l'actualité cette année avec un nouvel album, Frozen Moments Between Life and Death, largement salué par la critique (notamment ici-même par notre compère Edgecrusher) et défendu à de nombreuses reprises déjà sur quelques dates. Car oui, Loudblast est en tournée, et accepte ce soir d'ouvrir pour les marseillais de Dagoba... un comble pour un groupe venu de Lille !
En attendant, les 4 hommes occupent d'ores et déjà la scène de toutes leurs forces lorsque les premières notes de "Steering for Paradise" retentissent. On note de suite le jeu carré et impressionant du batteur Hervé Coquerel, véritable métronome derrière ses fûts, martelant sans cesse que ce soit de ses bras infatigables ou de ses pieds sans chaussures. C'est en effet en chaussettes qu'il effectuera son labeur rythmique toute la soirée, de quoi prouver à ceux qui en doutait encore son expérimentée aisance dans l'exercice.
Autour du chanteur Stéphane, nous retrouvons les deux derniers arrivés : Drakhian à la guitare lead et Alexandre Lenormand à la basse. Si le jeu de scène manque encore d'un rôdage parfait et d'une décontraction totale, aucun des deux n'aura failli dans sa pratique musicale ni même sur la présence charismatique. Le gratteux s'amusant même parfois avec les fans du premier rang mais aussi avec son chanteur notamment sur le dernier morceau du set "My Last Journey"...
Mais que dire alors des prouesses de soliste dont celui-ci fait preuve ? Parfaitement en phase avec le père Buriez, Drakhian nous offre un solo de "Cross the Threshold" aux petits oignons, sans conteste le moment "mélodico-technique" de la soirée. On peut également sentir chez lui ces influences black sur quelques petits riffs, pas étonnant pour un homme qui va bientôt sortir un album solo dans le genre.
Niveau chant et communication avec la foule, Stéphane Buriez sait y faire, réunissant ainsi toute l'expérience du métier et des prouesses vocales totalement intactes. Guitare rythmique en mains, le frontman se donne sans compter et sort plus d'une fois ses tripes, les régurgitant dans son micro en une violence quasi artistique. Après, que cela plaise ou non, la performance est là : nette et sans bavure. On ne peut finalement reprocher ici qu'un certain manque de déplacement, global d'ailleurs, mais ceci serait plutôt la marque de fabrique d'un groupe qui préfère poser ses bases et envoyer le bois directemnt "in your face", sans chichi... sans compter un petit souci au genou pour Stéphane l'empêchant ainsi de trop cavaler sur les planches, rien de bien grave mais une gêne certaine.
En ce qui concerne la setlist, nous avons pu assister à 1h de show bien huilé visitant pratiquement toute la riche carrière du groupe. De 1991 à 2011, de Disincarnate au nouvel opus récemment paru chez XIII Bis Records, un large panel a été ainsi proposé... 2 titres de l'EP Cross the Threshold y compris (sorti la même année que le sublime Sublime Dementia), sorte de monument underground dont le groupe reste fier et ce à raison. Seul Planet Pandemonium, plutôt boudé à sa sortie, a été laissé de côté.
Au rayon des grosses satisfactions sonores, outre le magique moment offert par "Cross the Threshold", notons un excellent "No Tears to Share", un super efficace "Emptiness Crushes My Soul" (dont le vidéo clip, annoncé par Stéphane, s'avère être une réussite artistique assez étonnante) où le pit commence à se réveiller, un "Frozen Moments Between Life and Death" plombé à outrance et sur lequel le groupe semble être habité face à un public désormais survolté... On en passe et des meilleures.
Communication positive, choix des morceaux plus que convaincants, jeu sur scène encrin d'un professionnalisme irréprochable et servi par un bon son... Les Loudblast ne trahissent pas leur réputation, comme si le temps s'était arrêté. Ils sont revenus, nous avons vu, ils ont vaincu !
Setlist :
- Steering for Paradise
- Wisdom... (Farther On)
- Flesh
- Emptiness Crushes My Soul
- The Horror Within
- Never Endin' Blast
- No Tears to Share
- Frozen Moments Between Life and Death
- Nosce te ipsum
- Taste Me
- Sublime Dementia
- Cross the Threshold
- My Last Journey
Après une attente plutôt longue due à un changement de décor complet, les marseillais de Dagoba apparaissent enfin devant une foule d'ores et déjà prête à en découdre. Comme à l'accoutumée, c'est l'ami Franky Constanza qui ouvre les débats derrière les fûts en interpelant le public tel un speaker de stade en furie. Ce n'est que par la suite que les autres membres de Dagoba débarquent sur scène sur une introduction annonçant désormais le traditionnel "There's Blood Offshore"...
C'est en effet sur ce titre extrait du dernier album Poseidon que le groupe a pris l'habitude de démarrer son set sur la tournée du même nom. Il n'est donc pas étonnant de retrouver une setlist totalement identique au show donné au Forum de Vauréal en décembre 2010 et dont nous avions déjà parlé sur le site.
A défaut d'être surpris par l'enchainement (il faut l'avouer parfaitement efficace) des titres, nous ne pouvons que nous incliner devant cette énergie sans cesse décuplée sur scène. Car Dagoba ne fatigue jamais, ne reste jamais en place, le trio Shawter-Izakar-Werther échangeant constamment de place - de quoi donner le tournis à un public adepte au désormais traditionnel circle pit.
Cette impression de "tourner en rond" ne dérange donc guère lorsqu'on se laisse pénétrer par le son et l'ambiance globale d'un show très... chaud. Quasi irrespirable même, car sans concession et à peine ralenti par les pauses "prises de paroles" ordonnées par le combo.
A cette occasion, le chanteur n'hésitera pas à inciter les gens à une violence toute relative, car contenue et respectueuse, lançant quelques "wall of death" et haranguant les échanges plus ou moins musclés. Pogos survoltés, slams aériens... et, perdue au milieu de cette tempêtre humaine, une corsaire au grand coeur et au courage sans fin, prête à en découdre avec les mâles les plus imposants.
On peut aussi souligner l'hommage rendu à Loudblast par l'ami Franky (ou "Loup de blaste" plutôt, on pardonnera ici l'anglais très local de l'un des meilleurs batteurs français voire mondiaux), ce dernier n'hésitant pas à saluer la nouvelle vague du metal français, citant pêle-mêle quelques jeunes groupes dont nos potes de T.A.N.K. ou de Checkmate. Ca fait toujours plaisir !
Un spectacle carré tout en extériorisation donc, qui prend finalement toute son ampleur en observant le public. Car ce sont aussi les fans qui font le spectacle dans un concert de Dagoba, tout autant que le groupe dont on connait déjà les qualités professionnelles et énergétiques. Ce soir-là, les spectateurs de Cergy étaient en feu, propulsant le concert vers une dimension autre que musicale. Un vrai théâtre de violence jamais gratuite, toujours conviviale, ponctuée par le slam d'un Shawter assurant toujours ses parties chants d'un "The White Guy (and the Black Ceremony)" à l'allure de bouquet final.
On ne regrettera donc rien, si ce n'est une variation potentielle d'un ou deux titres mais bon... ne boudons pas notre plaisir, chacun des morceaux trouvant parfaitement sa place au final. Puis il est toujours agréable de pouvoir chantonner les refrains de "It's All About Time" (avec Vortex en sample) ou "The Things Within", certains nouveaux titres comme "Waves of Doom" ou "I Sea Red" se portant allègrement comme de beaux successeurs dans le genre.
Matelots et autres pirates, le Poséidon est passé, vous pouvez désormais disposer et rentrer en nage...
Setlist :
- Intro
- There's Blood Offshore
- The Man You're Not
- The Nightfall and All Its Mistakes
- Black Smokers (752° Farenheit)
- The Fall of Men
- It's All About Time
- Degree Zero
- Waves of Doom
- Livin' Dead
- I Sea Red
- Maniak
- The Things Within
- The White Guy (and the Black Ceremony)
Il ne nous reste plus qu'à remercier Dagoba et Loudblast, et de leur donner rendez-vous cet été (au Hellfest pour les premiers, au Sonisphere pour les seconds) pour de nouvelles joutes musicales. Avec le plaisir de constater que la scène metal française ne se porte pas si mal que cela... bien au contraire.
Loudblast sur La Grosse Radio
Chronique du nouvel opus Frozen Moments Between Life and Death
Dagoba sur La Grosse Radio
Chronique du dernier album Poseidon