Vendredi, 19h30 - Valley
Quelle plaisante surprise que la présence d'Envy au Hellfest! La légendaire formation de screamo, versant à présent vers un post-rock de belle facture, a droit à un créneau lui octroyant un temps de set conséquent. Le groupe japonais va, de surcroît, sortir un album très bientôt, et c'est une occasion toute trouvée pour défendre celui-ci sur les planches européennes.
C'est devant une Valley pleine à craquer que les musiciens entament le set, par une piste de leur disque à venir, Atheist's Cornea. « Footsteps in the Distance » nous plonge dans une ambiance post-rock qui s'emballe progressivement, le tout soutenu par le chant clair et les narrations de Tetsuya Fukagawa. Côté voix, par ailleurs, le frontman ne semble pas au meilleur de sa forme durant cette première piste et le chant apparaît comme étant sous-mixé. Heureusement, tant le son que le chanteur évolueront positivement dès le titre suivant, pour notre plus grand bonheur.
Et c'est à nouveau avec un titre issu d'Atheist's Cornea que les Japonais continueront le concert. « Two Isolated Souls » suit un chemin différent de sa consœur et renoue avec l'époque screamo d'Envy. Le chant crié de Tetsuya n'est pas aussi puissant qu'il y a dix ans mais reste de très belle facture tout de même, parvenant à transmettre une quantité importante d'émotions. L'accompagnement musical se montre d'ailleurs excellent et chaque membre du combo est appliqué à la tâche. La paire de guitaristes Masahiro Tobita et Manabu Nakagawa n'hésite pas à donner, dans les moments les plus énervés, quelques riffs bien véloces qui permettent aux festivaliers de secouer la tête afin de montrer une pleine adhésion au propos de la formation.
Le combo déciderait-il de jouer son nouvel album en entier? Le choix serait un peu osé, tout de même. Pourtant, deux autres titres seront interprétés : la puissante « Blue Moonlight », opener de l'offrande à venir et qui s'avère excellente sur scène, et la plus lente « Ticking Time and String », qui allie à la fois la hargne et la conviction des vocaux de Tetsuya et une ambiance plus intimiste et dépouillée au travers d'un post-rock tantôt poignant et centré sur les guitares, tantôt doux et rêveur, où il est de bon aloi de fermer les yeux et de se laisser transporter dans ce superbe voyage musical.
Un voyage, voilà la meilleure façon de décrire le set d'Envy. On se laisse aller, guidé par les musiciens qui tissent de splendides ambiances au travers de leurs instruments. Des artisans qui savent comment nous prendre aux tripes, remuer notre corde sensible et transporter à des années lumières de ce Hellfest. Le propos des Japonais est très singulier, avec une identité prononcée, qui sera parfaitement retranscrite durant ces cinquante minutes d'une rare intensité. Le bonheur de voir la formation faire un tour par d'anciens albums tels All the Footprints You've Ever Left and the Fear Expecting Ahead est la clef de voûte de ce set. « Left Hand » fait son effet et dynamise la performance, tandis que la conclusion « Farewell to Words » permet de terminer en apothéose. Un grand moment, assurément.
Le bonheur des musiciens est palpable par les sourires affichés et l'implication de ces derniers, qui n'hésitent pas à mettre une foule aux anges à contribution. L'attitude scénique du vocaliste interpellera sûrement plus d'un festivalier, tant celui-ci semble dans un autre monde et complètement happé par sa propre musique. En plus d'assurer derrière le micro, Tetsuya passera parfois derrière le clavier. Un frontman polyvalent, en somme.
Voir les musiciens lâcher leurs instruments à la fin du set est un réel déchirement, tant le temps semble s'être arrêté sous la Valley. L'atmosphère était hypnotique, chaleureuse, et rarement une telle intensité n'aura été atteinte durant cette édition du Hellfest. Envy repart sous les ovations du public, après avoir donné l'une des performances les plus intenses de ce week-end. Un grand moment, sans l'ombre d'un doute.
Setlist :
Footsteps in the Distance
Two Isolated Souls
Worn Heels and the Hands We Hold
Scene
Blue Moonlight
Left Hand
A Warm Room
Ticking Time and String
Farewell to Words
Photos : © 2015 Thomas Orlanth
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