En seulement quelques années, Stream of Passion, combo formé aux Pays-Bas avec une chanteuse en provenance du Mexique, ex-vocaliste d'Elfonia, gagne en popularité et grossit très rapidement. Il faut dire que la présence du maître à penser d'Ayreon, Ambeon, Star One, Guilt Machine et autres projets, le grand Arjen Lucassen, n'y est pas étranger, et que le premier opus, Embrace the Storm, promettait un bien belle avenir pour le groupe, enfin, avec qu'un sombre élément n'arrive …
Car Arjen, un jour, abandonna le navire, le laissant sans capitaine à bord. Ne voulant pas laisser mourir ce projet, Marcela Bovio, en charge du gouvernail, fit à une seconde offrande voir le jour, sous le nom de The Flame Within. Et le moins qu'on puisse dire, c'est que l'album provoqua une division énorme chez les fans, certains accusant le combo de tomber dans la facilité, de plagier Evanescence, tandis que d'autres furent charmés par les belles cordes vocales de la sirène. Ne baissant pas les bras, voici le 23 Juin 2011 une nouvelle galette sur le label Napalm Records, celle-ci s'intitulant Darker Days. Nouveau moyen de division, ou tentative de conciliation ? Tant de mystères autour de la sortie de cet opus.
Bonne nouvelle pour les fans de la nouvelle ère du groupe néerlandais, Stream of Passion continue dans sa lancée en proposant encore une fois un album œuvrant dans le metal symphonique, dans ce registre assez classique et embourbé où les groupes ont du mal à se démarquer les uns des autres, faute à une surpopulation et à quelques combo dont la qualité principale n'est pas la créativité. Sauf que ce défaut, il est difficile de pouvoir en parler chez notre sextette qui livre sur ce Darker Days une prestation tout à fait honorable, où les guitares, auparavant reléguées au second plan, se taillent la part du lion, en imposant de puissants riffs, qui pourront plaire aux amateurs du style. Pas de doute, si l'on compare à l'album d'avant, le groupe vient de prendre une direction plus agressive avec des compositions beaucoup plus incisives, une très sage décision, d'autant que dès à présent, les refrains sont d'une efficacité telle qu'ils permettent même un petit headbang, et il n'est pas difficile d'imaginer quel effet ils pourront produire une fois interprétés sur scène. Ce tournant s'accompagne également d'un léger retour aux premières racines de la formation, c'est à dire à l'époque Lucassen, avec des petits passages un peu plus progressifs marqués par des changements de rythme somme toute étant les bienvenus, avec véritablement une volonté de bien faire et un professionnalisme qui font chaud au cœur.
Par ailleurs, le groupe n'en n'oublie pas la douceur, ni même les origines de sa chanteuse, la magnifique Marcela Bovio, et au grand plaisir d'un bon nombre d'auditeurs, c'est le retour en grande pompe du violon, si bien exploité par le combo, soutenant la mélodie avec une pointe de mélancolie ou de joie, c'est selon l'air et le rythme, mais surtout, la mexicaine s'est remise à l'espagnol, une langue sonnant si naturelle qu'elle octroie encore plus de charme et de sensibilité à la musique, surtout lors des passages les plus calmes, lorsque la déferlante guitaristique est passée, des points qui font encore une fois tout le charme et donnent de l'allure à cette formation possédant de vrais atouts dans ce milieu à la rude concurrence. Seulement, l'opus n'est pas exempt de quelques reproches, à commencer premièrement par un certain manque d'originalité malgré les petits points exotiques utilisés certes à bon escient, donnant une part d'identité aux six compères, mais ne faisant pas tout, quand même. Et puis, il faut dire que ce brûlot possède un petit ventre mou vers le milieu de l'album, deux-trois titres qui, s'ils sont certes bons, retiennent beaucoup moins l'attention, un mal pour un bien car malgré cela, on retrouve aussi de vrais bijoux, probablement même les meilleurs titres que le groupe n'est jamais composé, et ce même à la période d'or, c'est à dire celle d'Embrace the Storm, regretté par une partie des adeptes du groupe de la ravissante mexicaine.
La jeune femme qui, d'ailleurs, n'a jamais fait autant preuve de grâce et d'émotion que lors de cette galette qu'elle embellit de sa voix cristalline qui fait des ravages, absolument séduisante, capable de prendre diverses facettes. Qu'elle soit chaude, intimiste, éthérée, aérienne, agressive, c'est tel le caméléon que la frontwoman évolue, capable de s'adapter en n'importe quelle circonstance, avec un sens mélodique assez imparable, et son timbre si reconnaissable fait des miracles, insufflant des sensations à tout moment, surtout lorsqu'elle chante en espagnol, langue qui sied à merveille à la musique. Mais en plus d'être une chanteuse charismatique et pleine de charme, notre demoiselle est également une très bonne violoniste, ce qu'elle s'évertue ici à prouver avec quelques mesures bien placées, redonnant une certaine touche de vitalité, toujours avec autant d'habileté, ne laissant nullement insensible, son usage ne tombant fort heureusement en aucun cas dans la niaiserie totale, même sur les ballades qui pourtant auraient pu entrainer le délicat instrument vers ces rivages ténébreux. Si parfois la voix de Marcela pouvait lasser car trop mise en avant sur l'opus qui précédait, ici, aucun risque d'en faire une indigestion, car elle est l'égale des autres musiciens, d'autant que la production, excellente au demeurant, lui laisse un espace d'expression conséquent mais ne dévorant pas celui des autres.
A l'approche des titres, on peut craindre de tomber dans ce qu'il y a de plus banal dans le monde du symphonique. Il n'en est rien, et cette fois-ci, le groupe réussit à concocter des pistes à la qualité qui impose le respect, à commencer par les titres les plus solides garnissant cet opus. Les 4 premières, à savoir de « Lost » jusqu'à « The Scarlet Mark » sont des hymnes en puissance et ouvrent le brûlot de la meilleure manière qui soit, avec beaucoup de diversité, de l'efficacité à toute épreuve, les quelques notes de cet entêtant violon, la langue natale de Marcela Bovio, des refrains envoûtants, une technique à la pointe, bref, des vrais hymnes qui ne demandent qu'à être écoutés, encore et encore, jusqu'à charmer entièrement. D'autres sont un peu plus classiques, mais toujours dynamiques et ne déméritant pas, « Closer » est captivante, avec une chanteuse qui accomplit sur cette pièce un travail exquis, et « Our Cause » n'est pas du tout vide d'intérêt, bien au contraire, renforçant encore l'attrait de l'opus. Seulement, les ballades que sont « Spark » et « Nadie Lo Ve » n'ont pas vraiment de saveur particulière, si ce n'est que de faire profiter de la belle performance de la chanteuse, qui, décidément, n'est pas là pour faire de la figuration. Et puis, il y a des morceaux qui, eux, n'arrivent pas tant à la cheville, et ne sont surtout là que pour combler le besoin d'avoir 13 pistes, et là, on pensera inévitablement à l'éponyme « Darker Days », trop banale, ou à « The Mirror ». Sauf que dans ce nouvel album se trouve une pièce maîtresse, et comme le dit si bien l'expression, il faut réserver le meilleur pour la fin, ce que prouve la sublime « The World is Ours », morceau pilier du metal symphonique, un hymne, l'un des morceaux de l'année sans aucun doute possible. Refrain magique, voix féminine à couper le souffle, des guitares puissantes et incisives qui envoient ce titre dans une autre dimension, tout simplement fantastique.
Pas de doute, voilà encore une belle réussite made in Netherlands. Avec un Darker Days de grande classe, Stream of Passion s'impose comme l'un des meilleurs groupes de metal symphonique à tendances heavy et progressives, en livrant un opus de qualité, avec une frontwoman vraiment unique, livrant un travail monumental, qui, s'il ne brille pas toujours pas son originalité, conserve ce charme tout à fait typique à la formation qui affiche de belles lettres de noblesse, et pourrait bien faire vraiment très peur aux ténors. Il faudra maintenant que les autres combo du genre réussissent à faire mieux, mais la barre vient d'être placée très haute.
Site officiel de Stream of Passion