Rock Hard Tent – Vendredi 17 juin 2011 – 19h20
« Jeszcze polska nie zginÄ™Š‚a kiedy my Š¼yjemy ! »
Tel est le début d'un hymne national qui clame que la Pologne n'est pas encore tombée, tant que les polonais vivront et se raccrocheront à ce qu'ils ont de plus cher : leurs tripes !
Ce que la Pologne a produit de meilleur ? Je sais que vous avez déjà des réponses !
En tout cas Vader est présent ce soir là, sur la scène du Hellfest, avec un line-up qui ne ressemble en rien à ses débuts, mais Piotr est toujous là, détendu, et ne réalise pas quel impact il aura sur les personnes présentes. La Rock Hard Tent est trop petite pour accueillir les gens qui veulent voir ce groupe monumental, et pourtant il y aura de la place pour tout le monde. En fait, Vader c'est comme une institution en Pologne, rappelons que le dernier opus « Necropolis » est classé 5ème dans les charts polonais ! Mais le plus important c'est l'impact que le groupe a sur nous, et ce qui restera mémorable pour moi, c'est ce que j'ai vu dans les visages, certes complètement saouls, ce soir là. C'est l'image d'une fraternité, d'une émotion qui vibre à l'unisson, que dis-je ? les visages sont là mais les esprits sont transportés.
Dans ces visages, je revois le produit d'une Pologne déchirée. Je revois ses enfants qui ont grandi dans la pauvreté et la puanteur des cheminées d'usines de Silésie. Dans ces yeux vitreux, je me revois. Nourris avec ce qu'il restait dans les magasins pendant l'état de guerre, à savoir du vinaigre et du saindoux, ne croyez pas que ces enfants des quartiers, qui jouaient dans les bacs à sable pendant ce temps là, ne se souviennent guère de ce que leur pays a enduré.
Aussi longtemps que je me rappelle, Vader a surgi des profondeurs justement à ce moment là. Je commence à peine à grandir et déjà j'entends les grands frères de mes camarades de classe évoquer le groupe de Piotr Wiwczarek. Les premières cassettes circulent, les esprits se rencontrent, les émotions aussi... Une grande fierté mêlée à un profond chagrin. Je sens à cet instant que la musique jouera une part très importante dans ma vie.
Un sentiment que j'ai retrouvé au Hellfest en ce jour. Un retour en arrière impensable et nécessaire pour avancer, se rappeler de son identité et de ses frères. Je vois mon reflet dans les yeux de mes compatriotes, la musique de Vader me ramène à moi. C'est terrifiant.
Une forte proportion de polonais expatriés, soit pour toujours soit pour l'occasion, sont là. Mais tous les gens, sans exception, sont transportés. Non seulement parce qu'ils ignorent ce que Vader leur réserve ce soir, et pour cause, le concert a été une succession de bonnes choses, mais également parce qu'ils attendent le meilleur de ce show qui ne durera finalement qu'une petite heure. Mais dans ce court laps de temps, les personnes présentes sont venues célébrer plus que le meilleur du death, elles sont venues célébrer leur propre identité.
En effet, chacun se reconnaît dans la musique de Vader, qu'il l'ait découverte tardivement, avec « Wings », voire avec « Rise of the Undead », qui seront joués ce soir là, ou avec des titres extraits des premiers albums comme « Sothis » à l'annonce duquel je faillis m'évanouir.
Alors je m'élance dans le pit, et déjà je regrette mon geste. Le pit a une intensité extrême, bien plus que lors des précédentes apparitions de Vader à ce festival. Je n'ai jamais rien vu de tel.
Le groupe réalise probablement une prestation parfaite, comme à son habitude, et le maître de cérémonie a gagné, au fil des années, une voix extraordinaire, profonde et vibrante. Je l'aperçois à peine depuis la fosse, comme un père qui ouvre les bras et nous réunit et je vois aussi que le reste du combo, PajÄ…k (ce qui signifie « araignée ») en particulier, se donne à fond et commence à réaliser ce qui se passe dans la salle. D'ailleurs, le duo PajÄ…k et Hal, à la basse, fonctionne à merveille. Ils prennent tous les deux leur pied et échangent fréquemment, comme des jazzmen en improvisation.
Mais pour les menus détails du concert, les lumières ou le jeu de scène, je ne peux hélas en dire plus car peu importe ! puisque j'étais dans une autre époque, une autre dimension, et je suais à grosses gouttes sur « Shadowfear » !
Vader a célébré avec nous pratiquement 30 ans de Death Metal ! Piotr nous annonce que le voyage n'est pas terminé parce qu'un nouvel album est déjà prêt pour le mois d'août, qui s'intitulera Welcome to The Morbid Reich dont ils interprètent un extrait.
Mais me direz vous, « Morbid Reich » est le titre d'une démo à leurs débuts ! Je réponds oui et j'espère en savoir un peu plus sur ce retour aux sources dans une interview très prochainement.
Après avoir largement célébré les 15 ans de leur album « De Profundis », qui reste incontestablement mon album préféré de tous les temps, cela ne m'étonnerait pas que les polonais ressentent une certaine nostalgie de leurs débuts... Ou peut être est-ce une volonté de se démarquer de certains groupes comme Metallica, avec lequel Vader a partagé l'affiche en 2004 ? Je crois aussi que la reprise de « Reign in Blood » dont les premiers coups de batterie ont résonné sous la tente comme des fouets de Belzébuth est une preuve de leur appartenance à l'underground. En tout cas l'exécution du morceau a mis tout le monde à terre et j'entends les survivants dire autour de moi : « Je crois que je préfère cette version à l'originale ! »
Piotr se présente souvent comme un guide dans certaines paroles et j'ai hâte de vous voir partager avec moi ce moment car je suis très heureuse que vous ayez répondu présents à son très célèbre « Rise to join your father ! ».
Katarzyna Stolichnaya