Furie et soufflerie
Le death metal a pris bien des directions depuis sa création dans les années 80. Tantôt brutal, progressif ou même mélodique, ce qui était autrefois une niche du metal extrême a engendré diverses ramifications. Cependant, un trio s'est érigé en digne gardien du temple : Krisiun. Après neuf albums et quelques changements, le groupe continue de faire du death metal pur et organique, de quoi ravir les fans les plus déterminés.
Le talent peut prendre plusieurs formes différentes. Certains artistes aiment l'exprimer de manière alambiquée et se complaisent à exposer la profondeur de leur œuvre en complexifiant le propos. Mais d'autres, par humilité ou simplement par goût, vont à l'essentiel et présentent une œuvre simple au final, mais transcendée par une inspiration toujours présente et une volonté d'acier.
Krisiun fait partie de la seconde catégorie. Les trois frangins brésiliens n'ont aucun mal à faire paraître leur death metal simple, du moins au premier abord. Une guitare, une basse, une batterie, une voix caverneuse et c'est parti pour neuf morceaux directs et destructeurs, sans trop-plein d'effets ni artifice abscons qui irait ternir le propos.
Avec Forged in Fury, les frères Kolesne ne prétendent pas réinventer le genre. On a toujours affaire à du death metal pur et dur, avec une volonté destructrice toujours aussi présente. Pour cela, le groupe a compris qu'il n'avait pas besoin de mettre constamment le pied au plancher et s'éclate à varier le propos à travers les différents titres.
Ainsi, les variations de rythme dans "Scars of the Hatred" prennent tout leur sens, comme les ralentissements salvateurs de "Ways of Barbarism", titre soutenu par une basse présente et vicieuse. On respire aussi avec un titre comme "Soulless Impaler", qui s'installe petit à petit avant de balancer la purée. Mais que les fans de gros death des familles calment leurs craintes, "Dogma of Submission" et "Strength Forged in Fury" accélèrent le tempo bien comme il faut.
Aidé par une production assez rugueuse pour laisser aux musiciens exprimer leur rage, Krisiun arrive donc à varier son propos en proposant des morceaux différents, aussi bien dans les ambiances que dans les riffs utilisés. Avec un souci de cohérence d'écriture toujours présent, les trois frères, talentueux, mais humbles, montrent qu'on peut faire du neuf avec du classique, de la rage avec de la lenteur et de la classe avec de la colère.
La forge brûle donc de plus belle.