La fable de la poutine et de la gauffre
Annihilator revient sur le devant de la scène, avec tout plein de changements pour son 15e album. Suicide Society, avec le leader Jeff Waters qui reprend le chant 18 ans après avoir laissé le micro. Si de bonnes idées sont toujours là, l'ensemble froid laisse un album en demi-teinte, pas foncièrement mauvais, mais clairement en-deçà de ce qu'on est en droit d'attendre de la part d'un tel groupe.
Certains signes ne trompent pas. On a beau essayer de se libérer de tout a priori, certains changements amènent de mauvais souvenirs. Inexorablement, le retour de Jeff Waters au chant rappelle la douloureuse période d'errance d'Annihilator, représentée par Refresh the Demon et Remains, qui sont loin d'égaler les grands disques du groupe Les mauvaises langues diront qu'on oublie la qualité de King of the Kill, mais cela reste deux albums contre un.
Pourtant, Suicide Society n'est pas un naufrage complet. Certains titres remuent même joyeusement, comme le dansant "Break, Enter". On peut même se surprendre à headbanguer pendant "Death Scent", si on n'est pas difficile. Mais il faut se rendre à l'évidence, l'inspiration n'est pas assez forte. "Suicide Society" est poussive, "My Revenge" rappelle trop Metallica (réécoutez Master of Puppets jusqu'au bout) et "Creepin' Again" a un arrière-goût d'auto-parodie.
Il serait trop facile d'en vouloir à Jeff et son chant. Certes, le guitariste est limité vocalement. Il est le premier à le reconnaître. Cependant, son interprétation de la folie colle parfaitement à l'identité du groupe, sur lequel il a le contrôle total. Son côté fun a même un certain charme et pourra faire sourire l'auditeur à plusieurs reprises, avant qu'il ne se dise que Dave Padden aurait pu faire des merveilles sur "Snap".
Le souci vient avant tout des compos. Pas forcément mauvaises, elles sont affreusement moyennes. L'ensemble ne marque pas et manque cruellement de relief, malgré la présence de bonnes idées, comme une ligne de basse groovy sur "Snap", un bon riff typique d'Annihilator sur "Narcotic Avenue" ou encore des arpèges sympathiques sur "The One you Serve". Ces bons éléments accentuent la déception.
Suicide Society aurait pu être prometteur s'il n'avait pas été pondu par un groupe-phare tel qu'Annihilator. A la carrière riche et variée, le groupe a su se réinventer et faire fi des multiples changements de line-up. Malheureusement, ce disque est dans le camp des faibles. S'il n'est pas le plus mauvais, le manque de mordant et d'envie dans l'ensemble aura bien du mal à convaincre les fans les plus fervents.