En pleine promotion de Coma Ecliptic, leur dernier album sorti en début d’été, les Américains de Between the Buried and Me étaient de passage à Paris le 25 septembre dernier, à la Maroquinerie. Le groupe de metal progressif, l’un des plus doué de sa génération, investissait cette salle pour la troisième fois de sa carrière, après deux passages remarqués en 2011 et 2012. Cette fois-ci, c’était Haken, un autre talentueux représentant de cette scène progressive, qui était convié à ouvrir pour les Américains. La jeune génération a ainsi pu prouver que le style est toujours florissant en 2015 et a permis à tous les présents de passer une excellente soirée. Retour sur l'un des meilleurs concerts de l'année.
Haken
Après un passage décevant au dernier Hellfest, en raison de problèmes de sons involontaires, les Britanniques d’Haken revenaient poser leurs valises en France. Alors que leur dernier EP, Restoration, vient d’être réédité en CD (la première édition ne proposait qu’un pressage vinyle), c’est tout naturellement sur leur carrière récente qu’Haken a souhaité mettre l’accent au cours des 45 minutes de jeu qui leur étaient accordées. Trois quart d’heure, c’est cependant très court lorsque l’on officie dans un style où les titres prennent tout le temps de se développer, mais Charlie Griffith et ses acolytes ont su proposer un set équilibré. C’est l’instrumental « Premonition » (Visions, 2011) qui démarre cette première partie. Rapidement, les musiciens trouvent leurs marques et le son, excellent cette fois-ci, permet de faire oublier la prestation en demi-teinte du Hellfest.
Lorsque Ross Jennings (chant) entre en scène, c’est pour mettre The Mountain à l’honneur. Cet album s’impose sur scène comme un pilier de leur discographie, à la fois terriblement groovy (les plans de basses de Conner Green n’y sont pas étrangers) mais également très mélodique. Le public ne s’y trompe pas et réserve un accueil très chaleureux au groupe, ce qui semble plaire à Richard Henshall (guitare), tout sourire.
Alors qu’Haken avait déjà été très bien accueilli par le public parisien un an auparavant à la Boule Noire, l’audience semble encore plus réceptive à la musique des Anglais, battant des mains et chantant même les parties en canon de « Cockroach King ». Ce dernier titre s’impose d’ailleurs comme un titre classique du progressif, empruntant à la génération des années 70 (Gentle Giant en tête), sans oublier de représenter la personnalité du combo britannique.
Ne reculant devant rien, et malgré le temps de jeu restreint, les musiciens se lancent dans l’interprétation de « Crystallised », pièce épique d’une vingtaine de minutes issue de Restoration. L’interprétation est une fois de plus sans faille, malgré les plans techniques inhérents au genre pratiqué. Ces quarante-cinq minutes de jeu ont permis de rapprocher une nouvelle fois le public parisien et la formation de metal progressive, qui s’impose comme la révélation de ces dernières années.
Setlist Haken :
Premonition
In Memoriam
Pareidolia
Cockroach King
Crystallised
Between the Buried and Me
Il est toujours délicat pour une tête d’affiche de monter sur scène lorsque le groupe de première partie a su fédérer le public. Mais dans le cas de Between the Buried and Me, dès les premières notes de "Selkies : The Endless Obsession", le doute est levé sur la capacité du combo à se surpasser. Le public est acquis à la cause des Américains et leur fait savoir.
Sur scène, Tommy Rodgers entraîne la foule, passant aisément du chant clair aux vocaux death les plus dévastateurs, tout en assurant également des parties de claviers complexes. Coma Ecliptic, le dernier opus du groupe, est également le mieux représenté dans la setlist, par trois titres. "The Coma Machine" passe très bien l’étape du live, malgré la technicité des plans de guitares de Paul Waggoner et de Dustie Waring.
Les deux six-cordistes s’en sortent à merveille, mais restent cependant particulièrement concentrés, laissant au leader le soin de communiquer avec le public.
Il n’y a aucun doute, nous sommes bien en présence d’un groupe de metal progressif qui, piochant dans sa récente discographie (à l’exception de The Great Misdirect, pourtant apprécié des fans) ne joue que huit titres au long des 80 minutes de concert). Mais les compositions interprétées sur scène font mouche, comme "Lay Your Ghosts to Rest" ou "Ants of the Sky", issues respectivement de Parallax II et Colors.
Dan Briggs (basse) survole l’ensemble en déployant un groove insolent, qui se marie à merveille avec les plans de batterie de Blake Richardson. Le line-up actuel, en place depuis plus de dix ans, fait preuve d’une réelle cohésion, ce qui renforce les excellentes impressions laissées par les efforts studios de BTBAM.
Ingéniosité, richesse harmonique et rythmique ou encore audace sont les mots qui viennent à l’écoute de la musique du combo (« Memory Palace »). De plus, scéniquement, les musiciens (et en particulier Tommy Rodgers) font preuve de charisme, en dépit de leur jeune âge. Le set passe à une vitesse folle, sans temps mort et c’est déjà l’heure du rappel. Et pour achever l’audience, rien de tel que le titre le plus apprécié des fans, l’immense "White Walls". Ce titre concentre à lui seul tous les ingrédients qui font partie de l’identité de Between the Buried and Me. Et le public plébiscite une fois de plus le groupe sur ce morceau, hurlant en chœur avec Tommy Rodgers et applaudissant à tout rompre à la fin du concert.
Cette soirée à la Maroquinerie aura fait forte impression sur le public car elle aura permis d’apprécier deux formations à la personnalité bien marquée. Haken et BTBAM oeuvrent tous les deux dans un courant progressif, mais savent se libérer des codes du genre pour en réinventer d’autres et proposer une musique personnelle. L’apanage des grands artistes en somme…
Setlist Between the Buried and Me
Selkies : The Endless Obsession
The Coma Machine
Astral Body
Lay Your Ghosts to Rest
Memory Palace
Famine Wolf
Ants of the Sky
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White Walls
Merci à Roger Wessier de Replica
Photographies : © 2015 Arnaud Dionisio/ Ananta
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