Cadre idyllique que représente le théâtre Femina de Bordeaux pour le passage du maître Satriani. Plus habitués aux artistes de music-hall ou de ballets, pas vraiment conçus pour accueillir les gros riffs et solos endiablés, ce théâtre de 1921 et sa coupole peinte valent tout de même le coup d’œil. La séance est déjà commencée lorsque vos serviteurs montent les marches qui mènent à l'étroite salle d'entrée, et la musique qui résonne depuis la rue met déjà en appétit.
Markus James
Comment décrire la musique de Markus James ? Blues énergique minimaliste serait un bon résumé. Ce guitariste Américain adepte de la simplicité et des mélanges tortueux représente une mise en bouche étonnante. La salle est plus que remplie et suit avec attention le duo présent sur scène. Blues, Jazz, Rock, musique Africaine, Country, on s'y perd tellement les influences sont mélangées.
Accompagné d'un seul batteur faisant office de boîte à rythme de luxe (comme les concerts du guitariste Miyavi), Markus James nous envoie donc des titres choisis pour plaire aux fans de hard rock, sans jamais s'approcher du style proprement dit. Ses compositions tournent souvent autour d'un seul riff groovy agrémenté de chant typé vieille radio, de breaks de batterie, d'harmonica, de solos aux effets bizarres, et de la participation du public. Ses guitares sont posées à même le sol, au pied de l'ampli qui est dédié à chacune d'elle. Le son est étonnamment massif pour le lieu, avec une duo grosse caisse / caisse claire très présent. Une basse saturée aurait eu parfaitement sa place cela dit.
Sur scène, tout le monde s'éclate. Le batteur a la banane même si son jeu, lui, ne plaisante pas. Markus échange avec son public entre chaque morceau, racontant une petite histoire, ou présentant ses vieilles guitares des années 60. Le public participe sans problème, visiblement conquis par le show intimiste, accentué par un éclairage bleu fixe très faible. Après 40 minutes et quelques mots en français, les deux musiciens sortent de scène sous les applaudissements d'un public Bordelais assis, mais tout de même en forme.
Setlist:
Crickets
Suit of Golden Clothes
Just Say Yes
See That my Grave
Banjo
Nomo
Hellhound
Shake
Wicked World
Joe Satriani
Une soucoupe volante s'est posée sur Bordeaux ! Venu de sa lointaine galaxie (mais avec ses guitares Ibanez bien sûr), Joe Satriani débarque donc avec son super groupe composé de Marco Minnemann (batterie), Bryan Beller (basse) et Mike Keneally (guitare et claviers). En attendant leur arrivée (et sur 'Whole Lotta Love' de Led Zeppelin, s'il vous plait !), petit tour de scène : batterie et claviers sur-élevés, amplis basse et guitare en fond de scène, retours et pédaliers en avant scène, rien de très extravagant à première vue. Sauf que lorsque les lumières s'éteignent, le mur en fond de scène se trouve être un écran géant pour les différentes vidéos prévues pendant le concert.
La vidéo d'introduction nous transporte dans un univers cartoon abstrait assez sympathique, faisant monter la pression avant l'arrivée des musiciens. 'Shockwave Supernova' démarre le concert en trombe, la pochette du dernier album servant de décor vidéo. Sans concession, le son est excellent, très puissant, et ne met pas forcément la guitare de Joe devant tout le monde. La réverbération naturelle du théâtre retire un peu de lourdeur mais étant inévitable, le phénomène reste bien géré.
Tout le monde a l'air content d'être là. Joe bien sûr, mais le reste de la troupe compte bien se faire entendre. Même si chacun reste plus ou moins dans son coin, la cohérence du groupe formé par les quatre musicien est indéniable. Bryan Beller, plutôt statique devant ses amplis, relève les compositions grâce à son son de basse granuleux à souhait. Mike Keneally est impressionnant de par sa présence sonore, soit derrière ses claviers (qui restent une plus-value très intéressante) soit au centre de la scène avec ses guitares. Et sur ce point, Mike n'a pas à rougir face à la technique de Joe, prenant quelques solos à sa charge sans aucun soucis. Reste Marco Minnemann, véritable monstre derrière sa batterie. Rares sont les batteurs à apporter autant de relief dans un concert, ses interventions étant toujours justes et précises.
Hey Joe !
Reste la star de la soirée, Joe Satriani dans son style habituel, guitares multi-colores et lunettes de soleil (pour les lunettes, on peut le comprendre, le show lumineux étant magnifique). Satch nous transporte dans son univers sans fausse note, aidé par son nouvel album à peine sorti. Huit morceaux sur les 22 joués ce soir-là en sont tirés, et passent l'épreuve du live sans trop de problème. Le combo 'Butterfly and Zebra' suivi de 'If There Is No Heaven' comme sur l'album étant une transition toute trouvée, 'Crazy Joe' et son départ à la sauce Reggae reste amusante, et la pièce 'Goodbye Supernova' accompagnée de violons et d'images stellaires envoie le public Bordelais dans une autre dimension.
Les anciens titres ne sont pas oubliés : 'Crystal Planet' reste un bonheur à entendre en live, revisitée pour l'occasion, avec de nombreux changements de rythmes bienvenus, 'Time' et son groove dévastateur, ainsi que 'On Peregrine Wings', mettant la basse à l'honneur. 'Crowd Chant' aurait été la bienvenue, taillée pour jouer avec le public, mais ne sera pas jouée malheureusement. Quelques longueurs se font sentir par endroit comme sur 'Not of This Earth' malgré un fond vidéo planant, ou 'Always With Me, Always With You' qui même si la batterie tente de compenser par un groove plutôt original, trouve un peu de mal à décoller.
Quand Joe a faim...
Gros point fort du concert, chaque musicien fait plus que le travail nécessaire, même si une seule poursuite lumineuse étant disponible ce soir là. Joe reste la plupart du temps dans la lumière, au détriment de ses petits camarades trop souvent dans le noir. Mais heureusement, les temps forts à plusieurs sont nombreux, et donc l'occasion pour chacun de développer ses talents pour notre plus grand plaisir. Les nombreuses batailles à deux, trois voire quatre instruments regorgent de bonnes idées, techniques évidemment, mais toujours mélodiques. Un solo de batterie viendra s'inviter à la suite de 'All My Life', court, intense et (c'est très rare) intéressant !
'Satch Boogie' termine le set, et la petite troupe quitte la scène sous les applaudissements d'une foule envoûtée. Les rappels ne se font pas attendre avec 'The Extremist' (où Joe s'accompagne à l'harmonica), 'Surfing with the Alien' et son clip vidéo projeté, pour terminer sur 'Summer Song' et son final monumental, dernière bataille à l'unisson pour Joe, Mike (à la guitare) et Bryan. La salle entière se lève, saluant le départ d'un groupe qui aura parfaitement réussi son pari.
La cohérence du groupe autour de Joe est indéniable. Là où ses compositions mettent en avant une guitare soliste, les concerts permettent d'aller plus loin en développant l'aspect groupe, aspect qui pourrait manquer sur album pour certains. Le public sort groggy du théâtre Femina, et attendra avec impatience le retour du vaisseau spatial de Joe, pour de nouveaux voyages...
Setlist:
Shockwave Supernova
Flying in a Blue Dream
Ice 9
Crystal Planet
Not of This Earth
On Peregrine Wings
Friends
Time
If I Could Fly
Butterfly and Zebra
If There Is No Heaven
Cataclysmic
Crazy Joey
All of My Life
Luminous Flesh Giants
Always With Me, Always With You
God Is Crying
Goodbye Supernova
Satch Boogie
-----
The Extremist
Surfing With the Alien
Summer Song
Crédit photos: Draksmoon - Julie Warnier (utilisation interdite sans accord du photographe).