Dream Theater – A Dramatic Turn of Events

Inutile de présenter ce groupe mythique de Metal Progressif qu'est Dream Theater ("DT" n'est-il pas l'une des définitions de "prog" dans le nouveau petit Larousse ?)

Par contre, il semble judicieux de rappeler qu'il y a de cela quasiment un an jour pour jour, le groupe connût la pire crise de son histoire : Mike Portnoy, membre fondateur, déclara sa volonté de mettre fin à l'aventure de vingt-cinq ans qui le liait à "son" groupe. Horreur et stupéfaction chez les fans du monde entier ; augmentation du taux de suicide, perte progressive de tous les sens chez l'homme et l'animal, réapparition et propagation de la peste ; le traumatisme engendré chez les fans est indescriptible et le marché du disque a bien failli ne jamais s'en relever (si si, on peut vous l'assurer).

"La fin d'une période" comme l'ont dit certains, et à juste titre. Car nous pouvons  aujourd'hui bel et bien l'affirmer ; le Dream Theater au sein duquel Portnoy jouait un rôle majeur n'est plus. Le remplacement de Mike (Portnoy) par… Mike (Mangini !) en laissa plus d'un sceptique, car même si la réputation et le talent du bonhomme (Mike, enfin, Mike 2, euh.. Mangini !) n'est plus à faire, nous étions en droit de nous demander comment son intégration au sein d'un groupe aussi complexe que Dream Theater allait bien pouvoir se dérouler.

Et plus encore, la grande question qui nous anime tous (oui, il fait chaud, la rédaction s'enflamme !) est de savoir si cette alchimie unique que l'on retrouvait dans les compositions du groupe serait encore présente malgré ce bouleversement. Que de questions, n'est-ce pas ? Il était donc normal que l'on puisse vous apporter une réponse à tout cela grâce à l'écoute de ce nouvel album, au titre énigmatique et néanmoins accrocheur A Dramatic Turn of Events (oh yeah). Mais ne vous fiez pas à vos convictions ; comme le dit le vieil adage, "un titre en cache un autre"...

Notez qu'à ce propos, Sa Sainteté Jordan Rudess nous a accordé il y a quelques jours à peine (à l'occasion de la sortie de l'album) une interview bien sympathique, lors de laquelle il nous amène de nombreux éléments de réponse quand à cet album dont l'explication de ce fameux titre.
Aussi, "Jordan, si tu nous lis, un grand merci".

Après de nombreuses écoutes, nous pouvons enfin nous risquer à donner un avis unanime sur cet album : une véritable bombe (admirez la prise de risques dont nous faisons preuve!) !

Du très grand Dream Theater, qui n'est pas sans nous rappeler les disques de leurs "débuts" (nous y reviendrons), et en élargissant un peu, un subtil mélange entre vieux titres et d'autres plus récents notamment en ce qui concerne les arrangements !

En effet, les structures des morceaux ne sont pas sans rappeler l'un des chefs d'oeuvre du groupe, Images And Words (1992). A ce propos, je vous inviterai à lire pour une analyse plus détaillée des similitudes entre ces deux albums la note qu'apporte Thiago Campos, guitariste du groupe Bad Salad (à qui l'on doit maintes brillantes reprises de Dream Theater), approuvée par Mike Portnoy himself… Vous pouvez la trouver sur son Facebook !).

Avec deux morceaux sur huit en dessous des.. 6 minutes 57 secondes, cet album se veut donc être résolument de tradition "prog", mais la longueur des morceaux n'est pas rédibitoire. Un juste équilibre a été apporté aux compositions, afin que l'auditeur ne puisse pas s'ennuyer ; celles-ci ont visiblement été soignées un maximum afin d'éviter les redondances qui nuisent tellement à nombre de groupes de cette "sphère".
 


Aussi, le "single" (si l'on peut le désigner ainsi) "On The Back Of Angels" que nous avons d'ores et déjà pu découvrir un peu partout sur le net depuis un bout de temps (ainsi qu'en live vu qu'il fut joué lors du "leg (f)estivalier" de Dream Theater) aura laissé perplexe bon nombre de fans, contenant du "bon" et du "moins bon" ; j'entends par là qu'il obéit à la "logique" Dream-Theaterienne mais qu'il s'adresse néanmoins à un public proche de celui qui a pu être attiré par les derniers albums, plus "symphonique", plus "rentre dedans" également (ah ce bon vieux Petrucci !)…

Vient s'ajouter par la suite un "Build Me Up, Break Me Down" sur lequel un James Labrie modulant sa voix s'exprimera, interloquant de ce fait pas mal de monde. Le refrain est facile à retenir et suffisamment redondant, l'instrumental bien lourd et pesant, bref pas de réelle prise de risque pour le moment (et, au risque de me répéter, un Petrucci omniprésent et magistral). Que dire de la batterie pour le moment, mis à part qu'elle semble plus "simpliste" qu'auparavant ; mais cela reste normal quand on sait que Mangini n'a pas pris part à l'enregistrement de l'album.. Après tout, laissons-lui le temps de s'intégrer pleinement au processus de composition du groupe avant de libérer toute sa folie !
 


"Lost Not Forgotten" nous rappellera dès les premières notes "Under a Glass Moon", à l'exception faite d'un Labrie décidément très en forme pour le moment. L'occasion de souligner le travail formidable accompli par John Myung, sacré roi de la basse depuis pas mal de temps ! Un instrument parfaitement maîtrisé dans cet album, et parfaitement intégré au niveau du mix ; un dosage savamment orchestré qui nous permet d'admirer le boulot de qualité du bonhomme.

"This Is The Life" est la première véritable occasion de prendre réellement conscience du travail plus qu'admirable de Jordan Rudess dans la composition de cet album, véritable maître des claviers dont le travail, décrié ces derniers temps par certains des admirateurs du groupe (essentiellement en raison d'instruments jugés trop expérimentaux), est mis en valeur à l'occasion de nombreux passages d'une rare beauté dont lui seul a le secret. Qu'il soit le seul à être entendu, qu'il rejoigne  les autres instruments pour les envelopper de nappes de claviers bien propres à lui ou encore concernant les unissons, son rôle dans cet album reste magistral ; un pur moment de bonheur pour les auditeurs.

Par la suite, c'est "Bidges In The Sky" qui nous surprendra. Pourquoi me direz-vous ? Eh bien en grande partie, cela est du à son introduction qui reste une première chez un groupe comme Dream Theater. Quand on sait qu'elle s'intitulait initialement "The Shaman's Trance", on comprend mieux le "délire" que s'est accordé le groupe. Un morceau bien composé, dont les lignes de chant de toute beauté émanant de James Labrie sont décidément bien appréciables !
 


Résonne ensuite la très belle intro d' "Outcry" (quel son de Jordan !), à laquelle mettra un terme l'entrée de tout le groupe dans une partie symphonique vraiment magnifique ; un travail d'orfèvre de la part de la formation qui saura en émouvoir plus d'un. Techniquement monstrueuse, "Outcry" ressort comme étant la véritable première piste obéissant au style "classique" Dream Theater ; les enchaînements de solos, d'unissons, de breaks et de parties plus expérimentales les unes que les autres (nous rappelant par moments le Liquid Tension Experiment) sont fabuleux. Un véritable "Metropolis" revisité, avec un Petrucci carrément monstrueux dont le son n'a d'égal que la prestance. Rudess assure parfaitement l'accompagnement aux claviers (ainsi que ses solos !), alors que Mangini se met à maltraiter violemment ses fûts. Du très bon Dream Theater, qui devrait contenter les aficionados, plus réticents aux derniers albums.

L'alternance de cette piste avec "Far From Heaven" (oh quelle ressemblance avec "Wait For Sleep" !!) est terrible ; la pression retombe et on se laisse guider par un James Labrie décidément en pleine possession de ses moyens sur cet album ! Un peu moins de quatre minutes de pur plaisir, avec une piste "acoustique" puisque James et Jordan se retrouvent en tête à tête pour un moment bien émouvant… Avant de remettre un énorme, que dis-je, un incommensurable coup de massue à tout fan de Dream Theater avec la piste suivante !
 


"Breaking All Illusions", veritable chef d'oeuvre de cet album, se veut être vraisemblablement fédérateur ! Quelle claque, quelle fessée que cette chanson (et les fessées de ce type, la rédaction en est avide !) ; dès les premières notes nous pouvons nous apercevoir de l'intensité de ce morceau ; les musiciens semblent vraiment avoir tout donné sur cette piste que l'on ne peut s'empêcher de s'imaginer résonner en live ! Une piste invraisemblablement risquée, à laquelle John Myung a grandement apporté pour les paroles (il devrait vraiment écrire bien plus souvent le père Myung vu qu'à chaque fois qu'il prend la plume, il arrive à nous pondre une véritable pépite) ! L'occasion de souligner les lignes de basse qui apparaissent un peu avant la seconde minute, que l'on peut carrément qualifier d'aphrodisiaques (euh.. si si !), et les sublimes lignes de voix de James semblent carrément irréelles ! Les variations rythmiques sont également terribles (3:40) et Petrucci semble être décidément apte à créer une nouvelle religion à lui seul. Les minutes qui suivent sont vraiment de toute beauté, alternant rythmes et contretemps divers, jusqu'à accueillir ce splendide son de guitare sorti de nulle part, que l'on doit à dieu Petrucci (oui, car Petrucci ne peut pas être réel). Un son clair, net, précis et d'une perfection affligeante; une maîtrise de l'instrument que nul autre n'a en ce bas monde, et qui débouche sur l'un des plus beaux solos du groupe en ces vingt cinq ans de carrière ! Absolument magnifique ; une piste qui se rapproche d'ailleurs de "Learning To Live" qui n'est autre que l'un des chefs d'oeuvre des Américains.

C'est après l'incroyable frisson engendré par cette piste que l'album s'achèvera sur une dernière belle ballade, "Beneath The Surface", composée par Petrucci et "validée" par l'ensemble du groupe qui a décida de l'utiliser afin de clôturer ce disque de manière "sereine".
 


Mêlant l'agressivité d'un Train of Thought, le côté symphonique d'Octavarium et la structure d'un Images and Words, et alliant ceci à une production irréprochable de John Petrucci (qui s'est proposé de la faire seul !), ce nouveau Dream Theater constitue une véritable incitation au voyage ; sans aucun doute l'un de leurs meilleurs albums depuis bien longtemps !

Piqûre de rappel : Dream Theater vient à peine d'annoncer sa venue en France le 3 Février 2012, au Zénith de Paris ! Rendez-vous est pris (d'autant plus que les Américains de Periphery seront en première partie ; vous n'avez plus d'excuse !)

NDLR : Un grand merci également à Karine de Roadrunner France / Warner Music France pour son aide.

Photos : © 2011 Nidhal Marzouk  / Yog Photography
http://www.yog-photography.com/

Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.

NOTE DE L'AUTEUR : 9 / 10



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