Athènes, décembre 2013. Rotting Christ embrase sa ville d’origine avec deux concerts, des setlists généreuses et un résultat enregistré, sorti en août dernier chez Season Of Mist. Le résultat est un très beau produit, limité en terme d’exemplaire et qui se présente surtout comme un cadeau pour le fan de longue date de la formation. Mais il n’est pas impossible que quelques nouveaux soient séduits par la qualité de la prestation.
En 27 ans d’existence et 12 albums studio, Rotting Christ a su faire évoluer son style pour explorer toutes les nuances du metal extrême. Que pouvait-il manquer à la carrière de ce poids lourd de la scène grecque ? Un album live bien sûr ! C’est chose faite aujourd’hui avec Lucifer Over Athens, retraçant en plus de deux heures l’ensemble de sa discographie.
Les grands gagnants de la tracklist sont le premier et le dernier opus de Rotting Christ, Thy Mighty Contract et Κata Τon Daimona Εaytoy. L’occasion de voir que même si deux décennies séparent ces disques, le groupe a su garder une cohérence impressionnante dans sa musique. Certes, celle-ci a évolué mais mettre ces deux albums face à face dans la même setlist est loin d’être choquant.
Bizarrement et pour une raison inconnue, Khronos est complètement oublié alors qu’il contient tout de même la terrible « Lucifer Over London ». Les titres de l’excellent dernier album du groupe passent en tout cas l’épreuve du live comme jamais et constituent les moments forts de l’écoute, notamment l’introduction épique « 666 », « In Yumen – Xibalba » ou la bonus track « Welcome To Hel ». On est cependant un peu attristés de voir qu’en 31 titres n’apparait pas « P'unchaw Kachun-Tuta Kachun », tube ultime du combo.
Rien à dire sur la performance des membres, absolument royale, comme à leur habitude. Sakis Tolis n’est pas le plus grand chanteur qui soit, mais il parvient comme toujours à mettre une énergie admirable dans sa prestation, haranguant sans cesse le public. Son frère Themis déroule ses rythmiques martiales, presque tribales, qui font toute l’intensité du black metal de Rotting Christ. Un black metal mélodique en pérpetuel évolution, s’égarant souvent sur des chemins plus rock n’ roll (« Among Two Storms ») ou thrash (l’impeccable « Societas Satanas »).
Cela n’empêche pas le groupe d’accélérer le rythme quand il faut et d’assommer son auditoire avec les tueries black metal « Archon » et « The Call Of The Aethyrs ». Le synthétiseur utilisé régulièrement par les Grecs en studio est présent par samples, mais beaucoup moins audible. On a presque l’impression de découvrir d’autres versions de certains titres, plus bruts et sans doute moins subtils. L’ensemble est tout de même parfois gâché par un mix hasardeux, tantôt très bon, tantôt franchement dégueulasse comme sur « Κατά τον δαίμονα εαυτοÏ » où la batterie avale les autres instruments. Le volume sonore de la voix de Sakis Tolis se voit aussi régulièrement modifié sans que l’on comprenne pourquoi. Sans gâcher totalement l’écoute, ces contretemps empêchent l’album d’être aussi parfait qu’il se voudrait.
Rotting Christ aura donc fait un beau cadeau à ses fans avec cette sortie. Avec une setlist couvrant l’ensemble de sa carrière, le groupe des frères Tolis a été généreux et malgré quelques défauts indépendants de la prestation du quatuor, on se plonge avec plaisir dans ce live très complet. Il constitue une porte d’entrée d’autant plus honorable à un groupe phare du metal, au son unique et toujours dans une forme olympique. Qu’on se le dise, Rotting Christ est très loin de tirer sa révérence.