Svartir Sandar veut dire Sable Noir, et c’est sûrement ce qui a recouvert une partie de l’Islande en 2010 lorsque l'éruption du volcan Eyjafjöll a commencé, clouant les avions au sol et mettant la pagaille dans les aéroports européens. Ce que l’on ne savait pas c’est que la fumé était très toxique chargée en opiacé et en substance hallucinogène.
C’est donc le quatrième album des islandais sous forme d’un double album mélangeant Doom, Stoner, Post Rock, Blues, Folk & Black Metal pour l’ambiance qui arrive chez Season of Mist. A l’écoute de l’album on reste donc bloqué, scotché comme les avions en Europe qui ne pouvaient plus voler à cause de l’opacité du nuage qui survolait nos pays. Plus personne ne vole au dessus du volcan aujourd’hui, sauf nous à l'écoute de cet album aérien, bercé par des orgues, un chant triste et mélancolique incitant à l'évasion et à la contemplation. Ils ont leur style et ne l'ont volé à personne. Ils ont su faire un Melting Pot de toutes leurs influences et c'est parfait.
Car ici on atteint le chef d’œuvre. C’est poignant chargé en émotion comme en CO2.
La voix miaulante d’Aðalbjörn "Addi" Tryggvason à peine audible nous bouleverse tout au long de ces notes égrenées au compte-goutte. C’est beau et triste comme une histoire d’amour (qui finit mal en général)…Mais ne sont-elles pas les plus belles ?
Indéniablement, Addi a progressé au niveau du chant et c’est donc un « plus » pour Sólstafir. Sur «Fjara », chœurs et piano viennent bouleverser les structures classiques proposés par le groupe. Sommes-nous dans du prog - doom -opiacé - floydien ? Car les influences sont là, Pink Floyd n’est pas loin, non pas au niveau musicale (quoique) mais au niveau des ambiances, des détails, de la finition.
Les champignons hallucinogènes ont poussé sur les flancs du Volcan entre les calottes glaciaires d'Eyjafjallajökull et de Mýrdalsjökull et ce jour là, Sólstafir était en randonné et a tout mangé…et c’est tant mieux car cet album est surement mon Album de l’année.
Ici on retrouve toujours le charme des islandais, pédales d’effets sur chaque note (il faut voire sur scène le nombre de pédales qui se trouvent devant le guitariste), et c’est dans un voyage au-delà de l’impensable auquel nous convient les islandais.
Le chant me fait penser aux chamans qui peuplaient ces terres lointaines, nous avons l’impression d’entendre des paroles magiques étourdissantes. Tout comme le chaman on entre aussi en transe à l’écoute des cette mystérieuse musique.
Les descentes de frettes font toujours le bonheur de nos ouïs comme sur « Ljós í Stormi » ou « Þín Orð », avec ce chant qui a prit en maturité et en puissance. Guðmundur Óli Pálmason déroule son savoir faire à la batterie et nous secoue les trippes quand le titre accélère ou nous gratifie de légèreté quand il le faut…renversant !
La méditation transcendantale musicale nous demande de nous arrêter, d’arrêter de courir dans tous les sens et de réfléchir à notre présence sur cette Terre… Sólstafir doit avoir la réponse. La musique conceptuelle de « Sjúki Skugginn » est remplie d’illumination, d’ésotérisme. L’émotion vous envahit à chaque « inhalation » de notes, car il est vrai que l’on vit ce disque comme une expérience initiatique.
La maîtrise d’un piano lointain et d’une guitare slide nous transporte dans une bonté divine sur « Melrakkablús ». Les descentes de manche continue mais dans un calme serein et planant. Et si c’était seulement ça le bonheur. Un état second entre la musique et votre corps en lévitation plongé dans les limbes du plaisir criant à l’infini « Melrakkablús ». Effectivement, la cendre était nocive mais riche en créativité. Sur certains titres on passe aisément de moments intimes à des envolés lyriques avec la batterie qui vous booste afin de nous transcender.
Sur le dernier titre « Djákninn » on a même un riff Thin Lyzzien qui nous envenime jusqu’à la moelle ; avec ce solo interminable de Sæþór Maríus "Pjúddi" Sæþórsso qui nous rend dingue.
Je me souviens de les avoir vus sur scène et c’est vrai que lorsqu’ils jouent on passe dans une sixième dimension où le temps s’arrête.
Alors effectivement avec cet album le temps où plutôt la vie en général se met en suspend car la perfection mérite qu’on s’y arrête afin d’en ressentir toutes les subtilités.
« Æra » vous insuffle une énergie dont vous ne pensiez pas pouvoir ressentir un jour. Les synthés vous transportent dans un univers décalé proche du paradis musical où la vie prend tout son sens.
Ils savent aussi créer une ambiance lourde et puissante en sentiment avec « Kukl » et nous bouleversent par cette voix à la limite du faux mais tellement sincère.
C'est par les expériences que Sólstafir à su expérimenter, rendre sa musique fluide, « nordiquement » psychédélique et chargée en émotion.
C’est l’album d’une vie pour un groupe, un aboutissement qui sera difficile à dépasser. Ici tout n’est que merveille, enchantement et perfection comme le chant des anges sur « Svartir Sandar » qui vous accueille et vous demandant de rester. Merci à eux pour tant de bonheur…
Lionel / Born 666