Après un cru 2015 décidément béni pour le metal français, on peut dire qu’une nouvelle sortie de Birds In Row arrive à point nommé pour finir l’année de la plus belle des manières. Le combo de Laval n’avait plus donné de nouvelles du studio depuis le déjà culte You, Me, And the Violence, sorti en 2012 et beaucoup attendaient avec impatience le nouveau passage en studio. Loin de chercher à cloner son album précédent, le groupe sort aujourd’hui Personal War, un EP qui tente de canaliser sa fougue et montre la maturité acquise pendant ces quelques années.
Un EP, voilà un format qui colle sûrement davantage à la musique de Birds In Row. Moins exigeant pour l’auditeur qu’un album entier, il permet au combo d’exposer son talent sans temps mort, en 17 petites minutes intenses. Pratiquant toujours un hardcore DIY, sans artifice, les lavallois semblent pourtant avoir amorcé un virage dans leur style avec ces riffs lancinants, caractéristiques de la scène screamo/indie. Birds In Row fait de plus en plus penser à un Defeater ou un Counterparts français, ce qui est loin d’être péjoratif tant ces groupes soufflent un vent frais sur la scène hardcore actuelle.
D’emblée avec « Torches », le groupe attaque frontalement avec un flot continu de paroles, lâchées dans l’urgence par son frontman. Derrière, les musiciens font le job de façon remarquable en s’effaçant parfois (comme sur « O’Dear » où La Dispute n’est vraiment pas loin) ou au contraire en s’imposant comme force de frappe impressionnante, sans jamais oublier l’émotion. Une émotion que l’on retrouve en grande partie grâce à la production d’Amaury Sauvé, véritable quatrième homme sur cet album.
Car ce qui frappe avec la production de Personal War, c’est le rendu plus brut que jamais, avec notamment un larsen omniprésent entre chaque titre, sans en devenir gênant outre mesure. Ce mix particulier donne à l’EP son ambiance, plus chaleureuse et charnelle que par le passé, avec un traitement feutré de la basse absolument magistral. On a presque l’impression d’entendre le groupe jouer dans sa chambre, d’autant que les compositions se veulent plus intimistes et torturées que jamais.
Bien sûr, l’influence du chaotic hardcore à la Converge est toujours présente mais elle est minimisée au profit de riffs de guitare tirant presque vers le post-rock/shoegaze. On ne peut s’empêcher d’entendre la filiation presque évidente entre un titre comme « Worried » et l’album Köld de Solstafir, par exemple. Malgré cela, Birds In Row s’arrange pour ne jamais laisser une occasion de reprendre son souffle et embraye de plus belle dès qu’un riff commence à durer plus de quelques secondes. En témoigne les titres courts et directs de cet EP comme le surprenant « Snakes » et son refrain entêtant, scandé jusqu’à l’épuisement.
En seulement 17 minutes, Birds In Row a rappelé à tout le monde pourquoi il est considéré comme la crème de la scène underground française. Plus bluesy, plus mélancolique mais aussi plus chaud que par le passé, le trio réussit son évolution avec brio et passe une nouvelle fois un cap. Bien sûr, le format EP ne laisse pas le temps de développer les ambiances si particulières aperçues sur un titre comme « Lovers Have Their Say » et c’est bien la seule chose qui empêche d’être pleinement satisfait. Mais nul doute que le groupe saura combler ce manque lors de sa prochaine sortie.