Deuxième album de ce groupe breton mélangeant habilement doom metal aux sonorités électroniques et ambiantes. Enfant de la Nuit n'est pas accessible aux premières écoutes mais plaira aux auditeurs qui aiment les longues odyssées musicales à la fois spatiales et puissantes. Avec cette nouvelle sortie Ixion propose un style et un univers qui méritent d'être découverts.
« Espace, frontière de l'infini, vers laquelle voyage notre vaisseau spatial... » Oui mais là il ne s'agit pas du Capitaine Kirk, de Monsieur Spock et des autres membres d'équipage de l'Enterprise en collants flashy mais du vaisseau Ixion. Celui-ci dérive dans le cosmos durant des générations, ses membres s'étant forgé une forme de religion,leur vie est tournée vers la recherche d’une nouvelle planète d’accueil. Jusqu’à ce qu’ils découvrent un planétoïde sculpté en forme de crâne humain… ce qui les ébranle complètement. Perdus, et face aux traces de cette puissance inconnue, ils finissent par expérimenter la « technologie » trouvée sur place sur l’un de leurs enfants, et s’élancent dans une nouvelle quête... Celle de l'Enfant de la Nuit.
Installez-vous confortablement et laissez-vous donc bercer par cette odyssée spatiale subtilement mise en musique par Ixion (nom inspiré par le Hyperion de Dan Simmons), projet formé en 2004 et déjà auteur d'une démo Through The Space We Die en 2007 et d'un album To The Void en 2011. Enfant de la Nuit, disponible depuis le 9 novembre 2015 sur le plutôt dynamique label breton Finisterian Dead End, met en musique cette épopée (qui vous rappellera quelques classiques de la science-fiction que je vous laisse soin de reconnaître mais a aussi été inspirée, si l'on en croit le livret, par le Hamlet de Shakespeare ) qui se développe sur neuf morceaux/chapitres.
A la première écoute la musique d'Ixion est du doom alternant voix death et chant clair, le tout étant plutôt à dominante tempo lent ou médium. Mais en faisant l'effort, comme souvent avec des oeuvres qui ne dévoilent pas leurs secrets tout de suite, de pousser un peu plus la découverte, on se rend compte que le style développé par les Bretons est bien plus subtil et recherché que l'on pourrait le penser au premier abord.
Il s'agit de doom certes, mais avec des arrangements électroniques très bien amenés, ce qui donne souvent un côté cinématographique à la musique d'Ixion. Ainsi, on a vraiment l'impression d'entendre un vaisseau spatial décoller sur l'introduction de l'inaugural « Ghost in the Shell » avec ces boucles electro suivi d'un riff épique et lourd. Ce morceau alternant growl et refrain éthéré présente très bien le mélange original proposé par le groupe, soit un doom gothique rappelant le Theatre Of Tragedy des débuts mixé avec de la musique électronique ambiante.
La grande qualité de ce disque est dans le travail d'écriture, on sent que le duo de compositeurs a pris le temps de perfectionner chaque plage, ce qui ne donne aucun déchet. De plus, on sort un peu parfois du carcan doom pour aller dans d'autres contrées métalliques, ainsi « Allegiance » par exemple possède un côté progressif avec ses nappes de clavier planantes, à la Vangelis ou Klaus Schulze, alternant avec un riff encore épique. Cet aspect progressif se retrouve aussi sur « The Passenger » qui sonne très symphonique ou « Odyssey » aux arrangements riches et au break planant à la Pink Floyd. De même, on entend des sonorités industrielles sur « Doom » avec cette intro à la Fear Factory et son ambiance oppressante.
Mais ce qui est surtout séduisant dans la musique d'Ixion est le soin apporté aux parties électroniques. Le groupe cite Archive, Vangelis, Jean-Michel Jarre , Air et M83 comme principales influences dans ce domaine et on peut dire qu'il les a parfaitement assimilées. En complément d'une batterie programmée qui finalement sonne assez organique, on y entend des boucles, des nappes planantes, du symphonique qui donne pas pour autant dans le pompeux (le déjà cité « The Passenger » mais aussi « The Shining » qui sonne presque comme du Primordial aussi avec ce côté épique une fois de plus) et un peu de trip hop sur « Children of the Night ». « Discovery » possède lui un côté un peu bande originale de film, rappelant ce qu'a composé Vangelis pour Blade Runner. Je ne peux que conseiller l'écoute au casque de Enfant de la Nuit pour en saisir toutes les subtilités justement.
Niveau petites choses qui font bien leur effet, nous pouvons aussi relever cette alternance growl/voix claire qui fonctionne très bien (« Allegiance », « The Shining », « Childen of the Night », « The Passenger » et « Odyssey » sont là pour en attester), des twin guitars à la Maiden pas déplaisantes sur « Promised Land », un piano mélancolique au début de « Odyssey » et cette petite mélodie gimmick au clavier sur « Children Of The Night » bien amenée. Qui dit doom dit ambiances sombres et mélancoliques aussi bien sûr, en ce domaine le break central de « Allegiance » et son chant triste, le riff morbide au milieu de « Discovery » sont là pour nous rappeler que dans l'espace personne ne nous entend pleurer.
La production est aussi une réussite car chaque instrument sonne distinctement sans que l'un vienne étouffer l'autre.
La pochette, mélange d'innocence enfantine et d'onirisme spatial, a aussi son charme et représente parfaitement le style d'Ixion : doom from outer space, frontière de l'infini, vers laquelle fait voyager leur musique.
1.« Ghost in the Shell »
2.« Allegiance »
3.« Discovery »
4.« Doom »
5.« The Shining »
6.« Children of the Night »
7.« The Passenger »
8.« Promised Land »
9.« Odyssey »