Le power metal mélodique est-il en train de doucement mourir ? Pas mal de gens le pensent sincèrement, le temps béni des 90s flamboyants via les Stratovarius-Edguy-Rhapsody-Angra (lancés en grande pompe sur les succès de leurs aînés Helloween-Blind Guardian, eux même issus des grands Iron Maiden-Judas Priest-Accept) semble quelque peu révolu. Pas pour rien que ces quatre premiers groupes cités continuent aujourd'hui avec un style souvent différent (plus mûr disons) et quelques line-up parfois remaniés. Il ne faut cependant pas croire que le speed mélodique et consorts n'existe plus, il survit ici ou là mais ne parvient plus à insuffler la même magie qu'auparavant, l'originalité semblant érodée à l'extrême...
Peu importe, certains persistent et signent, les Galneryus-Reinxeed ou autres Sabaton-Powerwolf (pour le côté plus "heavy" du genre, qui semble prendre un vrai second souffle grâce à ces deux-là) sortent encore leurs hymnes et les accrocs du genre ne s'en plaignent pas. Dreamtale fait peut-être partie de ceux-là, sorte de groupe metal mélodique finlandais "3ème génération" si on prend Stratovarius et Sonata Arctica comme glorieux aînés, mais qui a su renouveler ou disons sublimer le genre en 2002 et 2003 avec des Beyond Reality et Ocean's Heart plutôt brillants. Depuis, la bande de Tempere a quelque peu tempéré l'excitation naissante autour d'elle avec quelques déceptions... avant de revenir cette année avec un 5ème opus, Epislon, sorti en autoprod il y a 6 mois et récemment à peine distribué dans certains coins de l'Europe comme ici en France.
Pas facile comme constat, voici un groupe que l'on annonçait comme le futur du genre réduit à sortir son nouveau brûlot dans l'anonymat (presque) le plus total. Certes, c'est la crise, mais tout de même... Du coup la production en prend un léger coup et n'offre pas forcément le meilleur son à une galette qui aurait mérité un mixage plus abouti. Tout ceci semble annoncer le pire après des Difference et surtout Phoenix bien moyens. Mais voilà, Dreamtale semble reprendre du poil de la bête et compose ici "à l'ancienne" avec une certaine énergie retrouvée, plaçant d'emblée ce disque au-dessus des précédents. Tant mieux, me direz-vous, mais...
On en revient ici au premier point énoncé dans l'introduction, quid du power metal "à l'ancienne" aujourd'hui ? Qui cela va intéresser ? Les "hardcore followers" très certainement, mais Dreamtale peut-il s'attirer un nouveau public avec une telle sortie ? Cela parait compliqué... mais après tout, est-ce là le but premier des finlandais ? Vu le côté direct de la plupart des chansons composant Epsilon, on peut aisément penser que le sextette nordique a décidé de jouer sans réfléchir aux conséquences, en se faisant plaisir et en sachant quel public viser.
Globalement, cela marche sans problème. Hormis un son décevant et quelques morceaux aux mélodies disons éculées (des "Angel of Light" et son beat électro étrange ou "Lady of a Thousand Lakes" auraient difficilement été acceptables en tant que face B il y a 10-15 ans), les hymnes sont tout de même légion bien que parfois "déjà entendus" et loin de toute surprise. On ne peut s'empêcher de rester accroché par des morceaux tels que l'épique "Fly Away" ou plus encore le très bon "Where Eternal Jesters Reign" et son côté "Destiny" (la chanson) de Stratovarius accélérée à son maximum. Alors oui les mélodies sonnent souvent comme du ressuçage mais la magie l'emporte parfois, un peu, dans un speed convaincant, et nous fait oublier les quelques défauts laissés ici et là.
Pour beaucoup, le souci pourrait venir de Erkki Seppänen, chanteur du combo depuis 2007 et qui a du mal à faire oublier les Tomi Viiltola ou Jarkko Ahola (Teräsbetoni, Northern Kings) passés avant lui. C'est dommage, en un sens, mais finalement son chant "à la limite" montre quelque fois son charme et on en oublierait presque les quelques défauts de justesse (qui doivent potentiellement être pénibles en live). Erkki sait "driver" ses mélodies et son vibrato épique fait le travail en laissant une trace plutôt personnelle, c'est déjà ça.
Il n'y a donc pas grand chose à relever d'un album ma foi correct mais qui sonne parfois trop "passéiste" ou "vite fait" pour emballer la future ménagère de moins de 30 ans amoureuse de Timo Tolkki ou Tony Kakko. Dans le style, Symfonia aura fait un poil mieux cette année, mais globalement avec les mêmes défauts que cet opus... sauf que voilà, ici ce n'est point André Matos qui chante, la différence se fait donc ressentir assez drastiquement. Saluons tout de même la performance d'un groupe qui aurait pu mettre à plus d'une reprise la clef sous la porte mais qui a décidé de persister en offrant enfin à ses fans un album plutôt digne de ce nom après deux essais plutôt médiocres. Tant mieux, mais pas sûr que Dreamtale puisse mieux faire, à voir... et faites que je me trompe, pour l'honneur du power mélodique !
Note : 6.5/10 (et montons à 7 en note finale pour souligner l'effort... et encourager un style qui ne doit pas mourir, non mais oh ^^)