Qu’il est plaisant de voir une affiche constituée de deux groupes français, qui plus est lorsque ces derniers s’apprêtent à défendre sur scène lors récents opus, tous les deux excellents. L’esprit de camaraderie présent sur cette scène française a poussé Gorod à faire appel à Kronos pour ouvrir ce concert, l’un des tout derniers de l’année 2015. Et si quelques inquiétudes s’étaient fait sentir quant à la capacité de ces deux groupes à remplir le Divan du Monde, elles ont vite été écartées alors que la salle se remplit peu à peu. Le balcon restera fermé pour la soirée, mais qu’importe, c’est dans le pit que les fans de death sont venus se défouler et se la jouer chauvins ce soir.
Kronos
Arisen New Era s’est fait longuement attendre, puisqu’il aura fallu près de huit ans avant que le successeur de The Hellenic Terror ne voit le jour. Avec un line-up légèrement remanié depuis 2007, nous avions eu le privilège d’assister à quelques récents concerts des Vosgiens, notamment au Hellfest et en ouverture de Dying Fetus, et les impressions étaient fort positives à l’issue de ces prestations. Il en sera de même ce soir, et cela se ressent dès « Colossal Titan Strife » qui ouvre ce concert. Le son, massif et puissant, est très bien équilibré et rend justice à la musique du quintet.
Triv (chant) est en grande forme vocale et ponctue ses growls d’injonctions au public, afin que celui-ci, timide en début de set, commence à se lâcher. Il ne faut pas en demander plus à l’audience, qui va rapidement se mettre à pogotter et à mosher de la plus belle des façons. Certains slammers atterrissent également sur scène, headbanguent aux côtés des musiciens avant de se jeter à nouveau dans la foule. Grams et Richard (guitares) sont, une fois de plus, impressionnant de maîtrise technique, tout comme Tom (basse), qui parvient à jouer sans médiator, malgré la rapidité et la difficulté de ses plans. De plus, tous les membres du groupe investissent la totalité de la scène et prouvent que l’exercice du live est maîtrisé à la perfection.
Côté setlist, Kronos déroule une partition sans faute, alternant ses classiques (« Bringer of Disorder », « Petrifying Beauty », « Ouranian Cyclops ») et extraits d’Arisen New Era (« Zeus Dethroned », « Klymenos Underwrath », « Purity Slaughtered »). Ces derniers passent très bien le cap de la scène et entraînent le public à se donner encore plus pour faire un accueil monstrueux à Kronos.
Le titre du dernier morceau joué pourrait résumer à lui seul l’impression que nous a laissé le quintet vosgien, puisque c’est « Monumental Carnage » qui est chargé de conclure ce set, monumental en effet.
Il n’y a plus qu’à espérer que Kronos reviennent régulièrement écumer les salles parisiennes et les scènes européennes tant la qualité de ses prestations peut lui conférer un statut de formation majeure en dehors de nos frontières.
Setlist Kronos :
Colossal Titan Strife
Bringer of Disorder
Opplomak
Klymenos Underwrath
Purity Slaughtered
Zeus Dethroned
Mashkhith
Petrifying Beauty Pt 1
Submission
Ouranian Cyclops
Monumental Carnage
Gorod
Après la claque administrée par Kronos, place à Gorod, dont la musique, moins massive et plus progressive a su nous séduire au fil des années, avant que les bordelais ne parviennent à bâtir leur réputation de relève du death français. Alors que A Maze of Recycled Creeds peut se classer parmi les meilleures sorties de l’année tout genre confondu, c’est justement cet opus qui sera le mieux représenté dans le set. L’introduction « Air de l’Ordre » d’Erik Satie retentie, prélude à « Temple of the Art-God ».
Le son est également parfait, bien équilibré entre les guitares de Mathieu Pascal et Nicolas Alberny, et la basse de Barby, qui s’en donne à cœur joie, avec des plans groovy, presques dansants. Sur cette base instrumentale solide, Julien « Nuts » Deyres peut se faire plaisir et propose son growl mélodique, parfois chanté (« Birds of Sulphur », « Transcendence »). Le vocaliste est d’ailleurs égal à lui-même et fera une prestation sans faute tout au long du set. Les titres de A Maze of Recycled Creeds sont parfaitement interprétés et semble déjà être connus sur le bout des doigts par les spectateurs. « Celestial Nature », déjà révélé lors de la tournée avec Morbid Angel est déjà un classique des setlist du groupe.
La discographie de Gorod étant désormais plutôt étoffée, et le temps de jeu ne durant qu’une heure, certains titres phares passent à la trappe (« Earth Pus » aurait été apprécié), mais les Bordelais piochent intelligemment dans chaque album, n’oubliant pas les classiques « The Axe of God », « Programmers of Decline » ou « Disavow your God » et ses parties tapping très mélodiques.
C’est d’ailleurs la force de Gorod, qui sans s’aventurer sur le terrain de la brutalité (terrain que Kronos maîtrise à la perfection) sait jouer de la subtilité et des harmonies complexes propres à son style musical. Le public l’a d’ailleurs bien compris et se fait beaucoup plus sage et attentif que lors de la première partie, appréciant chaque note qui sort de la guitare de Mathieu Pascal, bien que quelques slammers rejoignent Nuts sur scène.
En guise de cadeau, Gorod termine son set par le morceau le plus progressif de sa discographie, « Transcendence », interprété seulement pour la seconde fois en live. Ce titre résume à lui tout seul le talent du combo et montre l’équilibre parfaitement dosé entre mélodie, technique et puissance que Gorod se plait à développer dans sa musique.
Au final, la soirée passée en compagnie de deux groupes majeurs de la scène death française aura été parfaite en tout point. Malgré leurs différences de style, Kronos et Gorod ont su convaincre l’ensemble du public. Le stand de merchandising est d’ailleurs pris d’assaut par les fans à peine les lumières rallumées. Quelle belle façon de découvrir en live deux opus majeurs sortis cette année et de terminer 2015 en beauté !
Setlist Gorod
Air de l’Ordre
Temple of the Art-God
Here Die Your Gods
Celestial Nature
Harmony in Torture
Inner Alchemy
The Axe of God
The Mystic Triad of Atristry
Birds of Sulphur
Programmers of Decline
Disavow Your God
Transcendence
Merci à Roger Wessier et Base Production
Photographies : © Justine Cadet 2015
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