Malgré des apparitions sporadiques sur scène et l’annonce qu’ils travaillaient sur un nouvel album en 2014, la formation culte de rock gothique Fields of The Nephilim n’a rien sorti de vraiment nouveau depuis maintenant plus de dix ans. Et comme Carl McCoy et ses sbires s’apprêtent à jouer leur première tête d’affiche française en 25 ans le 16 janvier prochain à Paris, c'est l’occasion de revenir sur leur dernier album studio, Mourning Sun.
Après des années de mutisme, des problèmes de label et de personnel, on peut dire que personne ne s’attendait à trouver un nouvel album de Fields of The Nephilim dans les bacs en 2005. Elizium, le dernier vrai album studio du groupe datait de 1990, et le groupe semblait en hibernation depuis un bon moment. L’attente était pourtant bien là et forte, car Carl McCoy avait affirmé sa volonté de continuer le projet, et les trois albums de Fields of The Nephilim avaient eu un impact conséquent à l’époque, ne se limitant d’ailleurs pas à la seule scène goth. L’histoire aura donné raison aux plus optimistes, car Carl McCoy travaillait bien sur un album pendant toutes ces années, avec l’assistance de musiciens qui restent aujourd’hui inconnus, à l’exception John "Capachino" Carter, un musicien multi-instrumentiste qui avait déjà collaboré avec McCoy par le passé.
Musicalement, Mourning Sun marque un retour vers les sonorités les plus appréciées du groupe, à savoir l’orientation plus sombre et lourde développée sur The Nephilim, l’album le plus connu du combo en partie grâce au tube en puissance « Moonchild ». La voix de McCoy n’a rien perdu de son charme et est toujours immédiatement reconnaissable, à mi-chemin entre le chant et le growl. Après la longue et belle introduction « Shroud (Exordium) », qui fait monter la tension pendant cinq minutes, Fields of The Nephilim fait tout exploser sur « Straight To The Light » avec sa basse vrombissante et ses riffs tantôt acérés, puis éthérés. Et on retrouve ce schéma de composition plus direct et accrocheur sur « New Gold Dawn » et « Xiberia (Seasons in the Ice Cage) », et cela en dépit du format des chansons dépassant les sept minutes.
Sur le reste de l’album, Fields of The Nephilim déploie des morceaux plus planants qui rappellent la période Elizium, mais en mettant tout de même plus l’accent sur des mélodies fortes, un choix heureux quand on se rappelle que les passages ambiants d’Elizium étaient loin d’être toujours convaincants. On retrouve ainsi sur la chanson titre de l’album, mais aussi sur « She », un bon compromis entre ambiance hypnotique et des riffs de guitare simples, mais efficaces.
De fait, Mourning Sun est un album qui n’a pas de chansons ratée, en plus d’être le genre d’œuvre propice à faire voyager celui qui s’y plonge. La production est judicieusement équilibrée entre modernité et une bonne dose de nostalgie des années 80, donnant un cachet certain aux compositions. Cela permet aussi à l’album d’être ancré dans son époque, plutôt que d’être trop tourné vers le passé, comme c’est souvent le cas pour beaucoup de formations de la scène goth. L'édition limitée de l'album comporte par ailleurs une surprenante reprise de "In the Year 2525" de Zager and Evans, qui se voit ici passée à la moulinette Fields of The Nephilim ère 2005, dopée aux riffs tranchants et à la double pédale.
Avec Mourning Sun, Carl McCoy prouvait qu’il n’avait rien perdu de sa verve, sans tomber dans l’auto-plagiat ou la parodie. Et l’essai a également été transformé sur scène, puisque Fields of The Nephilim a pu montrer lors de rares apparitions que sa musique était toujours aussi pertinente en concert, en plus d’être interprétée avec soin. Tout cela fait que Fields of the Nephilim est loin d’être un groupe à perdre de vue en 2016 et qu’on peut légitimement attendre avec impatience le successeur de Mourning Sun.