Au Pays du Dragon, il fleure bon le heavy power speed mélodique épique. Rien que ça ? Ni plus, ni moins, c'est bel et bien ce que Dragonland a pris l'habitude de nous servir depuis le début de sa carrière en 1999. Le groupe suédois en est ici à son 5ème album, un Under the Grey Banner présenté comme un tournant voire même un retour aux sources pour Olof Mörck et ses comparses. Pourquoi donc ? Car ce disque constitue la 3ème partie de la trilogie Dragonland Chonicles, débutée en 2001 avec The Battle of the Ivory Plains et poursuivie l'année suivante avec Holy War.
9 ans de hiatus donc et un travail de longue haleine puisque deux ans se sont écoulés entre le début de son écriture et sa sortie prévue le 18 novembre 2011 chez AFM Records. Olof n'a pas fait les choses à moitié, dotant ce CD d'une super-production musicale quasi-hollywoodienne et d'un designer assez connu (Damian Bajowski) pour la réalisation du visuel et de l'artwork. Avec l'ambition de faire décoller son Dragonland, après une tentative remarquée pour toucher au "commercial" via son autre projet Amaranthe...
Pouet pouet boum speeeeeeeeeed, allez c'est parti ! Fans de Rhapsody ("The Trials of Mount Farnor" va en ramener certains vers "Dawn of Victory") et consorts, cet album nous replonge dans les glorieuses années 90, là où le speed prenait toute son ampleur en mode symphonique et épique. Cela fonctionne parfaitement et on se laisse prendre au jeu, d'autant plus que les deux précédents brûlots de Dragonland en avait désarçonné plus d'un avec leur côté plus "moderne". Ici on reprend la marche guerrière et fantastique, l'épée en avant !
"The Black Mare" résume presque à elle seule jusqu'où cette formation peut aller pour faire rêver les amateurs du genre. On peut considérer ce morceau comme une perfection sympho-épique où en effet tout y passe : cavalcades puissantes et orchestrales en intro, couplets ciselés, pré-refrain avec son changement mélodique caractéristique et refrain ravageur qu'un Theocracy (un des fiers représentants actuels du style "power épique") n'aurait pas renié. Et même le break fait du bien, c'est dire... Bref, ça c'est du bon, et on en regretterait presque que tout l'album ne soit pas dans la même veine.
Car aussi bon soit-il, ce Under the Grey Banner, parfaitement exécuté au demeurant, souffre de quelques longueurs tout au long de ses 55 minutes. Avouons-le, et ce même si peu de répit semble nous être offert à première vue, le rythme retombe parfois un peu. Bien que ceci soit au service du concept et du récit, quelques morceaux comme "The Tempest" (qui ose pourtant un solo bien enlevé) par exemple peinent à faire décoller notre âme - malgré le côté pseudo-ballade voulu ici par le compositeur. Puis bon, une tempête calme, cela ne le fait pas trop sur le papier... La seule réussite dans le côté "je calme donc je varie" peut être trouvée du côté de la folkisante "Lady of Goldenwood", qui nous plonge au plus profond d'une forêt elfique. Brillant.
En parlant d'elfe, Elize Ryd (chanteuse d'Amaranthe et déjà apparue sur les précédents Dragonland) se mue en mix de Galadriel et Arwen réunies pour nous offrir quelques savoureux passages au chant féminin. Sur le titre prénommé donc, mais aussi sur la conclusion - un poil moins convaincante cependant de part sa position finale - "Ivory Shores" façon Enya. Les invités sont d'ailleurs légion sur cette galette, notamment au chant puisqu'on y retrouve aussi les deux autres chanteurs d'Amaranthe (Andy Solveström et Jake E. Berg) ainsi que l'excellent ténor Fred Johanson qui nous fait profiter de sa voix à la fois suave et puissante. Le meilleur exemple étant ce "Fire and Brimstone" diablement retentissant.
Tout ce beau monde pour assister donc un Jonas Heidgert au meilleur de sa forme, lui LA signature vocale du groupe depuis ses débuts. Dragonland se reconnait désormais de part son timbre à la fois caractéristique et original, bien que malheureusement il ait toujours autant de mal à faire passer une certaine émotion - rendant les chansons plus "douces" quelque peu banales. Mais ceci n'est pas une nouveauté et, avant tout, une question de goût.
On a donc parlé des chansons, des chanteurs, de la production, que dire de la technique et du jeu général ? Bien exécuté, cela va sans dire et aurait même pu être occulté tant on connait les références d'Olof Mörck - qui a aussi évolué dans un groupe de death metal rappelons-le (Nightrage). Globalement les instruments sont fort bien mixés et l'aspect metal jamais noyé sous les arrangements orchestraux, une bonne chose dans un style qui offre souvent cet éceuil.
Nous ne sommes donc pas loin d'un album d'excellence, mais le côté filmique a tendance à alourdir le tout au fil des écoutes. On se déconcentre ainsi quelque peu une fois la fin de l'album atteinte, même si les chansons le composant sont loin d'être inintéressantes. Le morceau éponyme et épique final (incluons-y au passage son intro opératique "Throne of Bones") aurait cependant mérité un sort plus glorieux, même si c'est l'instant choisi pour tous les guests d'ainsi donner la réplique à un Jonas qui ne sait plus où donner la tête. Attention, il y a même du chant extrême, et c'est que ça ferait presque peur... non, trève de plaisanterie, le passage voulu ici malsain ne prend pas plus que ça et s'avère presque dérangeant sur quelques blast beats un peu trop surmixés, d'autant plus que la suite du dialogue (avec le ténor Fred et Elize) ne scotche pas sur place comme il le devrait. Dommage.
Offrons tout de même de bons points à la bande de Göteborg, là où il aurait été simple de se planter au final... Mission plus qu'accomplie pour Olof et ses amis ! Avis aux amateurs du Seigneur des Anneaux et des jeux de rôle.
Note : 7.5/10