Si vous ne vous souvenez pas d'Ancient Bards, ce n'est pas bien. Parce que l'an passé, ils arrivaient quand même avec une sacrée claque sous le nom de The Alliance of the Kings, pas encore parfait, mais terriblement ravageur et attachant. Et moins d'un an plus tard, ils annoncent Soulless Child. Aïe, des questions à se poser déjà. Un groupe qui arrive avec 2 albums en 2 ans avec une relative jeunesse, ça peut sentir mauvais tout ça, le manque de maturité, de recul, etc. C'est néanmoins avec grand bonheur que d'autres combo, même dans des genres différents, nous rassurent en prouvant que c'est tout à fait possible de faire deux belles réalisations en deux années (prenons Haken par exemple) … mais aussi des désastres (la débacle de Sarah Jezebel Deva). Bref, nous sommes bien indécis. Alors plus qu'une chose à faire pour se rassurer : écouter !
Déjà l'an passé, les italiens, arrivés d'on ne sait pas trop où, nous collaient une énorme claque avec un premier opus à la maturité assez impressionnante, d'autant plus que le combo est encore jeune, que ce soit de l'âge des membres ou de leur année de création. Alors en une année, on aurait tout à fait pu penser que ce second brûlot ne soit pas à la hauteur. C'est vrai que deux albums en deux ans, ça fait très rapide (mode répétitif OFF), mais non, cassons le suspens directement, cette nouvelle galette est encore plus inspirée, brillante et puissance que la précédente, qui se voit ici littéralement enterrée sous cet océan de dynamisme, de puissance et de maîtrise ! Bon, déjà, le défaut principal du jet d'antan est toujours le même : ce n'est pas original du tout ! On peut sentir ici du Rhapsody of Fire, du Dragonforce, du Nightwish, les influences ne sont pas cachées. Et en temps normal, cela est énervant, car on a l'impression d'écouter un vulgaire clone et de se dire que tout est vu, et déjà revu. Ici, ça aurait pu être le cas, mais c'était sans compter sur le talent plus qu'impressionnant des trans-alpins qui ne font pas dans la dentelle et qui démontrent que même avec des inspirations évidentes, on peut arriver à un résultat fort probant ! C'est ce qui marque déjà une vraie preuve de maturité. On espérera quand même un peu plus de prise de risque, mais qu'est-ce que Soulless Child fait du bien par où il passe …
Vous pensiez le power metal épique typé vieux Rhapsody mort et enterré ? Si c'est vrai qu'en ce moment, ce n'est plus très à la mode, Ancient Bards va le faire revivre et plaire aux plus nostalgiques ! Les compositions sont impeccables de bout en bout, révélant à chaque écoute de nouvelles surprises, dosées comme il faut entre des chœurs certes classiques dans le genre, des guitares acérées bien placées en avant et un rythme imparable et mémorisable. Tous ces ingrédients sont réunis pour former un cocktail de choix, soutenu par une production exemplaire, ne souffrant vraiment d'aucun défaut. D'ailleurs, au niveau des solos, chose généralement bien appréciée par les fans de power metal, on ne sera pas déçu, car la technique est tout à fait présente et ces derniers sont très inspirés, donnant un calibre supplémentaire à la musique. Autre bonne nouvelle et petit reproche que l'on pouvait adresser aux italiens l'an passé : garder un côté un peu trop technique et instrumental, parfois au profit de la mélodie, de la voix et de l'émotion. Apparemment, le sextet connaît ses faiblesses car la balance est bien mieux équilibrée dans ce nouvel opus. Même si on ressent également dans la guitare un peu d'influences, leur intégration n'est là que pour en garder le meilleur et garnir la musique de superbes attraits. Autre atout de taille, le clavier tenu par Daniele Mazza, jeune musicien talentueux et usant de son arme avec habileté, extrêmement versatile et aux multiples rôles.
En parlant de talent, il serait criminel d'oublier la belle Sara Squadrani qui tient son rôle de frontwoman avec une aisance et une grâce exceptionnelle … comment ça une chanteuse ? Oui, c'est vrai, les demoiselles dans ce type de combo, c'est plutôt rare, d'habitude on pense tout de suite à un mâle à la voix plutôt haut-perchée. Sauf qu'avec la maîtrise de la jeune femme, le groupe trouve ici l'élément qui complète la musique, car la ravissante italienne n'a aucun mal à chanter sur ce registre si prisé par les hommes. Une voix modulée, qui est tout à fait capable de faire preuve d'émotions (comme le prouve la superbe ballade « All That is True »), qui semble encore plus à l'aise dans ses montées, pourtant déjà réussies par le passé. Vraiment, avec une telle habileté et des cordes vocales comme les siennes, comment reprocher son choix à Ancient Bards ? Elle est un réel pilier pour la formation. Autre bon point, Sara aime le lyrisme sans être lyrique, mais n'en fait pas des caisses, elle n'en a pas besoin.
Du début à la fin de Soulless Child, l'ennui est exclu de la fête. Les guitares qui se taillent la belle part l'empêche d'entrer dans l'univers du sextet, qui est toujours sur le même concept, à savoir la bataille opposant Dorus à Sendor, l'histoire étant vraiment retranscrite merveilleusement bien musicalement parlant, les personnages principaux de cette saga intervenant régulièrement, un peu à l'image de nos power metalleux français à nous, Adrana. Sara se fait versatile et incarne plusieurs des protagonistes, que ce soit la narratrice, le roi ou encore Shena. Tout cela fait ressortir un côté théâtral, et l'utilisation d'une voix extrême sur le morceau « Through My Veins », ce chant incarnant le personnage maléfique Sendor (mais il est vrai que le livret aide également bien mieux à tout comprendre, et à entrer dans le monde fantastique d'Ancient Bards). Ce côté n'est heureusement pas oppressant, au contraire, il accompagne la musique en lui donnant encore un petit intérêt de plus.
Dans Soulless Child, on peut trouver de tout. Les balladophobes seront réconciliés bien rapidement par le splendide piano de « All That is True », avec une Sara à la voix cristalline et poignante, donnant tout dans l'émotion, avant de voir arriver une montée en puissance et un côté très musique de film. Et ça, c'est encore un atout que les italiens développent dans leurs compositions, à savoir celui de la recherche, d'apporter des innovations dans les pistes, et l'effet est prenant ! Que ce soit la partie instrumentale dans « To the Master of Darkness » ou encore les diverses fluctuations dans l'éponyme « Soulless Child », il y en aura pour tous les goûts. Et les titres, eux, sont homogènes en qualité, c'est à dire qu'ils oscillent entre le très bon, l'excellent et le mémorable. Et sans compter l'épique titre final, trois nous arriveront en tête : « Valiant Ride » est une bombe, digne d'un Rhapsody dans ses meilleurs jours, où la chanteuse se livre à un dialogue très bien réalisé avec les chœurs. Ensuite, « Soulless Child » est sombre et inquiétante, on ressent vraiment que l'histoire tourne différemment. Et des instruments qui pondent une ambiance prenante à une voix qui fait merveille, nous sommes comblés. Et puis le single « To the Master of Darkness » et son refrain ne peuvent laisser de marbre les amateurs du style. « Hope Dies Last » et ses 15 minutes sont un condensé de tout le savoir-faire d'Ancient Bards, mais avec toujours autant de raffinement et de classe. Il s'agit sans doute du meilleur titre qu'ils aient composés. Un point majeur dans ce nouvel opus.
The Alliance of the Kings était déjà une très agréable surprise, nous offrant tout le talent et le savoir-faire d'un nouveau venu dont on allait certainement reparlé. Et ce fut exact, moins d'un an plus tard, ils refont parler d'eux, et tant mieux. Un brûlot aussi bien réalisé que ce Soulless Child ne doit pas passer inaperçu et mérite vraiment l'écoute ! Vous êtes déjà en train de faire vos comptes, de vous demander quels albums sont les meilleurs en 2011, pas vrai ? Alors allez faire un tour du côté de l'Italie, vous trouverez un indispensable. Un must-have.