Prophecy Fest
”¨Pour le premier festival de son histoire, le célèbre label Allemand Prophecy Productions a mis presque trois années pour trouver l’endroit idéal pour proposer le meilleur son à ses groupes. Le lieu a été trouvé et il est pour le moins étonnant car il s’agit d’une grotte monumentale située dans la campagne allemande. Maintenant, qu’allait donner cette première et quels groupes seraient présents ? Voyons cela de plus en détail.
1 - Lifelover - 13h15
Malheureusement arrivé vers la fin du set des Stockholmois, on entendait dès l’extérieur la résonance que pouvait avoir ce lieu atypique. Une fois à l’intérieur l’impression se confirme l’acoustique est incroyable un peu comme comme dans une cathédrale mais celle-ci est naturelle. Le son est précis, pas du tout étouffé comme c’est souvent le cas dans un stade ou une grosse salle type Bercy.
Malgré cette très agréable surprise sonore, le peu de temps restant au groupe à jouer ne permet pas d’avoir un avis sur la performance qui est assez applaudie par un grand nombre de spectateurs déjà présents et venus fêter les 10 ans du groupe. Pour ce premier Prophecy Fest, ils ont choisi de jouer des titres de toute leur discographie pour une longue setlist de black metal dépressif, tout un programme…
Setlist :
Intro / Shallow
Mitt Öppna Öga
I Love (To Hurt) You
Välkommen Till Pulvercity
Lethargy
Expandera
M/S Salmonella
Cancertid
Medicinmannen
Brand
Androider
Encore:
Herrens Hand
Nackskott
Vardagsnytt
Besatt
Encore 2:
Spiken I Kistan
En Tyst Minut
2 - Amber Asylum - 15h
Amber Asylum est un groupe exclusivement féminin venant de San Francisco et jouant son premier concert Européen depuis 2001. Naviguant depuis leur début au milieu des années 90 dans un subtile mélange de néo-classique, de post-rock et d’ambient, le quatuor nous livre une musique puissante, sombre et atmosphérique et cela grâce à deux violons, une basse et une batterie.
Le chant lyrique de Kris Force, compositrice et multi-instrumentiste du combo, donne de la profondeur aux titres. Chose peu banale, le chœur souvent présent, est exécuté par la batteuse Becky Hawk (Ex-Laudanum), instrument qui ne l’empêche pas le moins du monde d’assurer ses lignes vocales avec une étonnante aisance. L’ambience particulière du lieu colle à merveille avec celle développée par ce groupe à découvrir également sur album et qui démontre qu’il n’y a pas forcément besoin de riffs rageurs et de distorsions pour faire une musique puissante.
Une belle découverte.
Setlist :
Perfect Calm
Beast Star
Autonomy Suite
Garden Of Love
Harvester
Tot (Candlemass Cover)
Executioner
Auger Of Thrall
3 - Camerata Mediolanense - 16h45
Preuve de l’ouverture d’esprit du label Allemand, voici qu’entre en scène un ensemble italien de néo-classique teinté d’inspiration médiévale et de darkwave qui tranche avec les sorties plutôt métalliques habituelles de Prophecy. Cela dit, ça reste cohérent tant au niveau du festival, après la très bonne prestation d’Amber Asylum mais aussi au niveau des sorties telles que Nhor (en particulier opus le dernier en date) ou la distortion est absente mais l’intérêt musical est bien présent. Les Milanais sont aujourd’hui les gens exceptionnellement accompagné d’un chœur de 30 voix, l’Alto Coro.
Il faut reconnaître que c’est impressionnant et cela prend particulièrement sens dans cet endroit majestueux parfaitement adapté à ce genre de prestation d’autant que le son est encore une fois à la hauteur. Le final plus enlevé et rythmé débutant par une corne est une des partis les plus stimulantes qu’offrirons les Italiens mais c’est surtout la prestation en milieu de set de la charmante soliste Desirée Corapi qui sera le plus beau moment de ce concert somme toute sympathique mais pas transcendant.
Certes, cela est intéressant à voir et à écouter même si l’on est pas fan du genre et le fait que le chant soit essentiellement en italien ajoute à la musicalité de l’ensemble mais cela reste, il faut bien le dire, assez classique et peu novateur. On préfèrera largement leurs compatriotes d’Ataraxia ou bien Arcana ou Irfan sans oublier la référence absolue : Dead Can Dance.
Setlist :
Voi ch'ascoltate
Dolci ire
Canzone all'Italia
99 Altri Perfecti
Solo Et Pensoso
Vago augelletto
O mia stella
Canzone Alla Vergine
Quest'anima gentil
Encore:
L'Homme Armé
Embryo Ventosa
4 - Darhker - 18h30
Voici la première belle surprise de ce festival, Darkher. Projet solo de la chanteuse multi-instrumentiste Jayn H Wissenberg (The Steals) qui nous offre une excellente prestation pour une formation qui n’a sortie, pour l’instant, qu’un très bon EP The Kingdom Filed en 2014.
Présent ce soir en trio avec deux guitares et une batterie sur lequel se pose la sublime voix de Jayn. Le passage live des titres de l’EP plus de nouveaux, confirme le talent du trio et la qualité de composition de l’envoutante et charismatique meneuse rousse. C’est original, tantôt lourd, tantôt éthéré, le tout bien équilibré.
La batterie est écrasante (dans le bon sens du terme) façon doom, la guitare jouée à l’archer par Shaun "Winter" Taylor sur certains titres est très intéressante, les riffs qui font mouche et maintiennent l’atmosphère qu’il soit saturé ou aérien. La classe pour un premier concert en Allemagne sous son nouveau label qui doit certainement être très fier de sa signature et qui à l’avenir, on l’espère, prometteur.
Setlist :
Spirit Waker (intro)
This Hollow Veil
Ghost Tears
Foregone
Lament
Wars
Moths
Hung
5 - Empyrium - 19h45
Nous sommes un peu avant 20h et l’impatience grandit à l’idée de voir et surtout d’écouter ce groupe, maintenant mythique, sur scène et dans cette endroit, il faut bien le dire, assez magique. L’impatience se prolonge car un problème de retour son visiblement dû à un câble venant ainsi retarder le début de ce concert tant attendu. Cela semble d’ailleurs passablement agacer l’ami Markus Stock que l’on voit un peu grincer des dents sur sa chaise et envoyer quelques regards noirs aux techniciens s’affairant à résoudre le problème qui se prolonge plusieurs minutes. D’autres problèmes viendront sporadiquement légèrement ternir le spectacle notamment quelques Larsen et autres vibrations de la caisse claire mais qui se feront oublier tant la magie des mélodies que nous envoient ces musiciens tiennent du grand art.
Dès les premiers souffles de vent de "The Days Before the Fall" sortent des enceintes, le public entier pousse un cri de joie ! L’impact de la musique du combo culte Allemand est immédiat et prend aux tripes du début à la fin. La Balver Höhle est conquise d’autant qu’ils proposent des titres venant de leurs trois albums principalement électriques A Wintersunset..., Songs Of Moors & Misty Fields et The Turn Of The Tides ainsi qu’un nouveau titre le très bon "The Mill" présent sur un vinyle 2 titres exclusivement disponible pour le Prophecy Fest et en guise de rappel un titre plus calme pour finir en douceur, "Many Moons Ago".
Malgré le plaisir de voir ce groupe si rare en live, il y a eu quelques petits défauts et ratés par rapport aux autres prestations connues et aux deux enregistrés, on pense à l’absence de la troisième guitare jouée habituellement par Neige d’Alcest et du violoncelle qui apportent tout deux encore plus de profondeur à leur musique. Ils ont été remplacé par des samples que ont parfois été en décalage, en particulier sur l’excellent "The Franconian Woods in Winter's Silence", subtilement certes mais suffisamment pour être repéré par les fans. Autre léger bémol la setlist, pratiquement idem depuis les premiers et il est vrai très peu nombreux, concerts du groupe. Ceux qui ont eu la chance de les voir et les nombreux autres ayant acquis les lives capturés à Bochum ou Leipzig n’auront que peu de surprise, cela peut paraître anecdotique mais c’est un peu dommage tout de même.
Ces petites remarques n’empêchent en rien le festin auditif auquel nous avons le privilège de profiter d’être splendide et de se sentir vivre un moment de grâce. Il y a Emperor au panthéon du Black Metal mais Empyrium les rejoins presque par l’orthographe mais aussi par son statut de groupe incontournable du Metal et de la musique en général. Fabuleux !
Setlist :
The Days Before The Fall
The Franconian Woods in Winter's Silence
Heimwärts
Mourners
With the Current Into Grey
Lover's Grief
The Mill
Dead Winter Ways
Der Weiher
Encore :
Many Moons Ago
6 - Tenhi - 21h30
Deuxième moment rare de ce festival, la présence des Finlandais de Tenhi, formation de néo-folk qui n’ont pas donnés de représentations depuis huit ans. Malheureusement comme pour Empyrium un problème se pose dès le début, il n’y a pas de retour son et cela durera encore plus longtemps que pour leurs prédécesseurs et ne sera pas résolu, le groupe un peu dépité le prendra avec un peu d’humour et dira que le plus important c’est que le public entende… Ennuyeux pour l’organisation pour un retour après tant d’année d’absence d’un groupe, les sept musiciens feront donc sans et avec maestria.
En effet la prestation du septet est aux petits oignons. Dès les premières notes de piano de "Seitsensarvi", on est transporté dans un voyage à bord d’une des barques présentes sur les magnifiques peintures de Tyko Saarikko. Le voyage s’effectue de nuit au calme, secouant légèrement parfois mais est surtout un peu inquiétant et d’une grande beauté mélancolique. L’écriture des morceaux est très travaillée et fine, l’émotion mise dans chacun d’eux est palpable. Elle passe aussi dans l’auditoire attentif savourant cet instant. Le rappel "Rannalta haettu" marquera la venu de membres de Dornenreich dont Jochen Stock (aka Eviga) également guitariste de session pour Empyrium comme ce soir encore.
Setlist :
Sees (a short intro version)
Seitsensarvi
Pojan Kiiski
Kausienranta
Savoie
Etäisyyksien Taa
Kielo
Uuvu Oravan Luu
Tuulenkaato
Jäljen
Kuolleesi Jokeen
Encore:
Rannalta Haettu (feat. Dornenreich)
7 - Vemod - 23h30
Pour terminer cette longue série de concert marathonienne, une vrai découverte avec les Norvégiens de Vemod. Fondé en 2000, ils ne sortiront leur premier album qu’en 2012 après quelques démos datant de 2004 et 2011. Passant après l’atmosphère calme et planante de Tenhi, la grotte est un peu sur un nuage mais elle commence tout de même à se rafraichir voir, pour quelques uns, à s’assoupir doucement. Il est maintenant un peu plus de 23h30 et on ne sait pas à quoi s’attendre avec cette formation. Plongé dans une lumière bleu et un backdrop vidéo d’étoiles, le quatuor prend possession de la scène, et le mystère demeure sur le style que l’on va découvrir.
Cela commence étrangement par un long solo de voix plaintive durant plusieurs minutes exécuté par le barbu Jan Even Åsli. Ensuite, ils embrayent d’un coup par un black metal atmosphérique (voire spatial comme le suggère l’aurore boréale de la pochette de leur album) particulièrement rapide qui scotche et réveille les neurones bercés par les mélodies de Tenhi. La claque est violente mais vivifiante malgré l’heure tardive et cette douce Morphée qui a déjà terrassée quelques festivaliers encore nombreux dans la cathédrale de pierre de plus en plus froide. L’impressionnant chanteur/guitariste Eskil Blix (Black Majesty) éructe ses screams droit comme un i, le regard fixe et avec une efficacité redoutable. Leur musique est particulièrement redoutable et composé de titres très long mais pas ennuyeux bien au contraire.
Les variations dans les riffs et les atmosphères sont bien réalisées ce qui conclu en fureur et éclat cette première édition du Prophecy Fest. C’est un peu fatigué, mais pour de bonnes raisons, que l’ont quitte cet espace millénaire pour un repos bien mérité, enfin pour ceux qui ne subiront pas l’infernal camping…
Conclusion
Que conclure de cette expérience musicale que nous a proposé le label Prophecy ? Déjà une impression générale très positive, à commencer par l’organisation sans fausse note, accueil excellent et souriant avec en plus offert un magnifique programme en digibook de 48 pages avec une compilation de titres des groupes présents. Idem pour les restaurateurs présents très agréables à défauts de faire de la grande cuisine… Les animations dont des séances de dédicaces de presque tous les groupes font particulièrement le plein et bien sur le grand merch avec presque tout ce qui se fait chez Prophecy. Une expo des magnifiques peintures sur bois de Tyko Saarikko de Tenhi, un intermède poésie contée par Wöljager mais en Allemand… Pas le temps de s’ennuyer donc durant cette journée bien rempli.
Autre grande réussite le choix du lieu, c’est étonnant et insolite avec surement l’une des meilleurs acoustiques possibles, le son est parfait et le fait que l’on se trouve dans la grotte prouve que la nature c’est bien mieux faire en ce domaine que certain concepteur de salle pour restituer et garder un son homogène. Avec une église, la grotte est le lieu idéal pour un concert dans de parfaite conditions. Les ingés son y sont pour beaucoup et on été à la hauteurs de l’événement malgré les petits tracas de retour pour Empyrium et Tenhi. Une récompense pour les créateurs d'un festival affichant complet avec des gens venant d’un peu partout dont une bonne délégation française qui s’est déplacée au milieu de la campagne Allemande pour communier en musique.
Vivement fin juillet pour la deuxième édition qui sera cette fois sur 2 jours et dont l’affiche s’allonge avec de grands noms et des sets exclusifs. On ne peut que vous inviter à y participer au moins une fois, vous ne le regretterez pas !
P.S. : A savoir, si vous comptez venir à la prochaine édition en transport en commun c’est assez long car un peu isolé et la SNCF local n’est pas très ponctuelle non plus. Nous avons été nombreux à ne pas voir Crone et une parti de Lifelover, donc venir tôt car correspondance très aléatoire.
Textes & Photos : Arnaud Dionisio / © 2015
Toute reproduction interdite sans autorisation écrite du photographe.