En voyant un groupe comme Voices of Destiny revenir sur le devant de la scène avec ce Power Dive, il y avait franchement de quoi être sceptique. Déjà, leur premier essai From the Ashes était plutôt mauvais, mais dans un genre comme le metal symphonique à voix féminine, on peut s'attendre à tout. Donc, vu les souvenirs que l'on gardait de cette formation allemande, inutile de préciser que les espoirs n'étaient pas très grands. Toujours signés sur le label Massacre Records, ils reviennent après deux ans, qui, il faut l'espérer, ont été mis à contribution pour colmater les défauts en prenant un peu de recul.
Si le metal symphonique, du fait du succès des grands noms du genre, est un milieu dans lequel il est particulièrement ardu de percer, ce n'est pas forcément pour rien. Le nombre de groupes étant tellement important que pour vraiment y arriver, il faudrait posséder un talent hors du commun, de l'originalité ou une promotion marketing très efficace. Et dans le cas de notre combo allemand, ce ne sera aucun de ces trois points qui retiendra notre attention. Pire, il en est même à remarquer que notre formation ne démontre aucune tentative de sortir des sentiers battus, ni même une personnalité qui leur est réellement propre. Dans l'alternance des chants et les mélodies, le groupe n'est pas foncièrement loin d'Epica parfois, ou de Nightwish à d'autres moments, tandis que la voix plutôt douce de Maike, elle, nous rappellera Sharon den Adel de Within Temptation. En clair, vous comprendrez très rapidement que souvent, Voices of Destiny fait irrémédiablement penser à d'autres groupes. Un point qui ne joue vraiment pas en leur faveur, démontrant leur (pour le moment, qui sait comment ils évolueront) incapacité flagrante à se démarquer d'une masse qui grossit de jours en jours à l'apparition de nouvelles bandes dans le style, qui deviendrait presque surpeuplé. Edenbridge, Visions of Atlantis ou Lunatica, tant de noms qui figurent encore parmi le second peloton du genre, et dans le cas du quintet d'outre-Rhin, c'est plutôt vers ceux-là que la prétention de figurer apparaît.
Pourtant, que ce soit par rapport au premier essai du groupe, ou même par rapport à d'autres combo dans le metal symphonique à chanteuse, Voices of Destiny, avec ce Power Dive, n'a nullement à rougir. S'il existe bien sûr des défauts qui seront à corriger par la suite pour que les allemands nous offrent la pleine mesure de leur potentiel, il subsiste des qualités qui remontent l'ensemble vers le haut (contrairement à la jolie demoiselle de la pochette qui chute). Et déjà, un point qui fait plaisir à entendre, c'est qu'en dépit d'influences encore un peu trop marquées, les allemands démontrent un sens mélodique à toute épreuve. Le brûlot dispose de sympathiques lignes instrumentales ou vocales, et de refrain bien plus fouillés que ce que l'on connaissait de la part du quintet. D'ailleurs, en plus de piocher vers les plus grands, le groupe va également faire un choix plus judicieux en piochant vers d'autres styles pour forger leur musique et nous proposer quelque chose de diversifié, et qui ne manque pas de maturité, à défaut de faire preuve d'une personnalité. Tirant vers le gothique pour le duo vocal qui, il faut le dire, fonctionne très bien (et évoquera donc Epica), le power metal dans quelques lignes rythmiques et pour l'agréable solo de « Kami » (qui ne sera pas si éloigné de Nightwish à l'ère Oceanborn), nos allemands savent prendre les bons éléments pour les incorporer plutôt adroitement. Ainsi, ils ne commettent aucun acte ridicule, ni même cliché, et nous font le plaisir d'éviter soigneusement la parodie de symphonique que l'on retrouve dans trop de groupes. Les orchestrations sont bien à leur place, soutenues par une production très soignée qui sait les poser là où elles doivent être, en rôle de soutien.
Voices of Destiny nous fait également la bonne surprise de proposer un schéma qui n'est pas strictement identique de pistes en pistes. Sans verser dans le progressif, les structures sont suffisamment variées pour que la formation, qui semble vraiment avoir pris confiance en elle, évite les répétitions et l'auto-pompage. Si quelques compositions peuvent avoir un air de déjà entendu (« The Untouchable », malgré sa qualité ou encore « Power Dive »), le groupe a décidément surveillé son propos pour ne pas terminer dans les clichés les plus répandus du genre. Si, bien sûr, tout n'est pas parfait, l'effort joue vraiment en leur faveur. On regrettera, hélas, qu'avec toutes les capacités proposées ici, ils ne se décident pas à prendre plus de risque ! Power Dive est pourtant un opus convaincant mais encore trop cantonné dans une case précise. Et malgré tout le talent dans la création de morceaux, d'atmosphères, il manque encore ce petit truc qui fait toute la différence et qui donnerait envie de réécouter Power Dive infiniment. Pourtant, Voices of Destiny possède quand même quelques arguments de choix, notamment la force de refrains parfois imparables. Ne vous attendez pas à des montées en puissance, ces derniers sont souvent plus en profondeur, jouant sur la voix fragile de Maike Holzmann pour toucher, et cela marche assez souvent.
Il est d'ailleurs très positif de voir que la jeune chanteuse s'est offert quelques galons supplémentaires. Elle qui était encore très hésitante sur le précédent brûlot, avec une difficulté folle à trouver sa place et à convaincre, nivelant From the Ashes vers le bas, elle est au contraire devenue un point fort sur Power Dive. Sa capacité à insuffler de l'émotion est bien plus importante et il semblerait que des cours de chant ont été pris, car au niveau de la justesse, la jeune femme s'en sort désormais très bien. Si elle évoque toujours Sharon den Adel, elle ne se servira pas de son chant pour faire des montées en puissance qu'elle ne saurait maîtriser. Au contraire, sachant quel est son rôle, elle utilise majoritairement de sa douceur et de son côté éthéré pour, grâce à sa voix candide, se fondre dans les ambiances avec beaucoup de grâce. Les growls de Lukas Palme, eux, semblent également avoir progressé, plus puissants et incisifs, même si restant quand même dans la moyenne du genre. Il fait quand même un bon boulot, plus présent que sur la galette précédente, et la complémentarité entre les deux vocalistes est bien assurée.
La mouture n'est pas toujours uniforme en terme de qualité et, pire, elle peut se retrouver un peu bancale, car les titres les plus faibles forment, vers la fin, un petit ventre mou. « Being Worth » est trop plate et met trop de temps à se développer. Les dernières minutes sont intéressantes mais succèdent à trop d'ennui pour plaire. Dans le même genre, « Dedication » est, elle, trop poussive, et ne se démarque pas du lot. Pas une faute de goût majeure, mais si elle avait été un peu plus simple, peut-être se serait-elle fait remarquée davantage. Dommage car l'usage des chœurs, lui, apporte un côté épique plaisant. De même, « The Untouchable » est sympathique, mais ne transcende vraiment pas et ne sera pas retenue dans l'opus. Heureusement le tir est corrigé avec « Your Hands » et « Red Winter's Snow I (Prophets of Doom) », avec des mélodies franchement bonnes, qui donnent envie de réécouter. Et puis, ces deux pistes ont quelque chose d'accrocheur, de frais, et dans ces moments-là, on adore Voices of Destiny, tout comme on l'adore pour « Dreams Awake » et « Kami », et les raisons sont exactement pareilles. Le groupe parvient vraiment à attirer la sympathie par ses belles lignes. Alors que la piste éponyme manque un peu de punch mais n'est pas mauvaise, elle est distancée par « Kami » ou « My Separation », résolument plus marquantes. Même s'il manque encore ce moment qui ferait tout exploser, Voices of Destiny n'en est pas loin.
Les progrès de ce combo allemand sont, avec Power Dive, plutôt conséquents. Mais cependant, il reste encore quelques défauts à corriger pour pleinement convaincre et, surtout, trouver son empreinte qui leur permettra de faire une apparition remarquée dans la catégorie des plus grands. Cependant, ce disque reste au-dessus de la moyenne et prouve que Voices of Destiny est un combo qui a son mot à dire. Le potentiel est vraiment là, il faut maintenant le montrer, le sublimer, faire de cette petite formation une future grande. Et la catégorie des seconds couteaux étant en déclin, notre quintet d'outre-Rhin leur fait un pied de nez car, sans arriver au niveau des plus grands, on dirait bien qu'ils réussissent à se placer presque en transition. Maintenant, le groupe va-t-il se démarquer ? Il faut vraiment faire quelque chose pour ce problème d'originalité.