Après avoir écumé les salles françaises pour pas moins de huit dates, le duo finlandais Korpiklaani et Moonsorrow posait ses valises à Metz en ce mardi soir, pour terminer comme il se doit leur virée hexagonale. Complet depuis plusieurs semaines, le concert a lieu dans le cadre intimiste de la chapelle des Trinitaires qui aura paradoxalement ce soir droit à sa dose de paganisme et autres légendes nordiques.
Moonsorrow
Avec cette configuration étonnante sans première partie, c’est Moonsorrow qui foule les planches en premier alors qu’une bonne partie du public en est encore au stade de l’apéritif. Plus de vingt ans de carrière et de très rares apparitions en tête d’affiche en salle, la venue des Finlandais avait de quoi faire sensation chez les fans lorrains de pagan metal.
La bande à Ville Sorvali arrive sur scène dans l’ombre pour attaquer immédiatement avec « Jumalten Aika », titre éponyme de son dernier album fraichement sorti. D’emblée on est surpris par la qualité du son qui laisse entendre tous les instruments et notamment le clavier de Markus Eurén, si important pour les ambiances déployées par le groupe. Avec leur maquillage sanguinolent, les trois membres mobiles monopolisent le devant de la scène en faisant preuve d’une présence scénique de très bonne qualité. Mais même avec tout cela, le public a tout simplement l’air de s’en foutre, en restant totalement impassible face à la prestation sous les yeux d’un frontman étonné.
Il est vrai que la musique de Moonsorrow est sans doute difficile à appréhender en live pour qui ne s’est pas d’abord penché sur les albums studios. Le folk metal conceptuel dans lequel évolue le quintet est bien loin de la légèreté de l’autre tête d’affiche pour laquelle beaucoup de gens semblent être venus. Il n’empêche que compte tenu de la notoriété du groupe on était en droit de s’attendre à un autre accueil. Heureusement, cela n’enlève rien à la motivation des musiciens et notamment des deux guitaristes Janne Perttilä et Mitja Harvilahti, lequel nous gratifiera d’ailleurs d’un surprenant solo presque rock n’ roll sur « Raunioilla ».
Ce n’est pas un secret, les titres de Moonsorrow sont très long et malgré un large temps de jeu d’une heure trente, seulement huit seront joués. Bien décidé à mettre en avant son petit dernier, la moitié de la setlist sera composée de morceaux de Jumalten Aika, dont le catchy « Ruttolehto » sur lequel Jonne Järvelä débarque l’espace de quelques instants pour un chant solennel du plus bel effet, loin de son rôle d’amuseur dans Korpiklaani.
Parfait dans son chant assez proche du black metal, Ville Sorvali prend le temps de souffler entre les titres en tentant tant bien que mal de communiquer avec le public. Le bassiste/chanteur nous parle de la cathédrale de Metz qu’il est allé visiter plus tôt dans la journée avant de brandir son pendentif de mjolnir pour affirmer son paganisme. Sait-il à ce moment qu’il joue dans une chapelle ? Dans tous les cas, le message passe et l’impression de sincérité qui se dégage de la musique n’en est que renforcée.
En attendant, Moonsorrow régale. Les quelques riffs black de « Suden Tunti » se marient parfaitement avec le reste, de même que les nombreux chœurs typiques du pagan metal effectués par les guitaristes et le batteur. Le groupe n’est pas l’une des têtes d’affiche du style pour rien et on voyage tranquillement en se laissant porter par la dimension presque atmosphérique des compositions.
Alors que la fin du concert approche doucement, c’est « Ukkosenjumalan Poika », rareté issue du premier album qui commence à réveiller le public. Lequel finira en donnant au combo une ambiance bien méritée. Mieux vaut tard que jamais !
A la sortie de scène, Ville remercie tout de même le public conquis sur le tard par la prestation des cinq finlandais, sans oublier de mettre un petit tacle aux spectateurs un peu trop obnubilés par leurs portables. Un set complet de Moonsorrow, c’est en tout cas un beau cadeau que nous a offert Damage Done Prod et une opportunité qui risque fort de ne pas se répéter. Malheur aux absents !
Setlist
Jumalten aika
Raunioilla
Suden tunti
Jotunheim
Ruttolehto incl. Päivättömän päivän kansa
Ukkosenjumalan poika
Ihmisen aika (Kumarrus pimeyteen)
Sankaritarina
Korpiklaani
La batterie sur laquelle trônent des bois de cerfs, symbole de Cernunnos donne déjà le ton aux spectateurs présents. Les échos de Paris et de la performance désastreuse de Jonne Järvelä sont dans toutes les têtes avant l’entrée en scène de Korpiklaani. Heureusement, les Finlandais ne vont pas mettre plus de quelques morceaux à montrer qu’il ne s’agissait là que d’un accident de parcours, bien aidés par une fosse qui explose dès leur arrivée sur scène.
Avec une salle complète complètement acquise à leur cause, on se rend compte à quel point les six musiciens sont bien le groupe de folk metal le plus populaire chez nous. Toujours en promotion du récent Noita, l’album est très bien représenté dès le début du concert avec « Viinamäen mies », « Pilli on pajusta tehty » mais surtout le très bon « Lempo » où l’accordéon et le violon viendront se livrer une très belle bataille de solos.
Les musiciens ont d’emblée le sourire aux lèvres, bien contents de la réaction du public et de la communion qui s’installe progressivement. Là aussi, tout est parfaitement carré avec un show rôdé notamment du côté de la section rythmique où Jarkko Aaltonen étonne toujours par son allure, pieds nus et semblant sortir tout droit d’un peuple nain de la Terre du Milieu. Le son est une nouvelle fois très bon tout en ne dépassant que rarement les 100db, chapeau messieurs les ingénieurs !
Loin d’être complètement sobre, Jonne Järvelä réussira à s’en sortir sans mal même si sa voix a du mal à suivre sur certains titres. Le frontman parcourt la scène et se rapproche parfois au plus près du public pour chanter ses titres en finnois parfois repris par quelques spectateurs. Mais le plus remuant du lot est sans conteste le virevoltant accordéoniste Sami Perttula qui maitrise en plus de cela son instrument à la perfection. Le groupe ne fait pour ainsi dire aucune pause entre les titres et ne communiquera quasiment jamais à l’exception d’un ou deux timides « merci ». Sans être dérangeante en elle-même, cette absence de communication participe quand même au sentiment global d’un concert un peu distant et manquant d’un chouia de spontanéité. Dommage.
Il est en tout cas intéressant d’observer les variations dans la musique du combo. Les instruments folkloriques de Tuomas Rounakari et Sami Perttula prennent parfois le dessus mais l’équilibre est parfaitement rétabli sur des mid-tempos plus heavy comme « Rauta » où les riffs de Kalle Savijärvi font merveille. Mais même avec cela, 1h40 de concert c’est long et on ne peut s’empêcher de constater un passage à vide, sorte de ventre mou du set où l’on perd un peu le fil de la prestation.
Heureusement, tout repart de plus belle avec la festive « Karhunkaatolaulu » où une vague de slammeurs commence à s’abattre sur la sécurité, jusque-là très tranquille. C’est aussi à partir de ce moment que Korpiklaani se décide à sortir ses hymnes à la boisson les plus connus avec tout d’abord « Wooden Pints » puis un court rappel constitué de « Vodka » et « Beer Beer » pour clore le concert alors que le batteur de Moonsorrow s’invite sur scène pour quelques percussions. Dommage de ne pas avoir eu droit à « Tequila » ou encore la cover de Motörhead « Iron Fist » que les Finlandais jouaient encore au début de l’année.
Au final, cette affiche associant deux genres totalement opposés de folk metal aura offert une soirée très agréable. Malgré un show peut-être un peu trop rôdé, Korpiklaani a fait le spectacle et ravi le public présent si l’on en croit les sourires à la sortie de la salle. On ne peut qu’espérer que le succès de cette tournée de huit dates françaises donnera envie à d’autres groupes de s’attarder autant dans nos contrées.
Setlist
Viinamäen mies
Journey Man
Pilli on pajusta tehty
Kantaiso
Lempo
Ämmänhauta
Erämaan Ärjyt
Ruumiinmultaa
Petoeläimen kuola
Sumussa hämärän aamun
Vaarinpolkka
Rauta
Kipumylly
Metsämies
Kultanainen
Minä näin vedessä neidon
Palovana
Sahti
Karhunkaatolaulu
Kylästä keväinen kehto
Wooden Pints
Vodka
Beer Beer
Photos : Clémentine Desloges