Freedom Call – Land of the Crimson Dawn

La formation allemande menée par Chris Bay s'est-elle remise du départ de Dan Zimmermann, batteur et co-compositeur du groupe, qui a désormais décidé de se consacrer à Gamma Ray ? Freedom Call était face à un défi de taille en abordant cette nouvelle oeuvre, intitulée Land of the Crimson Dawn et sortie ce vendredi 24 février 2012 chez SPV/Steamhammer. Retour aux sources d'un happy power metal hymnesque ? Poursuite dans un esprit "party fun" ? Approfondissement d'une tonalité plus dark moderne déjà aperçue sur Dimensions et surtout sur le très réussi Legend of the Shadowking ? On sentait bien le chanteur-guitariste-compositeur quelque peu perplexe sur l'explicitation de certains choix lors de l'interview qu'il nous a accordé il y a quelques semaines, insistant pourtant sur le fait qu'il avait laissé le "feeling du moment" guider ses idées et son écriture. Et si c'était cela le problème sur ce nouvel opus ?

Vous l'aurez compris, sans détour d'un préambule tout en interrogation, ce disque n'est pas le meilleur album de Freedom Call. En fait nous sommes quelque peu perdus l'écoute de cette nouvelle offrande, comme si Chris et ses amis avaient voulu trop en faire sans pour autant prendre le temps de travailler quelques détails ou approfondir certaines idées. Une sorte de melting polt global de toutes les influences Freedom Calliennes sans véritable ligne directrice, le long d'un voyage entre passé nostalgique et modernité actuelle qui dure en fait bien trop longtemps. 14 morceaux pour 63 minutes de musique, il y a un moment où l'overdose guette, surtout quand on passe d'un titre à l'autre sans trop comprendre ce qui se passe. Evidemment, en laissant aller le fun, l'album passe plutôt bien et jouit de certains moments assez intenses. Mais voilà, au bout de deux écoutes nous avons vite fait le tour, et lorsque vient le temps de l'analyse on ne sait plus trop à quel saint se vouer.

Séparé en plusieurs parties se chevauchant les unes les autres dans un certain fouilli, Land of the Crimson Dawn présente tout d'abord un hommage certains aux Crystal Empire et Eternity. A plusieurs moments on se croirait revenu dix années en arrière, le temps de quelques hymnes qui font plutôt mouche si on se laisse aller sans trop se poser de questions. Après tout, la quasi-éponyme "Crimson Dawn" mélange pas mal de morceaux ayant figuré sur Eternity, entre "Metal Invasion", "Warriors" et "Ages of Power" (remember son break en voix dark extrême). En gros, le morceau est très sympathique, mais certains détails l'empêchent d'atteindre les sommets - dont un sur lequel nous reviendrons plus tard. D'autres semblent encore plus évidents dans cette orientation nostalgique : "Back Into the Land of Light" a un titre plutôt clair qui ne peut que faire suite au glorieux "Land of Light", tandis que "Valley of Kingdom" semble quelque peu singer "Ocean" sur son refrain. Quoiqu'il en soit, ce dernier morceau fait partie des réussites happy power du disque, en compagnie des "Age of the Phoenix" (en introduction bien directe "in your face" - peu être un peu trop) ou le speed finement écrit "Space Legends".

Freedom Call 2012 SPV

Or Freedom Call ne s'arrête pas sur son passé et tente de poursuivre son orientation plus sombre et "futuriste" sur quelques morceaux bien moins convaincants que les "The Darkness" ou autres "Dark Obsession" d'un précédent brûlot qui restera pour l'instant à la profondeur inégalée. "Sun in the Dark" manque par exemple cruellement de corps sur un thème qui aurait pu offrir un moment bien plus marquant, "Terra Liberty" s'enfonce dans des couplets sans inspiration et un refrain bien trop enjoué pour l'ambiance, quant à "Killer Gear" il constitue une sorte de raté magistral (worst Freedom Call chorus ever?) malgré un riffing efficace. Bien dommage. Reste la mid tempo dark/pseudo ballade "Eternity" qui, bien que simpliste, apporte une certaine émotion avec un refrain cliché mais très réussi ("flying free like an eagle, on the way to eternity").

Là où le combo germanique réussit le mieux, c'est très certainement sur le second degré et la "non prise au sérieux". Ainsi les titres les plus drôles ou simplistes s'avèrent intéressants, "Hero on Video" n'apporte aucune ambition mais fonctionne en mode quasi pop new wave - accompagné qui plus est d'un clip des plus kitsch et délirant. "Rockin' Radio" offre même un vrai combo "headbang/je tape du pied" plutôt inattendu, son côté rock punk mélangé aux touches 80s en faisant un petit hymne assez classieux. Un bémol cependant, la conclusion "drinking song" (une routine depuis Dimensions) est bien moins intense que ses prédecesseurs, "Power & Glory" ne rivalise donc pas avec sa grande soeur "Far Away" ou l'hommage indirect à Plastic Bertrand "A Perfect Day". Passons enfin sur "66 Warriors", morceau sans grand intérêt si ce n'est le comptage du nombre de fois où le mot "warrior" est cité. 70, et non 66, c'est ce qu'on appelle un petit fail Mister Bay...

Et la cohérence dans tout ça ? "On s'en fiche" avanceront certains. A ce moment-là autant sortir un best of et on ne pourra pas souligner cet écueil. Non, il s'agit bien là d'un album studio, sans concept particulier certes mais qui se doit de proposer un certain liant. Le côté fourre-tout fait qu'on a du mal à terminer l'album sans avoir oublié les premières pistes, et lorsqu'on recommance son écoute on ne sait déjà plus comment il s'est terminé. Chaque titre prit a part mérite clairement sa chance, à degrés divers bien évidemment, mais sur CD une certaine lourdeur nous assaille.

Plus tôt dans cette chronique, nous parlions de "détails dérangeants", dont un assez équivoque. Le remplacement de Dan Zimmermann s'est en effet fait dans la douleur. Alors non, Klaus Spierling est tout sauf un mauvais batteur, mais ce dernier se défoule bien mieux sur un Nitrogods (son autre groupe dont nous avons causé ici) qui propose un aspect musical diamétralement opposé à Freedom Call. La comparaison avec Dan s'avère donc inévitable, d'autant plus que le son des percussions n'est absolument pas mis en valeur, la faute à une production assez rustre manquant à certains moments de profondeur (le mixage des guitares est clairement à revoir par endroit). Rien de mauvais là non plus, mais Land of the Crimson Dawn doit une partie de sa fadesse à ce son quelque peu mécanique laissant par exemple les claviers très en retrait.

Mécanique, en pilotage automatique, cet album recelle de quelques passages pourtant convaincants mais la recette ne prend pas. Le gâteau est goûtu mais nous noue assez rapidement l'estomac, tant est si bien qu'on a du mal à en reprendre. Dommage. Mais laissons Freedom Call s'habituer à sa nouvelle mouture, Chris et ses compères doivent à présent apprendre à vivre sans Dan Zimmermann et ce "premier opus d'une "nouvelle ère" en est la preuve. Pour cette raison, la note ne sera pas trop sévère, car après tout il faut savoir laisser le temps au temps...

 

NOTE DE L'AUTEUR : 6 / 10



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