Borknagar au naturel...
Jens F. Ryland (guitare) nous explique la genèse du neuvième album de Borknagar, comment fonctionne le groupe, l’évolution de leur musique depuis ses débuts ainsi que celle du Black Metal depuis 20 ans… Tout un programme n'est-il pas ?
Lionel / Born 666 : Peux-tu nous présenter Urd ?
Jens F. Ryland (guitare) : Urd est le neuvième album de Borknagar. Avec cet album on accueil le retour de ICS Vortex dans le line up. Il nous avait quitté en 2000 pour jouer dans Dimmu Borgir. On est aussi retourné chez Century Media. Urd prend quelques nouveaux chemins musicaux car d’un côté on a 3 chanteurs distincts qui ont participé fortement à l’élaboration de cet album et de l’autre parce que nous avons travaillé avec Jens Bogren (Fascination Street) pour le mix et il a réellement contribué à l’amélioration de l’album.
Lionel : Quels sont les messages que l’on peut trouver derrière Urd ?
Jens : Je suppose que le symbolisme est une allusion que nous regardons derrière nous un peu avec cet album, et la pensée principale est aussi due au retour d’ICS Vortex. Urd est l’un des trois Nornes, celle qui file le passé sur la trame du destin. (NDLR : Ces Nornes peuvent être bienveillantes ou malveillantes ; elles étaient considérées responsables respectivement des évènements heureux ou malheureux de la vie). Les gens s’attendent déjà à une trilogie, mais laissons voir ce qu’il va se passer.
Lionel : Quand trouvez-vous le temps pour travailler sur tous vos différents projets ?
Jens : Comme on le dit ici : « si vous en avez beaucoup dans votre assiette, vous devez en faire plus ». Pour être honnête je ne suis pas sur moi-même de savoir comment on l’a terminé en réalité, mais on l’a fait. J’ai été assez occupé cette année et j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler dessus.
Lionel : Quelles sont les principales différences entre Universal, votre précédent album et Urd ?
Jens : Tout d’abord je crois qu’individuellement les chansons sont encore plus puissantes que sur Universal. Sur Universal nous avions des airs musicaux très forts comme « The Stir Of Seasons » et « Worldwide » qui font partis de mes préférés. Mais Urd n’a pas de point faible. Ainsi, avec le travail de Jens Bogren sur le mix final, vous pouvez maintenant entendre tous les détails de chaque titre. Nous avons toujours fait de la musique comme ça, mais ça a été difficile de le comprendre par la production. Cela a été éclairci maintenant.
Lionel : Comment avez-vous travaillé sur l’album ?
Jens : Très différemment et d’une façon fragmentée. Pour la première session avec la batterie nous étions à Toproom pour une semaine, mais après cela nous y sommes seulement retournés 1 jour ou 2 de temps en temps pour faire un peu le tri. Vintersorg a fait toutes ses parties vocales dans son studio, pendant que Vortex et Lazare enregistraient à Toproom. J’ai aussi fait toutes les bases des guitares à Toproom, mais mes solos ont été enregistrés dans mon propre studio. Nous utilisons Cubase et Dropbox et ça marche brillamment pour nous.
Lionel : Dans quelle direction voulez-vous emmener votre Black Metal dans 10 ans ?
Jens : Je ne pense pas que ce soit facile de le prédire. Chaque album est un peu le résultat du précédent, le feedback qu’on en a eu, l’humeur du groupe, les différentes influences et les dérives. C’est difficile de se projeter dans 10 ans.
Lionel : Qu’est ce qui influence Borknagar dans son processus de création ?
Jens : La nature sauvage et les paysages norvégiens ainsi que les paysages et les saveurs bien évidemment. J’appelle habituellement Borknagar « la critique subtile de la société », donc cela veut dire aussi que la société et l’hypocrisie nous inspire aussi.
Lionel : Dans 3 ans Borknagar aura 20 ans. Allez-vous faire quelque chose de spécial pour fêter cet anniversaire ? Un énorme concert avec tous les anciens et nouveaux membres du groupe ?
Jens : C’est une bonne idée, mais il me semble que ce soit un sacré boulot…
Lionel : Avec tous ces anciens et actuels membres de Borknagar, est-ce que tu réalises que vous êtes un peu comme le « All Stars Black Metal Band » ?
Jens : Yeah ! Cela avait un certain sens il y a 10 ans, mais maintenant tout le monde a joué dans tous les groupes, et je ne pense pasque ce soit un truc génial désormais pour les gens. Si tu me regardes par exemple, je joue dans ICS Vortex, lequel est déjà impliqué avec Terje "Cyrus" Andrersen (Susperia, Dimmu Borgir), Asgeir Mickelson (Testament, Borknagar, Ihsahn, Vintersorg, Sarke), Steinar "Azarak" Gundersen (Satyricon, Sarke) et ensuite il y a le projet Artisan dans lequel Mustis (Dimmu Borgir) est impliqué.
Lionel : Quels sont vos principales influences maintenant, presque 20 ans après la création du groupe ?
Jens : Ce n’est pas facile de répondre, c’est un peu come un collage maintenant, je suis inspiré par de bonnes productions, par les bonnes performances, par la détermination, l’aperçu des affaires, les solos de guitare, la chance et tout cela. Je peux aussi être inspiré en regardant Rhianna mais pour d’autres raisons. (rires) Je ne peux en citer plus…
Lionel : On a souvent vu des racines dans les illustrations de vos albums, Empiricism, Epic et maintenant il y a même un titre appelé « Roots » (racines). Quelle signification cachée peut-on y trouver ?
Jens : Je pense que vous regardez les racines car elles sont importantes pour vous. Ce sont les premières briques d’une construction et c’est important pour nous de rester proche d’elles.
Lionel : Sur l’album Epic les titres étaient plus folk, Pagan. Sur Quintessence plus Black Metal. Comment décrirais-tu Borknagar depuis 3 ans ?
Jens : Je pense que quelques mots clés sont concentrés, inspirés, adaptés Nous avons tous des vies qui donnent au groupe un endroit important où l’on peut se défouler et s’exprimer. Le groupe que vous avez vu évolué est tout simplement un groupement d’être humain.
Lionel : Le folklore est de moins en moins présent pour laisser place à un Metal progressif avec un feeling atmosphérique. Quels sont les chemins qui vous ont permis d’y arriver ?
Jens : Je ne peux expliquer cela que par un un parcours naturel que nous suivons. L’ensemble des membres de Borknagar est entièrement concentré sur le développement du groupe et je crois que la confiance entre nous vient avec l’âge. Et tout ces éléments musicaux présents depuis toujours ressortent avec le temps, mais cela n’a pas encore été entièrement utilisé. Chacun d’entre nous aimons un spectre beaucoup plus large de la musique allant au-delà du Black Metal traditionnel et ce serai étonnant que l’on ne s’y plonge pas plus en profondeur. On a toujours un profond respect du Black Metal original du début des années 90 mais nous sommes un groupe qui sait évoluer.
Lionel : Pensezvous justement que ces groupes du début des années 90 sont de plus en plus progressifs ?
Jens : Je pense que la plupart de ces groupes ont fait un long chemin depuis. Regarde Immortal ou Satyricon. Je pense qu’Enslaved, tout comme nous, est celui qui s’en ai le plus éloigné. J’ai toujours dit que j’étais dedans pour la musique. Je pense que ceux qui restent dans le vieux style y sont plus pour l’idéologie ou l’image. Je ne pense plus que l’image des corpsepaints et des crucifix avec tout ce qu’il y a derrière soit encore efficace de nos jours…
Lionel : Allons-nous avoir la chance de voir Borknagar sur scène cette année ?
Jens : J’ai bien peur que non. J’ai du mal à convaincre les autres membres du groupe à partir en tournée…
Lionel : Merci beaucoup et encore félicitation pour votre album.
