A l'occasion du passage de Children Of Bodom au Download Festival France, nous avons eu l'occasion de rencontrer Alexi Laiho, le chanteur et guitariste de la formation. Il nous parle de l'évolution du groupe, notamment depuis le départ du guitariste Roope Latvala, ainsi que de leur dernier album I Worship Chaos, sorti en octobre 2015.
Bonjour Alexi, merci de nous accorder cette interview ! Comment vas-tu ?
Alexi: Très bien. Avant-hier on a joué en Autriche, on a eu une journée de repos hier, donc on est en forme pour le concert d'aujourd'hui. On entame la période des festivals d'été... Malgré la météo capricieuse aujourd'hui !
Votre dernier album I Worship Chaos est sorti en octobre dernier, j'ai cru comprendre que Roope était toujours dans le groupe au moment de la composition des morceaux, mais c'est toi qui as enregistré toutes les guitares suite à son départ. Penses-tu que ça ait influencé le son de l'album ?
A: Oui, je pense que ça s'est vraiment révélé être positif de jouer moi-même toutes les guitares. C'était beaucoup de travail mais peu importe, c'est ce que je fais, je joue de la guitare. Je pense que les guitares sont plus resserrées. Ce qui fait sens vu qu'une seule personne joue toutes les parties de guitare. On a passé beaucoup de temps en studio et on a travaillé très dur pour obtenir ce résultat. Le départ de Roope est survenu quelques jours seulement avant notre entrée en studio pour enregistrer l'album, on n'a pas eu le temps de penser à quelqu'un d'autre pour le remplacer. On y est juste allé comme ça.
Ce dernier album a également un son plus lourd, c'est une chose sur laquelle vous avez particulièrement travaillé ?
A: Oui, on a changé l'accordage des guitares, on est juste un cran en dessous, ce n'est pas grand chose mais en même temps ça fait une grande différence... Ça sonne plus lourd et la musique est plus catchy, peut être pas les riffs mais en tout cas les structures, elles, sont plus simples. Les morceaux restent bien en tête.
Est-ce que tu vois I Worship Chaos comme un retour aux racines ?
A: Oui et non. Je pense qu'à certains niveaux oui. Mais en même temps il y a beaucoup de choses qu'on n'avait jamais faites et qu'on a incluses dans cet album. Ce n'est pas comme si on avait essayé de copier nos deux premiers albums. Quand j'écris, je ne pense pas à tout ça, je prends ce qui me vient le plus naturellement possible. Je pense que si j'y réfléchis trop, si je me demande à chaque fois comment les fans vont réagir... Il serait clairement impossible de se concentrer !
De ton point de vue, comment le départ de Roope a modifié l'équilibre du groupe ?
A: Oui ça a forcément changé quelque chose. En tout cas, ça a rapproché le reste du groupe. Tout le monde a redoublé d'effort pour que l'album soit aussi bon que possible. On a essayé de ne pas voir ça du mauvais côté, puisqu'au final ce qui est arrivé s'est révélé plutôt positif. On s'est concentré là-dessus.
Le clavier est plus mis en avant sur cet album. Pourquoi ce choix ?
A: Je ne sais pas, je n'ai pas forcément eu l'impression qu'il ait été plus en retrait, mon jeu étant toujours assez proche du clavier, je l'entends toujours. Le clavier a toujours été présent c'est juste que sur les derniers albums il doublait plutôt la guitare et ne ressortait pas plus que ça. C'est peut-être aussi le fait de faire ressortir un peu le clavier qui apporte à ce nouvel album un côté old school, qui se rapproche plus de nos débuts.
Il y a un morceau sur cet album qui a demandé plus de travail, d'efforts, et dont tu es particulièrement fier ?
A: Oui en fait il y en a plein... (rires) ce qui est une bonne chose ! Le single "Morrigan" par exemple. On l'a beaucoup mis en avant, on va dire que ça ne compte pas. Donc je vais plutôt te dire "Prayer for the Afflicted" qui est un morceau très sombre. Et en ce moment c'est mon morceau préféré de l'album. Ça change tout le temps, mais en ce moment c'est celui-là, sans raison apparente.
Comment vous choisissez les reprises que vous incorporez à vos albums ?
A: C'est assez naturel, chacun peut ramener quelque chose. On a toujours essayé de choisir des morceaux qu'on n'attendait pas forcément venant de nous. Mais d'un côté, on a été tellement loin avec ça, je pense qu'on ne pourrait pas faire plus, je veux dire... On a quand même repris Britney Spears, des trucs comme ça. Et ce serait complètement stupide de notre part de revenir à ce genre de chose. Maintenant c'est plutôt que chacun amène ses propositions. Notre batteur à proposé "Danger Zone" de façon un peu aléatoire, parce que Top Gun passait à la télé ou un truc comme ça. Tout le monde aime ce morceau. Dernièrement j'ai beaucoup écouté les Plasmatics par exemple, avec Wendy O' Williams. Et un de mes amis a suggéré qu'on reprenne ce titre donc on l'a fait.
Plutôt surprenant venant de vous d'ailleurs, mais c'est une excellente idée.
A: Oui au final c'est assez cool, ça rend bien. Franchement, des trois reprises qu'on a pu faire sur cet album celle-ci est ma préférée.
C'est important pour vous de ne pas vous prendre trop au sérieux ? Reprendre un morceau Britney Spears, ce n'est pas rien...
A: Oui, c'est sûr. On a toujours été comme ça. On s'est toujours beaucoup éclaté et surtout en faisant ces reprises. C'était aussi un moyen de partager ça avec nos fans et de leur montrer qu'on pouvait rire de nous-mêmes. Parfois on fait peur aux gens... Je me souviens qu'en sortant la reprise de Britney certains fans étaient scandalisés, du genre "oh mon dieu, qu'est-ce que c'est que cette merde, plus jamais je ne veux voir ce groupe" (rires). Tandis qu'une autre moitié de fans comprenait totalement le délire. Mais globalement cette reprise avait été bien accueillie. Puis il faut se dire que la plupart de ces gens étaient assez jeunes. Quand j'avais 14 ans, si un de mes groupes préférés avait repris une putain de chanson de Madonna ça m'aurait gonflé ! (rires) Mais ces réactions m'ont fait rire. Et de toute façon, du moment qu'on a une réaction c'est cool.
Après maintenant 20 ans de carrière, comment tu perçois l'évolution du groupe ?
A: C'est assez fou. Je n'y pense jamais trop parce qu'on a toujours la tête dedans et qu'on prend rarement du recul là-dessus mais... 20 ans, c'est incroyable. Jamais on aurait pensé en arriver là, surtout en gardant quasiment le même line-up. Je pense qu'on se connaît tous tellement bien maintenant, aussi bien musicalement que personnellement, que c'est vraiment facile pour nous de travailler ensemble. On sait exactement comment on fonctionne. Évidemment, il arrive parfois qu'on ne soit pas d'accord sur les morceaux ou autre, et c'est juste quelque chose de normal. Mais après 20 ans à tourner et à enregistrer on a appris à se connaître et à travailler ensemble. On a vraiment un respect mutuel pour chacun d'entre nous. Je pense que c'est un truc vraiment important de se respecter et de pouvoir dialoguer, même des choses qui ne vont pas. Ça nous énèrve dix minutes, c'est nul, mais après ça va mieux... Si on garde tout pour soi ça va s'accumuler au fil des années et forcément mal se terminer... Après on explose, et on pourrait finir par tuer quelqu'un donc... (rires) Je sais que c'est super cliché de dire ça mais ça ressemble beaucoup au mariage ou à une famille. On ne peut pas vivre une idylle parfaite pendant 10 ans, mais il faut le vivre !
Est ce que le fait d'être plus âgé, plus mâture peut être, influe sur la façon dont tu écris ?
A: Oui bien évidemment mes différentes expériences viennent nourrir cela. Mes expériences jouent un grand rôle dans ma musique. C'est important pour moi de vivre et d'avoir quelque chose à dire. On fait forcément des erreurs et on apprend de ces erreurs... J'essaie de faire de mon mieux, et je suis toujours en vie, donc c'est quand même quelque chose ! (rires) C'est encore un gros cliché mais la musique est vraiment une thérapie pour moi, ça me permet de canaliser tout ce qu'il peut y avoir de négatif en moi. Et si quelque chose de mauvais arrive dans ma vie, sans que ce soit une catastrophe évidemment, ça se retranscrit dans ma musique. Je n'ai pas toujours été comme ça, plus jeune j'étais plus impulsif, plus énervé et j'essaie désormais de mettre ça de côté et de l'utiliser pour faire de la musique. J'essaie juste de me dire "Mec, ne fais pas un truc con, écris plutôt une chanson. Ne saute pas du haut de cet immeuble." (rires)
Vous travaillez déjà sur un nouvel album?
A: Pas encore ! J'ai quelques paroles mais rien de concret. J'attends que la tournée soit terminée.
Tu n'aimes pas écrire en tournée?
A: Non, sauf pour les paroles. J'ai des idées mais je n'ai pas vraiment le temps de les mettre en forme. Je connais beaucoup de gens qui arrivent à faire ça mais je n'ai jamais réussi à mélanger les deux. Une fois que la tournée est terminée je m'assoie avec ma guitare et j'essaie les idées que j'ai pu avoir ici et là, car j'ai la chance de me souvenir de mes idées de riffs et compagnie, j'ai une bonne mémoire pour ça... je ne me souviens jamais de quel putain de jour on est mais ça je m'en souviens ! (rires)
Merci Alexi de nous avoir donné un peu de ton temps. Un dernier mot pour les fans français ?
A: Un grand merci à tout le monde, on adore nos fans français et on adore jouer ici !