Deux ans seulement, c’est le temps qu’il aura fallu à Blues Pills pour prendre d’assaut la scène rock vintage et en devenir l’une des principales têtes d’affiche. Sorti du lot avec un premier album exceptionnel, la pression sur les épaules du quatuor était forte à l’heure de la confirmation et du deuxième album. D’autant qu’avec Lady in Gold, Blues Pills ne se repose pas sur ses lauriers et tente le pari osé de l’évolution.
Alors que le premier album éponyme centrait son approche rétro sur la guitare de Dorian Sorriaux pour un résultat bluesy, on s’éloigne complètement ici de ce genre de standards. Les synthés ont fait leur apparition en force dans les compositions et relèguent presque les autres instruments au second plan. Il suffit d’écouter les deux titres d’introductions, « Lady in Gold » et « Little Boy Preacher » pour se rendre compte que le propos est presque devenu disco !
Assez ambitieux, Lady in Gold regorge de petites fioritures et arrangements comme ces chœurs presque soul qui accompagnent Elin Larsson sur de nombreux refrains. Avec ces nouveaux éléments on se dit que même la configuration live du groupe pourrait changer (ce qui est déjà le cas avec l’intégration du claviériste Rickard Nygren aux concerts).
Point d’orgue de cette transformation, la ballade « I Felt A Change » devrait cristalliser les critiques quant à l’absence de guitare. On retrouve là les capacités vocales surnaturelles d’Elin mais dans une chanson qui pourrait très bien figurer sur un album d’Adele. Si le résultat n’est plutôt pas mal, il peine à atteindre le niveau d’émotion d’un « Little Sun » par exemple. La signature vocale de la frontwoman est en tout cas bien la seule chose inchangée chez Blues Pills et c’est un vrai plaisir de la retrouver sur ces dix nouvelles compositions.
Vous l’aurez compris, les interventions de Dorian Sorriaux à la guitare sont moins nombreuses qu’auparavant et c’est bien dommage tant le garçon possède un talent certain. Au-delà de cette déception, la nouvelle direction musicale de Blues Pills a de quoi rendre sceptique. Au fil des titres, on passe de titres tout juste sympathiques rappelant Blue Öyster Cult ou Thin Lizzy (« Won’t Go Back » et « Rejection ») à de vraies déceptions comme « Bad Talkers ». Difficile de savoir où le groupe veut vraiment en venir contrairement au premier album qui était remarquablement bien construit.
Heureusement, quelques compositions sortent tout de même du lot et prouvent à elles seules que les musiciens n’ont rien perdu de leur talent. Sur « Burned Out », la basse de Zack Anderson a l’occasion de s’exprimer avec un riff d’introduction imparable, repris plus loin par la guitare. « Gone So Long » est quant à elle un exemple de mutation parfaitement réussie puisque le nouveau style du combo est plus digeste, les chœurs se font plus efficaces et un superbe solo de Dorian vient conclure le titre.
Comme sur l’album précédent, une reprise est présente et c’est sans surprise « Elements and Things » de Tony Joe White, déjà jouée en live depuis un bon moment que l’on retrouve. On retrouve ici la veine plus énervée de la musique de Blues Pills avec ses rythmiques rapides quasi absentes du reste de l’album. Dommage également de ne pas avoir inclus « Yet To Find » au résultat final, le titre se serait bien marié avec le reste et aurait apporté à l’album une plus-value certaine.
Au final, la mue de Blues Pills risquée sur le papier peine effectivement à convaincre sur cet album, la faute à des compositions moins personnelles qui empruntent davantage au standards pop, rock et soul des années 70 en vrac. Leur transcription en live permettra peut-être de les faire rentrer dans le cœur des fans mais pour l’instant, on peut se dire qu’on était en droit d’attendre un peu mieux. A charge de revanche pour un groupe dont la carrière ne fait que commencer et qui peut bien se permettre une petite erreur de parcours.