Au sein de la scène metal, nombreuses sont les formations à n’avoir jamais obtenu le succès qu’elles escomptaient, en dépit d’un talent certain. Anata fait indéniablement partie de celles-ci, mais la réédition en vinyle de son premier album, The Infernal Depths of Hatred, est l’occasion pour nous de réhabiliter le combo suédois de death metal aux yeux des amateurs du genre. Initialement paru en 1998, cet album s’éloigne pourtant des standards du death suédois, alors trusté par la scène de Göteborg (In Flames, Dark Tranquillity) d’un côté, et celle de Stockholm (Grave, Unleashed, Entombed) de l’autre.
Lorgnant d’avantage vers la technique et la fureur de ses compositions, parfois émaillées d’une touche à la Morbid Angel (« Those Who Lick the Wounds of Christ »), le quatuor emmené par Fredrik Schälin (chant, guitare) propose sur The Infernal Depths of Hatred un death metal efficace et d’une maturité impressionnante pour un premier disque. Puisque nous évoquons Morbid Angel, signalons la présence sur cette réédition vinyle, d’une reprise du « Day of Suffering » des Américains (initialement présent sur Blessed are the Sick, 1991) au tempo ici accéléré et totalement endiablé par rapport à l’original.
Sur l’ensemble de l’album, outre la maîtrise instrumentale, ce qui frappe l’auditeur c’est le timbre particulier de Schälin, éraillé sans pour autant sacrifier de puissance vocale. Celle-ci est d’ailleurs bien renforcée par l’ajout d’une légère reverb donnant beaucoup de profondeur au growl, sans pour autant que celui-ci ne sonne caverneux. La voix flirte d’ailleurs régulièrement avec les hurlements proches du black metal (« Aim not at the Kingdom High »), ce qui renforce la diversité du chant. De plus, on apprécie particulièrement l’équilibre savamment dosé entre musicalité et technicité, qui font que l’ensemble des huit pistes de l’album sont des petits bijoux.
Pour l’époque, la production de cet opus est excellente, mettant bien en avant la bestialité et l’énergie dégagée par le combo (« Released When you are Dead », « Vast Lands/Infernal Gates »), sur des titres qui restent accessibles pour l’ensemble des amateurs de death metal. En effet, Anata base son propos sur un riffing parfois classique aux relents heavy metal (« Aim not at the Kingdom High ») ou des passages tantôt très mélodiques (l’introduction de « Slain upon his Altar », les guitares harmonisées sur « Let the Heaven Hate »), mais n’oublie pas l’agressivité propre au death metal (« Dethroned The Hypocrites »). Ainsi, les 44 minutes de l’album (en comptant l’ajout de la reprise de Morbid Angel) passent à une vitesse ahurissante, en particulier en raison de la diversité et de l’efficacité de cet album.
Malheureusement plus ou moins mis en sommeil prolongé depuis le départ d’Andreas Allenmark (guitare, chant), le groupe n’a jamais donné de successeur à The Conductor’s Departure (2006), son quatrième album. Toutefois, cette réédition du premier opus permettra, on l’espère, de faire (re)découvrir cette formation on ne peut plus talentueuses aux amateurs du style. Il ne nous reste plus qu’à souhaiter qu’Anata reprenne sérieusement du service et vienne réclamer la reconnaissance entièrement méritée de ses pairs.